Corte europea dei diritti dell’uomo
(Sezione IV), 27 novembre 2007
(requête n. 77782/01)
AFFAIRE LUCZAK c. POLOGNE
DÉFINITIF
02/06/2008
Cet arrêt est définitif. Il peut subir des retouches de
forme.
En l'affaire,
La
Cour européenne des droits de l'homme (quatrième section), siégeant en une
chambre composée de :
Nicolas Bratza,
président,
Josep Casadevall,
Giovanni Bonello,
Kristaq Traja,
Stanislav Pavlovschi,
Lech Garlicki,
Ljiljana Mijović, juges,
et de Lawrence Early, greffier de section,
Après
en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 novembre 2007,
Rend
l'arrêt que voici, adopté à cette date :
PROCÉDURE
1. A
l'origine de l'affaire se trouve une requête (no 77782/01) dirigée
contre la République de Pologne et dont un ressortissant français,
M. Richard Luczak (« le requérant »), a saisi la Cour le 8 août
2000 en vertu de l'article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).
2. Le requérant a été représenté par M.
Bubak, avocat à Brzeg. Le gouvernement polonais (« le Gouvernement »)
a été représenté par son agent, M. J. Wołąsiewicz, du ministère des
Affaires étrangères.
3. Le requérant alléguait avoir été
victime d'une violation de l'article 14 de la Convention combiné avec l'article
1 du Protocole no 1, en ce qu'il s'était vu refuser son admission au
régime de sécurité sociale des agriculteurs.
4. En
vertu des dispositions de l'article 29 § 3 de la Convention et de l'article 54A
§ 3 de son règlement, la Cour a décidé d'examiner conjointement la recevabilité
et le fond de la requête. Tant le requérant que le Gouvernement ont déposé des
observations écrites sur la recevabilité et le fond de l'affaire.
5. Le
gouvernement français a été invité à intervenir à la procédure (article 36 § 1
de la Convention). Par une lettre du 21 février 2006, il a informé le greffe
qu'il ne souhaitait pas exercer ce droit.
6. Le
27 mars 2007, la Cour a décidé de lever l'application de l'article 29 § 3 de la
Convention et d'examiner séparément la recevabilité et le fond de la requête.
Par une décision adoptée le même jour, elle a, par une décision adoptée à la majorité,
déclaré la requête recevable.
7. Le 4 avril 2007, la Cour a demandé
aux parties des observations complémentaires sur le fond de l'affaire. Celles-ci lui sont
parvenues le 6 juillet 2007.
EN FAIT
I. LES
CIRCONSTANCES DE L'ESPÈCE
8. Le
requérant, un ressortissant français d'origine polonaise, est né en 1950 et
résidait à Brzeg.
9. Après s'être installé en Pologne
vers 1984, il y fut employé pendant plusieurs années. A ce titre, il était
affilié au régime général de sécurité sociale, la législation applicable en la
matière n'excluant pas les ressortissants étrangers de ce régime.
10. Le 20 janvier 1997, le requérant et
sa femme, une ressortissante polonaise, achetèrent ensemble une exploitation
agricole, dont ils entrèrent en jouissance le 20 novembre 1997. A cette époque, le
requérant quitta son emploi et décida de vivre des revenus de l'exploitation
agricole.
11. Le
2 décembre 1997, il sollicita auprès de la caisse de sécurité sociale agricole
(Kasa Rolniczego Ubezpieczenia Społecznego) de Częstochowa son
affiliation au régime de sécurité sociale agricole.
12. Le
16 décembre 1997, sa demande fut refusée au motif qu'il n'était pas un
ressortissant polonais, condition nécessaire à son affiliation en vertu de la
loi du 20 décembre 1990 sur la sécurité sociale agricole (« la loi de
1990 » ; ustawa o ubezpieczeniu społecznym rolników). En
conséquence, il se trouva dépourvu de couverture sociale en cas de maladie,
d'accident du travail et d'invalidité. De plus, il ne pouvait pas cotiser pour
sa retraite.
13. Par
une décision rendue le même jour, la femme du requérant fut admise au régime
agricole.
14. Le
requérant contesta la décision rendue à son égard. Il souligna que, en tant
qu'agriculteur indépendant, il était exposé au risque d'accidents du
travail ; et que, depuis qu'il avait acquis l'exploitation agricole, il
avait quitté son emploi précédent et comptait sur l'exploitation pour assurer
sa subsistance. Il fit valoir également que lorsqu'il était employé, il était
couvert par le régime général de sécurité sociale bien qu'il fût de nationalité
étrangère, et que le refus de l'inscrire au régime agricole l'empêchait de
verser ses cotisations sociales, de sorte que les annuités correspondantes ne
seraient pas prises en compte au moment de la liquidation de sa pension de
retraite.
