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Corte europea dei diritti dell’uomo (Sezione II), 31 marzo 2009

(requĂȘte n. 22644/03)

 

 

AFFAIRE SIMALDONE c. ITALIE

 

 

DÉFINITIF

30/06/2009

Cet arrĂȘt peut subir des retouches de forme.

 

En l’affaire Simaldone c. Italie,

La Cour europĂ©enne des droits de l’homme (deuxiĂšme section), siĂ©geant en une chambre composĂ©e de :

Françoise Tulkens, prĂ©sidente, 
Ireneu Cabral Barreto, 
Vladimiro Zagrebelsky, 
Danutė Jočienė, 
Dragoljub Popović, 
AndrĂĄs SajĂł, 
Işıl Karakaş, juges, 
et de Françoise Elens-Passos, greffiÚre adjointe de section,

AprÚs en avoir délibéré en chambre du conseil le 10 mars 2009,

Rend l’arrĂȘt que voici, adoptĂ© Ă  cette date :

PROCÉDURE

1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requĂȘte (no 22644/03) dirigĂ©e contre la RĂ©publique italienne et dont un ressortissant de cet Etat, M. Francesco Simaldone (« le requĂ©rant Â»), a saisi la Cour le 21 juillet 2003 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertĂ©s fondamentales (« la Convention Â»).

2.  Le requĂ©rant est reprĂ©sentĂ© par Me G. Romano, avocat Ă  BĂ©nĂ©vent. Le gouvernement italien (« le Gouvernement Â») a Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ© successivement par ses agents, MM. I.M. Braguglia, R. Adam et Mme E. Spatafora, et ses coagents, MM. V. Esposito et F. Crisafulli, ainsi que par son coagent adjoint, M. N. Lettieri.

3.  Le 20 novembre 2007, la Cour a dĂ©cidĂ© de communiquer la requĂȘte au Gouvernement. Comme le permet l’article 29 § 3 de la Convention, elle a en outre dĂ©cidĂ© que seraient examinĂ©s en mĂȘme temps la recevabilitĂ© et le fond de l’affaire.

EN FAIT

I.  LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

4.  Le requĂ©rant est nĂ© en 1929 et rĂ©side Ă  BĂ©nĂ©vent.

A.  La procĂ©dure principale

5.  Le 6 octobre 1992, le requĂ©rant assigna le service local de santĂ© publique (« UnitĂ  Sanitaria Locale Â», ci-aprĂšs « U.S.L. Â»), dont il Ă©tait salariĂ©, devant le tribunal administratif rĂ©gional (« le TAR Â») de Campanie (RG no 9633/92), afin d’obtenir le remboursement du prix des repas quotidiens (4,13 euros [EUR] par jour) auquel il estimait avoir droit Ă  partir du 1er janvier 1991.

6.  Le 21 octobre 1992, le requĂ©rant prĂ©senta une demande de fixation d’audience.

7.  Les parties n’ont fourni aucune information sur les dĂ©veloppements de la procĂ©dure, qui demeurait pendante Ă  la date de la dĂ©cision « Pinto Â», le 27 janvier 2003 (paragraphe 9 ci-dessous).

B.  La procĂ©dure « Pinto Â»

8.  Le 17 avril 2002, le requĂ©rant saisit la cour d’appel de Rome au sens de la loi « Pinto Â» et demanda la constatation d’une violation de l’article 6 Â§ 1 de la Convention et, notamment, 10 846 EUR Ă  titre de dommage moral.

9.  Par une dĂ©cision du 27 janvier 2003, dont le texte fut dĂ©posĂ© au greffe le 26 mars 2003, la cour d’appel considĂ©ra la procĂ©dure jusqu’à la date de la dĂ©cision et constata le dĂ©passement d’une durĂ©e raisonnable. Elle accorda 700 EUR en Ă©quitĂ© au requĂ©rant comme rĂ©paration du dommage moral ainsi que 1 000 EUR Ă  son avocat pour frais et dĂ©pens, y compris ceux relatifs Ă  la procĂ©dure devant la Cour. Non notifiĂ©e, cette dĂ©cision devint dĂ©finitive le 10 mai 2004.

10.  La somme accordĂ©e en exĂ©cution de la dĂ©cision Pinto, y compris les intĂ©rĂȘts, fut payĂ©e le 6 avril 2004, Ă  la suite d’une saisie. Le requĂ©rant reçut 723 EUR.

II.  LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS

A.  Le droit et la pratique interne pertinents relatifs Ă  la loi « Pinto Â»

11.  Le droit et la pratique internes pertinents relatifs Ă  la loi no 89 du 24 mars 2001, dite « loi Pinto Â» figurent dans l’arrĂȘt Cocchiarella c. Italie ([GC], no 64886/01, §§ 23-31, CEDH 2006-...).

12.  Notamment, la loi « Pinto Â» dispose entre autres :

Article 2 – Droit Ă  une satisfaction Ă©quitable

« 1.  (...)

3.  Le juge dĂ©termine le montant de la rĂ©paration conformĂ©ment Ă  l’article 2056 du code civil, en respectant les dispositions suivantes :

a)  seul le prĂ©judice qui peut se rapporter Ă  la pĂ©riode excĂ©dant le dĂ©lai raisonnable indiquĂ© au paragraphe 1 peut ĂȘtre pris en compte ;

(...) Â»

Article 3 – ProcĂ©dure

« 1.  (...)

6.  La cour prononce, dans les quatre mois suivant la formation du recours, une dĂ©cision susceptible de pourvoi en cassation. La dĂ©cision est immĂ©diatement exĂ©cutoire.

7.  Le paiement des indemnitĂ©s aux ayants droit a lieu, dans la limite des ressources disponibles, Ă  compter du 1er janvier 2002. Â»

Article 5 – Communication

« La dĂ©cision qui fait droit Ă  la demande est communiquĂ©e par le greffe, non seulement aux parties, mais aussi au procureur gĂ©nĂ©ral prĂšs la Cour des comptes afin de permettre l’éventuelle instruction d’une procĂ©dure en responsabilitĂ©, et aux titulaires de l’action disciplinaire des fonctionnaires concernĂ©s par la procĂ©dure. Â»

13.  La Cour de cassation plĂ©niĂšre (Sezioni Unite), saisie de recours contre des dĂ©cisions rendues par des cours d’appel dans le cadre de procĂ©dures « Pinto Â», a rendu le 27 novembre 2003 quatre arrĂȘts de cassation avec renvoi (nos 1338, 1339, 1340 et 1341), dont les textes furent dĂ©posĂ©s au greffe le 26 janvier 2004 et dans lesquels elle a affirmĂ© que « la jurisprudence de la Cour de Strasbourg s’impose aux juges italiens en ce qui concerne l’application de la loi no 89/2001 Â».

Elle a notamment affirmĂ© dans son arrĂȘt no 1340 le principe selon lequel :

« la dĂ©termination du dommage extrapatrimonial effectuĂ©e par la cour d’appel conformĂ©ment Ă  l’article 2 de la loi nÂș 89/2001, bien que par nature fondĂ©e sur l’équitĂ©, doit intervenir dans un environnement qui est dĂ©fini par le droit puisqu’il faut se rĂ©fĂ©rer aux montants allouĂ©s, dans des affaires similaires, par la Cour de Strasbourg, dont il est permis de s’éloigner mais de façon raisonnable. Â»

B.  Le droit interne pertinent en matiĂšre de publication, communication, notification et exĂ©cution des dĂ©cisions judiciaires en matiĂšre civile

14.  Les dispositions du code de procĂ©dure civile en la matiĂšre se lisent ainsi dans leurs parties pertinentes :

Article 133 – Publication et communication de l’arrĂȘt

« L’arrĂȘt est rendu public par son dĂ©pĂŽt auprĂšs du greffe de la juridiction qui l’a rendu.