15. Le
requérant argua également qu'une clause de l'acte notarié par lequel il avait
acquis l'exploitation précisait qu'il était tenu de s'inscrire à ce régime. Il
indiqua qu'il vivait en Pologne depuis dix-huit ans et qu'il était titulaire
d'un titre de séjour permanent depuis quinze ans. Enfin, il souligna qu'il
était d'origine polonaise et qu'il était disposé à verser les cotisations
adéquates.
16. Le
30 mars 1998, le tribunal régional de Częstochowa rejeta le recours du
requérant, estimant que, n'ayant pas la nationalité polonaise, l'intéressé ne
pouvait pas être admis au régime de sécurité sociale agricole. Il estima par
ailleurs qu'en cas d'accident du travail grave, le requérant pourrait se voir
octroyer une indemnité forfaitaire versée en une fois, en vertu de l'article
10.1.2) de la loi de 1990. Enfin, le tribunal précisa qu'une loi qui devait
entrer en vigueur le 1er janvier 1999 permettrait au requérant, en
tant que ressortissant étranger résidant en Pologne de manière permanente,
d'avoir accès aux services de santé.
17. Le
requérant contesta cette décision. Il plaidait que le refus de l'admettre au
régime de sécurité sociale agricole au motif de sa nationalité était
discriminatoire et constitutif d'une violation du principe d'égalité. Il
invoquait la Constitution et le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (« le Pacte »).
18. Le
22 décembre 1998, la cour d'appel de Katowice débouta le requérant. Elle
estimait qu'il ne pouvait fonder sa demande d'admission au régime de sécurité
sociale agricole sur la Constitution, celle-ci prévoyant en son article 37 § 2
des limitations légales aux droits des étrangers. Elle observait par ailleurs
que le traité bilatéral conclu en 1948 entre la France et la Pologne en matière
de sécurité sociale n'était applicable qu'aux salariés. Elle rejeta également
le grief tiré du Pacte, aux motifs que même si cet instrument reconnaissait en
son article 9 le droit de toute personne à la sécurité sociale, ses
dispositions n'étaient pas d'effet direct, et que les Etats bénéficiaient d'une
marge d'appréciation quant à la manière de les mettre en œuvre en droit
interne.
19. Le
requérant se pourvut en cassation devant la Cour suprême. Le 8 février 2000,
celle-ci rejeta son pourvoi, reprenant pour l'essentiel les motifs de la cour
d'appel. La haute juridiction observa également que d'après l'article 67 de la
Constitution, le droit à la sécurité sociale n'était garanti qu'aux
ressortissants polonais.
20. En
1998, le requérant sollicita une dérogation auprès du président de la caisse de
sécurité sociale agricole afin d'être admis au régime agricole. Le 7 août 1998,
le président de la caisse lui opposa un refus et l'informa que la loi de 1990
excluait expressément l'admission de ressortissants étrangers au régime
agricole, cette règle s'appliquant aux agriculteurs eux-mêmes, à leurs
conjoints et à l'ensemble du foyer.
21. En 1998, le requérant fit appel au
médiateur. Le 16 septembre 1998, celui-ci écrivit au ministre de l'Agriculture une
lettre dans laquelle il indiqua que la discrimination fondée sur la nationalité
en matière d'accès des agriculteurs à la sécurité sociale risquait de poser
problème au regard des obligations énoncées dans le Pacte. Il priait le
ministre de préparer d'urgence une modification de la loi de 1990. Le 30
septembre 1998, le ministre informa le médiateur qu'étaient en cours
d'élaboration des modifications de la loi qui devaient entrer en vigueur le 1er
janvier 1999 et qui permettraient aux agriculteurs de nationalité étrangère
ayant le statut de résidents permanents en Pologne de s'affilier au régime
agricole. Le médiateur en informa le
requérant. Cependant, les modifications en question ne furent pas adoptées.
22. En
2002, eu égard à l'incertitude dans laquelle il se trouvait toujours quant à sa
couverture sociale, le requérant se rendit aux Pays-Bas, où il trouva un
travail. D'avril 2004 à avril 2006, il fut en congé de maladie.
Ultérieurement, il perçut une indemnité de maladie.
23. Le
2 avril 2004, la loi de 1990 fut modifiée dans le cadre de l'adhésion de la
Pologne à l'Union européenne (UE). Les
modifications prévoyaient notamment que les ressortissants des Etats membres de
l'UE et les ressortissants étrangers titulaires d'un permis de séjour pouvaient
s'affilier au régime agricole.
II. LE
DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL PERTINENT
A. La
Charte sociale européenne de 1961
24. La
Charte sociale européenne de 1961 (« la Charte sociale »), entrée en
vigueur pour la Pologne le 25 juillet 1997, énonce, en ses parties
pertinentes :
« Les gouvernements signataires, membres du
Conseil de l'Europe, (...)
Considérant que la
jouissance des droits sociaux doit être assurée sans discrimination fondée sur
la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion politique, l'ascendance
nationale ou l'origine sociale ; (...)
Sont convenus de ce qui suit : (...) »
Partie II
« Les Parties contractantes s'engagent à se
considérer comme liées, ainsi que prévu à la partie III, par les obligations
résultant des articles et des paragraphes ci-après (...) »
Article 12 –Droit
à la sécurité sociale
« En vue
d'assurer l'exercice effectif du droit à la sécurité sociale, les Parties
contractantes s'engagent :
1. à
établir ou à maintenir un régime de sécurité sociale ;
2. à
maintenir le régime de sécurité sociale à un niveau satisfaisant, au moins égal
à celui nécessaire pour la ratification de la Convention internationale du
travail (no 102) concernant la norme minimum de la sécurité
sociale ;
3. à s'efforcer de porter progressivement
le régime de sécurité sociale à un niveau plus haut ;
4. à prendre des mesures, par la
conclusion d'accords bilatéraux ou multilatéraux appropriés ou par d'autres
moyens, et sous réserve des conditions arrêtées dans ces accords, pour
assurer :
a. l'égalité de traitement entre les
nationaux de chacune des Parties contractantes et les ressortissants des autres
Parties en ce qui concerne les droits à la sécurité sociale, y compris la
conservation des avantages accordés par les législations de sécurité sociale,
quels que puissent être les déplacements que les personnes protégées pourraient
effectuer entre les territoires des Parties contractantes ;
b. l'octroi, le maintien et le
rétablissement des droits à la sécurité sociale par des moyens tels que la
totalisation des périodes d'assurance ou d'emploi accomplies conformément à la
législation de chacune des Parties contractantes. »
25. En
vertu de l'article 20 de la Charte sociale, la République de Pologne se
considère comme liée par plusieurs clauses normatives de la Charte, parmi
lesquelles l'article 12.
B. Les
dispositions constitutionnelles
26. L'article
37 de la Constitution énonce ceci :
« 1. Toute
personne qui se trouve sous la juridiction de la République de Pologne
bénéficie des libertés et des droits garantis par la Constitution.
2. Les exceptions à cette règle relatives aux
étrangers sont fixées par la loi. »
En
vertu de l'article 67 § 1 de la Constitution,
« Le citoyen
a droit à la protection sociale en cas d'incapacité de travail pour cause de
maladie ou d'invalidité ainsi que lorsqu'il a atteint l'âge de la retraite.
L'étendue et les formes de la protection sociale sont fixées par la loi. »
C. Le
régime de sécurité sociale agricole
27. Le
régime de sécurité sociale agricole est régi par la loi du 20 décembre
1990 sur la sécurité sociale agricole; (ustawa o ubezpieczeniu
społecznym rolników ; « la loi de 1990 » ). A
l'époque des faits, l'article 1.1. de cette loi, en sa partie pertinente,
prévoyait ceci :
« [Le régime
de] sécurité sociale agricole couvre les agriculteurs de nationalité polonaise
et les membres polonais de leur foyer qui travaillent avec eux. »
28. La
loi du 14 décembre 1982 sur la sécurité sociale des agriculteurs et des membres
de leur famille, qui précédait la loi de 1990, ne posait pas de condition de
nationalité.
29. Le
régime prévu par la loi de 1990 comprend les avantages suivants : 1)
indemnités de maladie et de maternité ; 2) indemnités en cas d'accident du
travail ou de maladie professionnelle ; 3) pension de vieillesse et
d'invalidité. Il est géré par la caisse de sécurité sociale agricole (Kasa
Rolniczego Ubezpieczenia Społecznego), un organisme public spécialisé
financé par le budget de l'Etat. Selon la taille de leur exploitation, les
agriculteurs sont soit tenus par la loi de s'affilier à ce régime soit libres
d'en faire la demande. Chaque agriculteur
admis à s'affilier au régime doit y verser des cotisations dont le montant ne
dépend ni de la taille de son exploitation ni du niveau de revenus qu'il en
tire. La condition requise pour être admis à relever de ce régime est d'être
propriétaire d'une exploitation agricole, que celle-ci constitue ou non la
principale source de revenus de l'affilié.
30. Le
2 avril 2004, la loi de 1990 fut modifiée. Entrées en vigueur le 2 mai 2004,
les nouvelles dispositions ont assoupli les conditions d'accès au régime de
sécurité sociale agricole en permettant notamment aux ressortissants des Etats
membres de l'UE et aux ressortissants étrangers résidant en Pologne moyennant
un visa ou un titre de séjour de s'y affilier.