Le greffier atteste le dĂ©pĂŽt au bas de la dĂ©cision et y appose la date et sa signature; dans les cinq jours, il en informe les parties par un avis contenant le dispositif. (...) Â»

Article 136 – Communications

« Le greffier, par billet de greffe (biglietto di cancelleria) en papier non timbrĂ©, fait les communications prescrites par la loi ou par le juge au Parquet, aux parties, Ă  l’expert, aux autres auxiliaires du juge et aux tĂ©moins, et donne connaissance des dĂ©cisions pour lesquelles la loi prescrit telle forme abrĂ©gĂ©e de communication. (...) Â»

Article 137 – Notifications

« Les notifications, quand il n’est pas prĂ©vu autrement, sont exĂ©cutĂ©es par l’huissier de justice, sur demande (istanza) de la partie ou sur requĂȘte (richiesta) du Parquet ou du greffier. (...) Â»

Article 475 – Apposition de la formule exĂ©cutoire

« Les arrĂȘts et les autres dĂ©cisions de l’autoritĂ© judiciaire (...), pour valoir titre pour l’exĂ©cution forcĂ©e, doivent ĂȘtre munis de la formule exĂ©cutoire, sauf si la loi dispose autrement. (...) Â»

Article 479 – Notification du titre exĂ©cutoire et de la mise en demeure (precetto)

« A moins que la loi n’en dispose autrement, l’exĂ©cution forcĂ©e doit ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©e par la notification du titre revĂȘtu de la formule exĂ©cutoire et de la mise en demeure. (...) Â»

15.  L’article 14 de la loi no 30 du 28 fĂ©vrier 1997 dispose entre autres :

Article 14 – ExĂ©cution forcĂ©e contre les administrations publiques

« 1.  Les administrations de l’Etat et les organismes publics Ă  caractĂšre non Ă©conomique accomplissent les procĂ©dures d’exĂ©cution des dĂ©cisions judiciaires et des sentences arbitrales exĂ©cutoires comportant l’obligation de payer des sommes d’argent dans les cent-vingt jours suivant la notification du titre revĂȘtu de la formule exĂ©cutoire. Avant l’échĂ©ance de ce dĂ©lai, le crĂ©ancier n’a pas le droit d’entamer de procĂ©dure d’exĂ©cution forcĂ©e ni de notifier la mise en demeure. (...) Â»

EN DROIT

I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

16.  Le requĂ©rant se plaint de la durĂ©e de la procĂ©dure civile. AprĂšs avoir Ă©puisĂ© la voie de recours « Pinto Â», il considĂšre que le montant accordĂ© par la cour d’appel Ă  titre de dommage moral n’est pas suffisant pour rĂ©parer le prĂ©judice causĂ© par la violation de l’article 6 § 1 de la Convention.

17.  Le Gouvernement s’oppose Ă  cette thĂšse.

18.  L’article 6 § 1 est ainsi libellĂ©  dans sa partie pertinente :

Article 6 § 1

« Toute personne a droit Ă  ce que sa cause soit entendue (...) dans un dĂ©lai raisonnable, par un tribunal (...), qui dĂ©cidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractĂšre civil (...) Â»

A.  Sur la recevabilitĂ©

1.  QualitĂ© de « victime Â»

19.  Selon le Gouvernement, le requĂ©rant n’est plus « victime Â» de la violation de l’article 6 § 1 car il a obtenu de la cour d’appel de Rome un constat de violation et un redressement appropriĂ© et suffisant par rapport au trĂšs faible enjeu du litige.

20.  Il affirme que la cour d’appel de Rome a tranchĂ© l’affaire en conformitĂ© avec les paramĂštres indemnitaires dĂ©gagĂ©s des prĂ©cĂ©dents disponibles Ă  l’époque dans la jurisprudence de la Cour. Il souligne qu’il serait inappropriĂ© d’apprĂ©cier l’évaluation de la cour d’appel, faite quelques mois aprĂšs l’entrĂ©e en vigueur de la loi « Pinto Â», sur la base des paramĂštres introduits par la Cour lors des arrĂȘts de la Grande Chambre du 29 mars 2006 (ex pluribus, Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©). Selon le Gouvernement, les indemnisations qui rĂ©sulteraient de l’application Ă  des « affaires du passĂ© Â» de ces critĂšres, conçus pour l’époque actuelle, seraient au moins doubles et parfois triples par rapport Ă  celles accordĂ©es dans des requĂȘtes italiennes de durĂ©e tranchĂ©es par la Cour auparavant.

21.  Les paramĂštres Ă©tablis par la Grande Chambre, formulĂ©s de façon apodictique, parviendraient, selon le Gouvernement, Ă  des rĂ©sultats dĂ©raisonnables, injustes et incompatibles avec l’esprit et les buts de la Convention. Les indemnisations que la Cour octroie dans les requĂȘtes italiennes de durĂ©e en application de ces critĂšres seraient doubles ou triples par rapport Ă  celles accordĂ©es auparavant dans des affaires similaires d’autres pays qui ne disposeraient mĂȘme pas d’un remĂšde interne contre la durĂ©e excessive des procĂ©dures.

22.  Le Gouvernement prĂ©cise enfin qu’aux termes de la loi « Pinto Â», ce ne sont que les annĂ©es dĂ©passant la durĂ©e « raisonnable Â» qui peuvent ĂȘtre prises en compte pour dĂ©terminer le montant de l’indemnisation Ă  octroyer par la cour d’appel.

23.  Le requĂ©rant estime qu’il est toujours « victime Â» de la violation dans la mesure oĂč la procĂ©dure « Pinto Â» a eu une durĂ©e excessive. En outre, la somme allouĂ©e Ă  titre d’indemnisation est dĂ©risoire et a Ă©tĂ© versĂ©e en retard. Selon lui, l’enjeu du litige ne serait pas pertinent pour Ă©valuer sa qualitĂ© de « victime Â», car toute personne a droit Ă  ce que sa cause soit examinĂ©e dans un dĂ©lai raisonnable, indĂ©pendamment de l’enjeu de la procĂ©dure nationale.

24.  La Cour rappelle que, selon l’article 34 de la Convention, elle « peut ĂȘtre saisie d’une requĂȘte par toute personne physique (...) qui se prĂ©tend victime d’une violation par l’une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses Protocoles. (...) Â». A cet Ă©gard, elle reconnaĂźt qu’il appartient en premier lieu aux autoritĂ©s nationales de redresser une violation allĂ©guĂ©e de la Convention. Il s’ensuit que la question de savoir si un requĂ©rant peut se prĂ©tendre victime du manquement allĂ©guĂ© se pose Ă  tous les stades de la procĂ©dure au regard de la Convention (Bourdov c. Russie, no 59498/00, § 30, CEDH 2002-III).

25.  Toutefois, une dĂ©cision ou mesure favorable au requĂ©rant ne suffit en principe Ă  lui retirer la qualitĂ© de « victime Â» que si les autoritĂ©s nationales ont reconnu, explicitement ou en substance, et rĂ©parĂ© la violation de la Convention (voir, par exemple, Eckle c. Allemagne, 15 juillet 1982, §§ 69 et suiv., sĂ©rie A no 51 ; Amuur c. France, 25 juin 1996, § 36, Recueil des arrĂȘts et dĂ©cisions 1996-III ; Dalban c. Roumanie [GC], no 28114/95, § 44, CEDH 1999-VI ; Jensen c. Danemark (dĂ©c.), no 48470/99, CEDH 2001-X).

26.  Il appartient Ă  la Cour de vĂ©rifier, a posteriori, d’une part, s’il y a eu reconnaissance par les autoritĂ©s, au moins en substance, d’une violation d’un droit protĂ©gĂ© par la Convention et, d’autre part, si le redressement opĂ©rĂ© peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme appropriĂ© et suffisant (voir, notamment, Normann c. Danemark (dĂ©c.), no 44704/98, 14 juin 2001 ; Jensen et Rasmussen c. Danemark (dĂ©c.), no 52620/99, 20 mars 2003 ; Nardone c. Italie (dĂ©c.), no 34368/02, 25 novembre 2004).

27.  La premiĂšre condition, Ă  savoir la reconnaissance par les autoritĂ©s nationales d’une violation de la Convention, ne prĂȘte pas Ă  controverse.

28.  Quant Ă  la seconde condition, Ă  savoir que le requĂ©rant ait bĂ©nĂ©ficiĂ© d’un redressement appropriĂ© et suffisant, la Cour a dĂ©jĂ  indiquĂ© que, mĂȘme si un recours doit ĂȘtre regardĂ© comme « effectif Â» dĂšs lors qu’il permet soit de faire intervenir plus tĂŽt la dĂ©cision des juridictions saisies, soit de fournir au justiciable une rĂ©paration adĂ©quate pour les retards dĂ©jĂ  accusĂ©s, cette conclusion n’est valable que pour autant que l’action indemnitaire demeure elle-mĂȘme un recours efficace, adĂ©quat et accessible permettant de sanctionner la durĂ©e excessive d’une procĂ©dure judiciaire (Paulino Tomas c. Portugal (dĂ©c.), no 58698/00, CEDH 2003-VIII).

29.  La Cour note d’abord que la procĂ©dure « Pinto Â» devant la cour d’appel a durĂ© du 17 avril 2002 au 26 mars 2003, soit onze mois pour un degrĂ© de juridiction, ce qui constitue une durĂ©e excessive, eu Ă©gard Ă  la nature de la voie de recours « Pinto Â».

30.  Elle estime en outre qu’en se bornant Ă  octroyer une somme de 700 EUR au requĂ©rant pour dommage moral, la cour d’appel de Rome n’a pas rĂ©parĂ© la violation en cause de maniĂšre appropriĂ©e et suffisante. Se rĂ©fĂ©rant aux principes dĂ©gagĂ©s dans sa jurisprudence (voir, entre autres, Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, §§ 69-98), la Cour relĂšve en effet que la somme en question ne reprĂ©sente guĂšre plus que 7,8 % de ce qu’elle octroie gĂ©nĂ©ralement dans des affaires italiennes similaires. Quant Ă  l’incidence de l’enjeu du litige, elle observe que celui-ci reprĂ©sente sans nul doute l’un des critĂšres consacrĂ©s par sa jurisprudence, comme la complexitĂ© de l’affaire et le comportement de la partie requĂ©rante et des autoritĂ©s compĂ©tentes, dans l’apprĂ©ciation du dĂ©passement du dĂ©lai raisonnable ainsi que du dommage moral subi (voir Aragosa c. Italie, no 20191/03, § 22, 18 dĂ©cembre 2007). Toutefois, elle rappelle que, mĂȘme lorsque cet enjeu est de faible importance, les procĂ©dures en matiĂšre de droit du travail, telles la prĂ©sente, ainsi que les procĂ©dures en matiĂšre d’état et de capacitĂ© des personnes, doivent ĂȘtre menĂ©es de maniĂšre particuliĂšrement rapide. NĂ©anmoins, l’enjeu du litige pourra Ă©ventuellement justifier une rĂ©duction du montant Ă  allouer aux termes de l’article 41 de la Convention (voir, mutatis mutandis, Aragosa c. Italie, prĂ©citĂ©, § 22). Quant Ă  la circonstance que la loi « Pinto Â» ne permet pas d’indemniser le requĂ©rant pour la durĂ©e globale de la procĂ©dure mais prend en compte le seul prĂ©judice qui peut se rapporter Ă  la pĂ©riode excĂ©dant le « dĂ©lai raisonnable Â» (article 2, alinĂ©a 3, lettre a) de ladite loi) (paragraphe 12 ci-dessus), la Cour rappelle qu’un Etat partie Ă  la Convention dispose d’une marge d’apprĂ©ciation pour organiser une voie de recours interne de façon cohĂ©rente avec son propre systĂšme juridique et ses traditions, en conformitĂ© avec le niveau de vie du pays (Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 80). La circonstance que la mĂ©thode de calcul de l’indemnisation prĂ©vue en droit interne ne correspond pas exactement aux critĂšres Ă©noncĂ©s par la Cour n’est pas dĂ©cisive pourvu que les juridictions « Pinto Â» parviennent Ă  octroyer des sommes qui ne soient pas dĂ©raisonnables par rapport Ă  celles allouĂ©es par la Cour dans des affaires similaires (Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 105).

31. Enfin, la Cour observe que l’indemnitĂ© allouĂ©e au requĂ©rant ne lui a Ă©tĂ© effectivement versĂ©e que le 6 avril 2004, soit douze mois aprĂšs le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision de la cour d’appel.

32.  Quant aux observations du Gouvernement relatives Ă  une prĂ©tendue incohĂ©rence entre, d’une part, les paramĂštres indemnitaires dĂ©gagĂ©s dans les arrĂȘts de la Grande Chambre du 29 mars 2006 et, d’autre part, ceux suivis dans les requĂȘtes italiennes de durĂ©e prĂ©cĂ©demment tranchĂ©es par la Cour ainsi que dans les affaires similaires d’autres pays, la Cour rappelle qu’elle a rejetĂ© une exception semblable dans l’arrĂȘt Aragosa c. Italie (prĂ©citĂ©, §§ 17-24). AprĂšs avoir procĂ©dĂ© Ă  l’analyse de sa jurisprudence aussi bien antĂ©rieure que postĂ©rieure au 29 mars 2006 et Ă  un examen comparatif des sommes allouĂ©es Ă  titre de satisfaction Ă©quitable respectivement dans les affaires italiennes de durĂ©e de procĂ©dure et les affaires similaires concernant d’autres Etats Contractants, la Cour avait observĂ© que les sommes octroyĂ©es dans des affaires italiennes postĂ©rieures au 29 mars 2006 sont loin d’ĂȘtre triples, ou mĂȘme doubles, par rapport Ă  celles allouĂ©es auparavant dans des affaires comparables d’autres pays citĂ©es par le Gouvernement Ă  titre d’exemple. La Cour n’aperçoit aucune raison de dĂ©roger Ă  ses prĂ©cĂ©dentes conclusions et rejette donc l’exception.

33.  La Cour considĂšre donc qu’eu Ă©gard aux insuffisances du redressement opĂ©rĂ©, le requĂ©rant peut toujours se prĂ©tendre « victime Â» au sens de l’article 34 de la Convention.

2.  Conclusion

34.  La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondĂ© au sens de l’article 35 § 3 de la Convention et ne se heurte Ă  aucun autre motif d’irrecevabilitĂ©. Il doit partant ĂȘtre dĂ©clarĂ© recevable.

B.  Sur le fond

35.  En ce qui concerne le premier volet du grief, la Cour estime que la pĂ©riode litigieuse s’étend du 6 octobre 1992, jour de l’assignation de l’U.S.L. devant le TAR de Campanie, jusqu’au 27 janvier 2003, date prise en considĂ©ration par la cour d’appel « Pinto Â» et Ă  laquelle, selon les informations contenues dans le dossier de la requĂȘte, la procĂ©dure principale Ă©tait pendante. Elle avait donc dĂ©jĂ  durĂ© un peu plus de dix ans et trois mois pour un degrĂ© de juridiction.

36.  AprĂšs avoir examinĂ© les faits Ă  la lumiĂšre des informations fournies par les parties et compte tenu de sa jurisprudence en la matiĂšre, la Cour estime qu’en l’espĂšce, la durĂ©e de la procĂ©dure litigieuse a Ă©tĂ© excessive et ne rĂ©pond pas Ă  l’exigence du « dĂ©lai raisonnable Â».

37.  Quant Ă  l’autre volet, la Cour observe qu’elle vient de juger que le montant accordĂ© ne permettait pas de considĂ©rer le redressement offert en l’occurrence comme suffisant, d’autant plus que la durĂ©e de la procĂ©dure « Pinto Â» a Ă©tĂ© excessive et le paiement de l’indemnisation « Pinto Â» s’est avĂ©rĂ© tardif.

38.  En conclusion, il y a eu violation de l’article 6 § 1.

II.  SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DES ARTICLES 6 § 1 DE LA CONVENTION ET 1 DU PROTOCOLE No 1 DU FAIT DU RETARD DANS LE PAIEMENT DE L’INDEMNISATION « PINTO Â»

39.  Le requĂ©rant affirme que le retard mis par les autoritĂ©s nationales Ă  se conformer Ă  la dĂ©cision « Pinto Â» de la cour d’appel de Rome a entraĂźnĂ© la violation de l’article 6 § 1 de la Convention, prĂ©citĂ©, et l’article 1 du Protocole no 1 ainsi libellĂ© dans sa partie pertinente :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut ĂȘtre privĂ© de sa propriĂ©tĂ© que pour cause d’utilitĂ© publique et dans les conditions prĂ©vues par la loi et les principes gĂ©nĂ©raux du droit international.

Les dispositions prĂ©cĂ©dentes ne portent pas atteinte au droit que possĂšdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nĂ©cessaires pour rĂ©glementer l’usage des biens conformĂ©ment Ă  l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral (...) Â»

40.  Le Gouvernement conteste cette thĂšse.

A.  Sur la recevabilitĂ©

1.  Non-Ă©puisement des voies de recours internes

41.  Excipant du non-Ă©puisement des voies de recours internes, le Gouvernement soutient que le retard litigieux ne saurait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un refus ou une carence grave de remplir l’obligation d’exĂ©cuter une dĂ©cision de justice mais devrait ĂȘtre qualifiĂ© uniquement sous l’angle du respect du dĂ©lai raisonnable. Il estime que le requĂ©rant aurait dĂ» entamer une nouvelle procĂ©dure « Pinto Â» afin de se plaindre de la durĂ©e de l’exĂ©cution de la dĂ©cision « Pinto Â».

42.  En ce qui concerne l’ article 6 § 1 de la Convention, la Cour rappelle que le droit Ă  un tribunal garanti par cette disposition inclut le droit Ă  l’exĂ©cution d’une dĂ©cision judiciaire dĂ©finitive et obligatoire et que l’exĂ©cution d’un jugement doit ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme faisant partie intĂ©grante du « procĂšs Â» au sens de l’article 6 (voir, notamment, Hornsby c. GrĂšce, 19 mars 1997, § 40 et suiv., Recueil 1997-II ; Metaxas c. GrĂšce, no 8415/02, § 25, 27 mai 2004). L’exĂ©cution Ă©tant la seconde phase de la procĂ©dure au fond, le droit revendiquĂ© ne trouve sa rĂ©alisation effective qu’au moment de l’exĂ©cution (voir, entre autres, les arrĂȘts Di Pede c. Italie et Zappia c. Italie, 26 septembre 1996, respectivement §§  22, 24, 26 et 18, 20, 22, Recueil 1996-IV ; mutatis mutandis, Silva Pontes c. Portugal, 23 mars 1994, § 33, sĂ©rie A no 286-A).

43.  Dans l’arrĂȘt Cocchiarella c. Italie prĂ©citĂ© (§§ 36-107), la Cour a pris en considĂ©ration le retard dans le paiement de l’indemnisation « Pinto Â» afin d’évaluer le caractĂšre appropriĂ© et suffisant du redressement offert par ce remĂšde pour la violation du droit au « dĂ©lai raisonnable Â». MaĂźtresse de la qualification juridique des faits de la cause (voir, en premier lieu, Guerra et autres c. Italie, 19 fĂ©vrier 1998, § 44, Recueil 1998-I), la Cour estime qu’il y a lieu d’analyser ce grief sous l’angle du droit du requĂ©rant Ă  un tribunal tel que garanti par l’article 6 Â§ 1 de la Convention et notamment de l’obligation de l’Etat de se conformer Ă  une dĂ©cision judiciaire exĂ©cutoire.

44.  Enfin, la Cour considĂšre qu’exiger du requĂ©rant un nouveau recours « Pinto Â» pour se plaindre de la durĂ©e de l’exĂ©cution de la dĂ©cision « Pinto Â», comme le suggĂšre le Gouvernement, reviendrait Ă  enfermer le requĂ©rant dans un cercle vicieux oĂč le dysfonctionnement d’un remĂšde l’obligerait Ă  en entamer un autre. Une telle conclusion serait dĂ©raisonnable et constituerait un obstacle disproportionnĂ© Ă  l’exercice efficace par le requĂ©rant de son droit de recours individuel, tel que dĂ©fini Ă  l’article 34 de la Convention (voir en ce sens Vaney c. France, no 53946/00, § 53, 30 novembre 2004 et, mutatis mutandis, Kaić c. Croatie, no 22014/04, § 32, 17 juillet 2008).

45.  Quant Ă  l’article 1 du Protocole no 1, la Cour rappelle que l’impossibilitĂ© pour une personne d’obtenir l’exĂ©cution d’un jugement rendu en sa faveur constitue une ingĂ©rence dans son droit au respect de ses biens, qui relĂšve de la premiĂšre phrase du premier alinĂ©a de l’article 1 du Protocole no 1 (voir Bourdov c. Russie, prĂ©citĂ©, § 40).

46.  Le grief du requĂ©rant pouvant ĂȘtre analysĂ© aussi sous l’angle de cette disposition, la Cour estime que l’exception du Gouvernement tirĂ©e du non-Ă©puisement de la voie de recours « Pinto Â» n’est pas pertinente en l’espĂšce et doit donc ĂȘtre rejetĂ©e.

2.  Conclusion

47.  La Cour constate que ces griefs ne sont pas manifestement mal fondĂ©s au sens de l’article 35 § 3 de la Convention et ne se heurtent Ă  aucun autre motif d’irrecevabilitĂ©. Il convient donc de les dĂ©clarer recevables.

B.  Sur le fond

48.  En ce qui concerne l’article 6 § 1 de la Convention, la Cour rappelle avoir dĂ©jĂ  statuĂ© (voir, en premier lieu, Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 89) que s’il est admissible qu’une administration puisse avoir besoin d’un certain laps de temps pour procĂ©der Ă  un paiement, nĂ©anmoins, s’agissant d’un recours indemnitaire visant Ă  redresser les consĂ©quences de la durĂ©e excessive de procĂ©dures, ce laps de temps ne devrait gĂ©nĂ©ralement pas dĂ©passer six mois Ă  compter du moment oĂč la dĂ©cision d’indemnisation devient exĂ©cutoire.

49.  En outre, une autoritĂ© de l’Etat ne saurait prĂ©texter du manque de ressources pour ne pas honorer une dette fondĂ©e sur une dĂ©cision de justice (voir Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 90 ; Bourdov c. Russie, prĂ©citĂ©, § 35).

50.  La Cour note que la somme octroyĂ©e par la juridiction « Pinto Â» n’a Ă©tĂ© versĂ©e que le 6 avril 2004, soit douze mois aprĂšs le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision de la cour d’appel. Ce paiement a donc largement dĂ©passĂ© les six mois Ă  compter du moment oĂč la dĂ©cision d’indemnisation devint exĂ©cutoire.

51.  Le Gouvernement soutient que le dĂ©lai de six mois pour procĂ©der au paiement de l’indemnisation « Pinto Â» devrait ĂȘtre calculĂ© Ă  partir du moment oĂč la dĂ©cision de la cour d’appel « Pinto Â» est communiquĂ©e Ă  l’Administration par le greffe au sens de l’article 136 du code de procĂ©dure civile ou Ă  compter de la notification Ă  l’Administration par le requĂ©rant aux termes des articles 137, 475 et 479 du mĂȘme code (paragraphe 14 ci-dessus).

52.  Quant Ă  l’exception relative Ă  la communication de la dĂ©cision « Pinto Â» par le greffe de la cour d’appel, la Cour note d’abord qu’aux termes des articles 5 de la loi « Pinto Â» et 133 du code de procĂ©dure civile (paragraphes 12 et 14 ci-dessus), ladite communication doit ĂȘtre faite dans les cinq jours suivant le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision. Or, mĂȘme en calculant le dĂ©lai de six mois Ă©tabli dans l’arrĂȘt Cocchiarella c. Italie au plus tard cinq jours aprĂšs le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision « Pinto Â», cette circonstance ne serait pas dĂ©terminante. Par ailleurs, une communication tardive de la dĂ©cision « Pinto Â» par le greffe de la cour d’appel ne saurait ĂȘtre mise Ă  la charge du requĂ©rant, puisque le retard serait en tout cas imputable Ă  l’Etat dĂ©fendeur.

53.  Quant Ă  la prĂ©tendue nĂ©cessitĂ© de notification de la dĂ©cision « Pinto Â» par les soins du requĂ©rant, la Cour constate qu’aux termes de l’article 3 alinĂ©a 6 de la loi « Pinto Â» (paragraphe 12 ci-dessus), la dĂ©cision rendue par la cour d’appel est immĂ©diatement exĂ©cutoire. Il s’ensuit que l’Administration est tenue de la mettre Ă  exĂ©cution dĂšs son dĂ©pĂŽt au greffe, en versant au bĂ©nĂ©ficiaire l’indemnisation « Pinto Â» octroyĂ©e par la cour d’appel. La notification n’est nĂ©cessaire qu’aux fins d’entamer une procĂ©dure d’exĂ©cution forcĂ©e (article 479 du code de procĂ©dure civile). En l’espĂšce, la Cour rappelle avoir jugĂ© inopportun de demander Ă  une personne qui a obtenu une crĂ©ance contre l’Etat Ă  l’issue d’une procĂ©dure judiciaire d’engager par la suite une procĂ©dure d’exĂ©cution forcĂ©e afin d’obtenir satisfaction (Metaxas c. GrĂšce, prĂ©citĂ©, § 19 ; Karahalios c. GrĂšce, no 62503/00, § 23, 11 dĂ©cembre 2003) et que, dans le cadre du recours « Pinto Â», les intĂ©ressĂ©s n’ont pas d’obligation d’entamer une procĂ©dure d’exĂ©cution (voir Delle Cave et Corrado c. Italie, no 14626/03, §§ 23-24, 5 juin 2007, CEDH 2007-...).

54.  A la lumiĂšre de ces considĂ©rations, la thĂšse du Gouvernement quant au dies a quo pour le calcul du retard dans le paiement de l’indemnisation « Pinto Â» ne saurait ĂȘtre accueillie et, partant, le dĂ©lai de six mois pour effectuer ce paiement court, conformĂ©ment Ă  la jurisprudence Cocchiarella c. Italie, Ă  partir de la date oĂč la dĂ©cision devient exĂ©cutoire, c’est-Ă -dire la date du dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision « Pinto Â», non attaquĂ©e en l’espĂšce devant la Cour de cassation par aucune des parties Ă  la procĂ©dure.

55.  DĂšs lors, en s’abstenant pendant douze mois de prendre les mesures nĂ©cessaires pour se conformer Ă  la dĂ©cision de la cour d’appel « Pinto Â» rendue en l’espĂšce, les autoritĂ©s italiennes ont privĂ© les dispositions de l’article 6 § 1 de la Convention de tout effet utile.

56.  Partant, il y a eu violation de l’article 6 § 1, sous l’angle du droit Ă  l’exĂ©cution des dĂ©cisions judiciaires.

57.  Sur le terrain de l’article 1 du Protocole no 1, le Gouvernement soutient que cette disposition n’a pas Ă©tĂ© violĂ©e en l’espĂšce au motif que le retard dans l’exĂ©cution de la dĂ©cision « Pinto Â» serait nĂ©gligeable et compensĂ© par l’octroi d’intĂ©rĂȘts moratoires.

58.  Le requĂ©rant affirme que le dommage moral dĂ©coulant de la violation du « dĂ©lai raisonnable Â» ne saurait ĂȘtre compensĂ© par l’octroi d’intĂ©rĂȘts moratoires, qui visent Ă  neutraliser le dommage matĂ©riel dĂ©coulant de la non-disponibilitĂ© d’une somme d’argent.

59.  La Cour estime qu’à la lumiĂšre de sa jurisprudence (voir Bourdov c. Russie, prĂ©citĂ©, § 40), le retard litigieux s’analyse en une ingĂ©rence dans le droit au respect des biens du requĂ©rant.  Or, dans la prĂ©sente affaire, le Gouvernement n’a fourni aucune justification pour cette ingĂ©rence, et la Cour estime qu’un Ă©ventuel manque de ressources ne saurait lĂ©gitimer une telle omission (Bourdov c. Russie, prĂ©citĂ©, § 41).

60.  La Cour rappelle aussi que, dans l’arrĂȘt Shmalko c. Ukraine (no 60750/00, § 56, 20 juillet 2004), elle a conclu Ă  une violation de l’article 1 du Protocole no 1 dans une affaire oĂč la dĂ©cision rendue en faveur du requĂ©rant avait Ă©tĂ© mise en exĂ©cution quinze mois aprĂšs son prononcĂ©.  Dans une affaire oĂč une dĂ©cision d’indemnisation pour dĂ©tention illĂ©gale avait Ă©tĂ© mise Ă  exĂ©cution douze mois aprĂšs avoir Ă©tĂ© rendue, la Cour a observĂ© que, mĂȘme si ce retard pouvait ĂȘtre considĂ©rĂ© non excessif per se, la nature de la dĂ©cision devait ĂȘtre prise en compte (Lupacescu et autres c. Moldova, nos 3417/02, 5994/02, 28365/02, 5742/03, 8693/03, 31976/03, 13681/03, et 32759/03, § 23, 21 mars 2006). La Cour a soulignĂ© qu’un retard dans le paiement de la somme allouĂ©e devait avoir aggravĂ© pour le requĂ©rant la frustration rĂ©sultant de sa dĂ©tention illĂ©gale (ibidem). Elle a, par consĂ©quent, conclu Ă  la violation de l’article 1 du Protocole no 1 (Lupacescu, prĂ©citĂ©, § 24).

61.  La Cour estime tout d’abord que ce raisonnement doit ĂȘtre suivi, mutatis mutandis, en l’espĂšce, car le requĂ©rant a entamĂ© une procĂ©dure en rĂ©paration (circonstance non contestĂ©e par le Gouvernement) afin d’ĂȘtre dĂ©dommagĂ© du prĂ©judice dĂ©coulant de la violation de son droit Ă  un procĂšs dans un « dĂ©lai raisonnable Â» et s’est ensuite retrouvĂ© Ă  subir la frustration additionnelle rĂ©sultant de la difficultĂ© Ă  obtenir le versement de l’indemnisation.

62.  Quant au seuil susceptible d’entraĂźner une violation de l’article 1 du Protocole no 1, la Cour estime opportun de se rĂ©fĂ©rer lĂ  aussi Ă  un dĂ©lai de six mois Ă  partir du moment oĂč la dĂ©cision, non attaquĂ©e devant la Cour de cassation par aucune des parties Ă  la procĂ©dure, devient exĂ©cutoire.

63.  Pour ce qui est enfin de l’argument du Gouvernement selon lequel le retard aurait Ă©tĂ© compensĂ© par l’octroi d’intĂ©rĂȘts moratoires, la Cour relĂšve que le requĂ©rant a reçu 23 EUR Ă  titre d’intĂ©rĂȘts pour un retard de douze mois dans le paiement de la somme « Pinto Â». Toutefois, eu Ă©gard Ă  la nature de la voie de recours interne et au fait que le requĂ©rant n’était pas tenu d’entamer une procĂ©dure d’exĂ©cution, la Cour estime que le versement des intĂ©rĂȘts ne saurait ĂȘtre dĂ©terminant en l’espĂšce.

64.  Partant, il y a eu violation de l’article 1 du Protocole no 1.

III.  SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DES ARTICLES 13 ET 53 DE LA CONVENTION DU FAIT DE L’INSUFFISANCE ET DU RETARD DANS LE PAIEMENT DE L’INDEMNISATION « PINTO Â» OBTENUE PAR LE REQUERANT

65.  Sur le terrain des articles 13 et 53 de la Convention, le requĂ©rant se plaint de l’ineffectivitĂ© du remĂšde « Pinto Â», en raison de l’insuffisance de la rĂ©paration octroyĂ©e par la cour d’appel de Rome. Il se plaint en outre du retard dans le paiement de l’indemnisation « Pinto Â».

66.  Les articles 13 et 53 de la Convention sont ainsi libellĂ©s :

Article 13

« Toute personne dont les droits et libertĂ©s reconnus dans la (...) Convention ont Ă©tĂ© violĂ©s, a droit Ă  l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors mĂȘme que la violation aurait Ă©tĂ© commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. Â»

Article 53

« Aucune des dispositions de la (...) Convention ne sera interprĂ©tĂ©e comme limitant ou portant atteinte aux droits de l’homme et aux libertĂ©s fondamentales qui pourraient ĂȘtre reconnus conformĂ©ment aux lois de toute Partie contractante ou Ă  toute autre Convention Ă  laquelle cette Partie contractante est partie. Â»

A.  Sur la recevabilitĂ©

67.  La Cour estime d’abord que ces griefs doivent ĂȘtre considĂ©rĂ©s uniquement sous l’angle de l’article 13 de la Convention.

68.  En ce qui concerne le volet du grief relatif Ă  l’insuffisance de l’indemnisation « Pinto Â», la Cour rappelle que l’article 13 de la Convention garantit l’existence en droit interne d’un recours permettant de s’y prĂ©valoir des droits et libertĂ©s tels qu’ils peuvent s’y trouver consacrĂ©s. Il implique que l’instance nationale compĂ©tente soit habilitĂ©e, d’abord, Ă  connaĂźtre du contenu du grief fondĂ© sur la Convention et, ensuite, Ă  offrir un redressement appropriĂ© dans les cas qui le mĂ©ritent (voir Mifsud c. France (dĂ©c.) [GC], no 57220/00, § 17, ECHR 2002-VIII ; Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, §§ 77-79 ; Surmeli c. Allemagne [GC], no 75529/01, § 99, 8 juin 2006). Cela Ă©tant, le droit Ă  un recours effectif au sens de la Convention ne saurait ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme donnant droit Ă  ce qu’une demande soit accueillie dans le sens souhaitĂ© par l’intĂ©ressĂ© (Surmeli c. Allemagne, prĂ©citĂ©, § 98).

69.  La Cour rappelle aussi qu’en janvier 2004, la Cour de cassation, par les arrĂȘts nos 1338, 1339, 1340 et 1341, a posĂ© le principe selon lequel « la dĂ©termination du dommage extrapatrimonial effectuĂ©e par la cour d’appel conformĂ©ment Ă  l’article 2 de la loi nÂș 89/2001, bien que par nature fondĂ©e sur l’équitĂ©, doit intervenir dans un environnement qui est dĂ©fini par le droit puisqu’il faut se rĂ©fĂ©rer aux montants allouĂ©s, dans des affaires similaires, par la Cour de Strasbourg, dont il est permis de s’éloigner mais de façon raisonnable Â» (voir paragraphe 13 ci-dessus, ainsi que Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, §§ 24-25). A la suite de ce revirement, la Cour a considĂ©rĂ© qu’à partir du 26 juillet 2004, date Ă  laquelle ces arrĂȘts, et notamment l’arrĂȘt n1340 de la Cour de cassation, ne pouvaient plus ĂȘtre ignorĂ©s du public, il devait ĂȘtre exigĂ© des requĂ©rants qu’ils usent du recours en cassation au sens de la loi « Pinto Â» aux fins de l’article 35 Â§ 1 de la Convention (Di Sante c. Italie (dĂ©c.), no 56079/00, 24 juin 2004 ; Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, §§ 42-44).

70.  La rĂšgle de l’épuisement prĂ©alable des voies de recours internes Ă©tablie par l’article 35 § 1 de la Convention prĂ©sentant d’étroites affinitĂ©s avec l’exigence d’effectivitĂ© des remĂšdes internes, inscrite dans l’article 13 (voir en ce sens Scordino c. Italie (dĂ©c.), n36813/97, CEDH 2003-IV), dans la dĂ©cision Di Sante c. Italie prĂ©citĂ©e, la Cour, en considĂ©rant le recours en cassation au sens de la loi « Pinto Â» comme une voie de recours Ă  Ă©puiser, a implicitement reconnu le caractĂšre effectif du remĂšde « Pinto Â».

71.  D’ailleurs, dans l’arrĂȘt Delle Cave et Corrado c. Italie (prĂ©citĂ©, §§ 43-46) la Cour a dĂ©jĂ  estimĂ© que la simple insuffisance du montant de l’indemnisation accordĂ©e Ă  un requĂ©rant dans le cadre de la procĂ©dure « Pinto Â» ne constitue pas en soi un Ă©lĂ©ment suffisant pour remettre en cause l’effectivitĂ© du recours « Pinto Â».

72.  Au vu de ce qui prĂ©cĂšde, la Cour estime qu’il y a lieu de dĂ©clarer le volet du grief tirĂ© de l’article 13 et portant sur l’insuffisance de l’indemnisation « Pinto Â» irrecevable pour dĂ©faut manifeste de fondement au sens de l’article 35 § 3 de la Convention.

73.  Pour ce qui est du volet du grief tirĂ© du retard dans le paiement de l’indemnisation « Pinto Â», le Gouvernement soulĂšve l’exception que la Cour vient de rejeter aux paragraphes 41-46 ci-dessus.

74.  Le requĂ©rant n’a pas pris position.

75.  Ce grief n’étant pas manifestement mal fondĂ© au sens de l’article 35 Â§ 3 de la Convention et ne se heurtant Ă  aucun autre motif d’irrecevabilitĂ©, il y a donc lieu de le dĂ©clarer recevable.

B.  Sur le fond

76.  Selon le Gouvernement, un retard litigieux comme celui occasionnĂ© en l’espĂšce, de plus compensĂ© par l’octroi d’intĂ©rĂȘts moratoires, ne saurait remettre en cause le caractĂšre effectif du recours « Pinto Â». En outre, il serait paradoxal que l’Italie, s’étant efforcĂ©e d’introduire un remĂšde pour la violation du droit au « dĂ©lai raisonnable Â», puisse encourir un constat de violation de l’article 13, alors que de nombreux Etats parties Ă  la Convention ne disposent pas de voie de recours interne en la matiĂšre et n’ont pourtant pas Ă©tĂ© condamnĂ©s pour violation de cette disposition.

77.  Le requĂ©rant n’a pas pris position.

78.  La Cour a dĂ©jĂ  eu l’occasion de rappeler dans l’arrĂȘt Kudła c. Pologne ([GC], no 30210/96, § 154, CEDH 2000-XI) que, dans le respect des exigences de la Convention, les Etats contractants jouissent d’une certaine marge d’apprĂ©ciation quant Ă  la façon de garantir aux individus le recours exigĂ© par l’article 13 et de se conformer Ă  l’obligation que leur fait cette disposition de la Convention. Elle a Ă©galement insistĂ© sur le principe de subsidiaritĂ© afin que les justiciables ne soient plus systĂ©matiquement contraints de lui soumettre des requĂȘtes qui auraient pu ĂȘtre instruites d’abord et, selon elle, de maniĂšre plus appropriĂ©e, au sein des ordres juridiques internes. La Cour a aussi estimĂ© dans l’arrĂȘt Cocchiarella c. Italie (prĂ©citĂ©, § 80) que, lorsque les lĂ©gislateurs ou les juridictions nationales ont acceptĂ© de jouer leur vĂ©ritable rĂŽle en introduisant une voie de recours interne, la Cour doit en tirer certaines consĂ©quences. Lorsqu’un Etat a fait un pas significatif en introduisant un recours indemnitaire, la Cour se doit de lui laisser une plus grande marge d’apprĂ©ciation pour qu’il puisse organiser ce recours interne de façon cohĂ©rente avec son propre systĂšme juridique et ses traditions, en conformitĂ© avec le niveau de vie du pays (ibidem). Les exigences de l’article 13 de la Convention ne sont toutefois respectĂ©es que si le remĂšde prĂ©vu par le droit national afin de se plaindre d’une mĂ©connaissance de l’article 6 § 1 demeure un recours efficace, adĂ©quat et accessible permettant de sanctionner la durĂ©e excessive d’une procĂ©dure judiciaire (Paulino Tomas c. Portugal, prĂ©citĂ© ; Vidas c. Croatie, no 40383/04, § 36, 3 juillet 2008).

79.  Ainsi qu’il a Ă©tĂ© relevĂ© au paragraphe 31 ci-dessus, l’indemnitĂ© « Pinto Â» allouĂ©e au requĂ©rant lui a Ă©tĂ© effectivement versĂ©e le 6 avril 2004, soit douze mois aprĂšs le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision de la cour d’appel. Ce paiement a donc largement dĂ©passĂ© les six mois Ă  compter du moment oĂč la dĂ©cision d’indemnisation devint exĂ©cutoire (Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 89).

80.  De surcroĂźt, la Cour souligne que, dans huit des neuf arrĂȘts de la Grande Chambre du 29 mars 2006 (Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 100 ; Musci c. Italie, no 64699/01, § 101, CEDH 2006-... ; Riccardi Pizzati c. Italie, no 62361/00, § 99 ; Giuseppe Mostacciuolo c. Italie (no 1), no 64705/01, § 99 ; Giuseppe Mostacciuolo c. Italie (no 2), no 65102/01, § 98 ; Apicella c. Italie, no 64890/01, § 98 ; Ernestina Zullo c. Italie, no 64897/01, § 102 ; Giuseppina et Orestina Procaccini c. Italie, no 65075/01, § 98), elle a relevĂ© que les sommes octroyĂ©es par les cours d’appel « Pinto Â» avaient Ă©tĂ© versĂ©es tardivement aux requĂ©rants, voire n’avaient pas Ă©tĂ© versĂ©es du tout.

81.  En outre, la Cour a rendu, depuis le 29 mars 2006, plus de 50 arrĂȘts contre l’Italie constatant la violation de l’article 6 § 1, du fait de la durĂ©e excessive des procĂ©dures judiciaires nationales. Dans tous ces arrĂȘts, elle a relevĂ© des retards dans le paiement des indemnisations « Pinto Â» qu’elle a souvent considĂ©rĂ©s comme des circonstances aggravantes de la violation du droit au dĂ©lai raisonnable (voir Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, § 120) Ă  prendre en compte dans la dĂ©termination de la somme Ă  octroyer aux requĂ©rants aux termes de l’article 41 de la Convention.

82.  Enfin, la Cour observe qu’à partir de septembre 2007, un nombre trĂšs important de nouvelles requĂȘtes dirigĂ©es contre l’Italie portent exclusivement sur les retards dans le paiement des indemnisations « Pinto Â». Environ 500 de ces requĂȘtes ont Ă©tĂ© rĂ©cemment communiquĂ©es au Gouvernement, ce qui rĂ©vĂšle l’existence d’un problĂšme dans le fonctionnement du recours « Pinto Â».

83.  Cependant, la Cour relĂšve qu’entre 2005 et 2007, les cours d’appel compĂ©tentes au sens de la loi « Pinto Â» ont rendu environ 16 000 dĂ©cisions, de sorte que le nombre de requĂȘtes introduites devant la Cour et concernant le retard dans le paiement des indemnisations « Pinto Â», bien qu’important, ne dĂ©cĂšle pas, pour l’instant, une inefficacitĂ© structurelle du remĂšde « Pinto Â».

84.  Au vu de ce qui prĂ©cĂšde, la Cour estime que le retard de douze mois dans le paiement de l’indemnisation « Pinto Â» constatĂ© en l’espĂšce, bien qu’entraĂźnant la violation des articles 6 § 1 de la Convention et 1 du Protocole no 1, n’est pas suffisamment important pour remettre en cause l’effectivitĂ© du remĂšde « Pinto Â».

85.  Cependant, la Cour estime opportun d’attirer l’attention du Gouvernement sur le problĂšme des retards dans le paiement des indemnisations « Pinto Â» et sur la nĂ©cessitĂ© que les autoritĂ©s nationales se dotent de tous les moyens adĂ©quats et suffisants pour assurer le respect des obligations qui leur incombent en vertu de l’adhĂ©sion Ă  la Convention et pour Ă©viter que le rĂŽle de la Cour soit engorgĂ© d’un grand nombre d’affaires rĂ©pĂ©titives portant sur les indemnitĂ©s accordĂ©es par des cours d’appel dans le cadre de procĂ©dures « Pinto Â» et/ou le retard dans le paiement des sommes en question, ce qui constitue une menace pour l’effectivitĂ© Ă  l’avenir du dispositif mis en place par la Convention (voir Cocchiarella c. Italie, prĂ©citĂ©, §§ 69-107 et §§ 125-130 ; mutatis mutandis, Scordino c. Italie (no 3) (satisfaction Ă©quitable), no 43662/98, §§ 14-15, CEDH 2007-... ; Driza c. Albanie, no 33771/02, § 122, CEDH 2007-... (extraits) ; Katz c  Roumanie, no 29739/03, § 9, 20 janvier 2009).

IV.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

86.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour dĂ©clare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les consĂ©quences de cette violation, la Cour accorde Ă  la partie lĂ©sĂ©e, s’il y a lieu, une satisfaction Ă©quitable. Â»

A.  Dommage

87.  Le requĂ©rant rĂ©clame 15 000 EUR au titre du prĂ©judice moral qu’il aurait subi.

88.  Le Gouvernement conteste cette prĂ©tention.

89.  La Cour estime qu’elle aurait pu accorder au requĂ©rant, en l’absence de voies de recours internes et compte tenu du fait que l’affaire concerne la matiĂšre du droit du travail sans pourtant en toucher des aspects importants ou dĂ©licats tels, par exemple, un licenciement abusif, la somme de 9 000 EUR. Le fait que la cour d’appel de Rome, Ă  l’issue d’une longue procĂ©dure, ait octroyĂ© au requĂ©rant environ 7,8 % de cette somme aboutit Ă  un rĂ©sultat manifestement dĂ©raisonnable, d’autant plus que le paiement est intervenu douze mois aprĂšs le dĂ©pĂŽt au greffe de la dĂ©cision de la cour d’appel de Rome. Par consĂ©quent, eu Ă©gard aux caractĂ©ristiques de la voie de recours « Pinto Â» et au fait qu’elle est tout de mĂȘme parvenue Ă  un constat de violation ainsi qu’à la constatation des violations additionnelles de l’article 6 § 1, sous l’angle du droit Ă  l’exĂ©cution des dĂ©cisions judiciaires, et de l’article 1 du Protocole no 1, la Cour, compte tenu de la solution adoptĂ©e dans l’arrĂȘt Cocchiarella c. Italie (prĂ©citĂ©, §§ 139-142 et 146) et statuant en Ă©quitĂ©, alloue au requĂ©rant 3 950 EUR.

B.  Frais et dĂ©pens

90.  Justificatifs Ă  l’appui, le requĂ©rant demande 15 111 EUR pour les frais et dĂ©pens engagĂ©s devant la Cour.

91.  Le Gouvernement conteste cette prĂ©tention.

92.  Selon la jurisprudence de la Cour, l’allocation des frais et dĂ©pens au titre de l’article 41 prĂ©suppose que se trouvent Ă©tablis leur rĂ©alitĂ©, leur nĂ©cessitĂ© et le caractĂšre raisonnable de leur taux (Can et autres c. Turquie, no 29189/02, § 22, 24 janvier 2008). La Cour observe que dans le cadre de la prĂ©paration de la prĂ©sente requĂȘte, certains frais ont Ă©tĂ© encourus. Elle relĂšve aussi que la cour d’appel de Rome a accordĂ© Ă  l’avocat du requĂ©rant 1 000 EUR pour frais et dĂ©pens, y compris ceux relatifs Ă  la procĂ©dure devant la Cour. DĂšs lors, statuant en Ă©quitĂ©, la Cour estime raisonnable d’octroyer 1 000 EUR Ă  ce titre.

C.  IntĂ©rĂȘts moratoires

93.  La Cour juge appropriĂ© de calquer le taux des intĂ©rĂȘts moratoires sur le taux d’intĂ©rĂȘt de la facilitĂ© de prĂȘt marginal de la Banque centrale europĂ©enne majorĂ© de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1.  DĂ©clare la requĂȘte recevable quant aux griefs tirĂ©s de la durĂ©e excessive de la procĂ©dure (article 6 § 1 de la Convention) et du retard mis par les autoritĂ©s nationales Ă  se conformer Ă  la dĂ©cision de la cour d’appel de Rome (articles 6 § 1, 13 et 1 du Protocole no 1) et irrecevable pour le surplus ;

2.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention, en raison de la durĂ©e excessive de la procĂ©dure ;

3.  Dit qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi que de l’article 1 du Protocole no 1, en raison du retard mis par les autoritĂ©s nationales Ă  se conformer Ă  la dĂ©cision de la cour d’appel de Rome ;

4.  Dit qu’il n’y a pas eu violation de l’article 13 de la Convention, en raison du retard mis par les autoritĂ©s nationales Ă  se conformer Ă  la dĂ©cision de la cour d’appel de Rome ;

5.  Dit

a)  que l’Etat dĂ©fendeur doit verser au requĂ©rant, dans les trois mois Ă  compter du jour oĂč l’arrĂȘt sera devenu dĂ©finitif conformĂ©ment Ă  l’article 44 Â§ 2 de la Convention, les sommes suivantes :

(i)  3 950 EUR (trois mille neuf cent cinquante euros), plus tout montant pouvant ĂȘtre dĂ» Ă  titre d’impĂŽt, pour dommage moral,

(ii)  1 000 EUR (mille euros), plus tout montant pouvant ĂȘtre dĂ» par le requĂ©rant Ă  titre d’impĂŽt, pour frais et dĂ©pens ;

b)  qu’à compter de l’expiration dudit dĂ©lai et jusqu’au versement, ces montants seront Ă  majorer d’un intĂ©rĂȘt simple Ă  un taux Ă©gal Ă  celui de la facilitĂ© de prĂȘt marginal de la Banque centrale europĂ©enne applicable pendant cette pĂ©riode, augmentĂ© de trois points de pourcentage ;

6.  Rejette la demande de satisfaction Ă©quitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiquĂ© par Ă©crit le 31 mars 2009, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du rĂšglement.

Françoise Elens-Passos Françoise Tulkens 
 GreffiĂšre adjointe de section PrĂ©sidente