D. Le
régime général de sécurité sociale des salariés
31. A
l'époque des faits, les règles régissant le fonctionnement du régime général de
sécurité sociale des salariés étaient fixées par la loi du 25 novembre
1986 sur l'organisation et le financement de la sécurité sociale (ustawa o
organizacji i finansowaniu ubezpieczeń społecznych). Cette loi ne
prévoyait pas de restrictions à l'admission au régime général en fonction de la
nationalité de l'employé, hormis les cas des non-nationaux qui ne résidaient
pas de manière permanente dans le pays et qui étaient employés par des missions
diplomatiques étrangères. Le 1er janvier 1999, elle fut abrogée
et remplacée par la loi du 13 octobre 1998 sur le système de sécurité
sociale (ustawa o systemie ubezpieczeń społecznych). Les règles d'admission au régime général de sécurité
sociale des salariés de nationalité étrangère restèrent toutefois inchangées.
E. L'accord
bilatéral entre la Pologne et la France
32. En
1948, la Pologne et la France ont conclu une Convention générale sur la
sécurité sociale (Convention générale entre la France et la Pologne sur la
sécurité sociale - Konwencja Generalna pomiędzy Polską a
Francją o zabezpieczeniu społecznym). Cependant, les dispositions de cette Convention n'étaient applicables
qu'aux travailleurs salariés ou assimilés, et non aux travailleurs
indépendants.
EN DROIT
I. SUR
LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L'ARTICLE 14 DE LA CONVENTION COMBINÉ AVEC L'ARTICLE 1
DU PROTOCOLE No 1 À LA CONVENTION
33. Le
requérant, invoquant l'article 14 de la Convention combiné avec l'article 1 du
Protocole no 1, se plaint de s'être vu refuser l'admission au régime
de sécurité sociale agricole en raison de sa nationalité et de n'avoir ainsi
pas pu en percevoir d'indemnités. L'article 1 du Protocole no 1 à la
Convention est ainsi libellé :
« Toute personne physique ou morale a droit au
respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause
d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes
généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte
au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent
nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général
ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des
amendes. »
L'article 14 énonce ceci :
« La jouissance des droits et libertés reconnus
dans la (...) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée
notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les
opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale,
l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute
autre situation. »
34. Dans sa décision du 27 mars 2007
sur la recevabilité, la Cour a conclu que les intérêts du requérant
relativement au régime agricole et le droit associé de percevoir des
prestations sociales relevaient de l'article 1 du Protocole no 1, et
que l'article 14 de la Convention était donc applicable. Elle doit à
présent examiner s'il y a eu violation de l'article 14 combiné avec
l'article 1 du Protocole no 1.
A. Arguments des parties
1. Le requérant
35. Le requérant soutient qu'en le
privant de la possibilité de s'affilier au régime agricole au seul motif qu'il
était de nationalité étrangère et alors qu'il satisfaisait aux autres
conditions légales, les autorités ont enfreint l'interdiction de la
discrimination ; que cette situation a eu pour effet de le priver de
couverture sociale face aux risques de maladie, d'accident du travail ou
d'invalidité et de l'empêcher de continuer à verser ses cotisations de retraite ;
et que, s'étant acquitté de ces cotisations pendant de nombreuses années
lorsqu'il était affilié au régime général de sécurité sociale, il pouvait
raisonnablement s'attendre à être admis au régime agricole. Le médiateur serait
de son avis.
36. La différence de traitement subie
par le requérant n'aurait pas de justification objective et raisonnable. L'accès des
ressortissants étrangers à la couverture sociale du régime agricole ne pourrait
poser qu'un problème marginal, car le nombre de cas concernés serait si faible
que cela ne pourrait nullement nuire à l'économie du pays ou à son système de
sécurité sociale.
37. En
outre, la législation pertinente aurait aboli le critère de nationalité en 2004
pour certains ressortissants étrangers, et pour autant, le régime de sécurité
sociale agricole ne se serait pas effondré et la situation des agriculteurs,
que le Gouvernement qualifierait de « groupe socialement
vulnérable », n'aurait pas énormément changé. De surcroît, au moment de
l'introduction au Parlement du projet de loi correspondant, le Gouvernement
aurait déclaré que les modifications qui allaient être ainsi apportées à la loi
de 1990 n'entraîneraient pas de dépenses budgétaires supplémentaires.1
38. Le
régime agricole pourrait également donner lieu à des abus, dans la mesure où
des personnes qui devraient normalement verser des cotisations plus élevées au
régime général de sécurité sociale pourraient s'affilier au régime agricole,
qui apporterait une couverture sociale complète moyennant des cotisations
moindres, et les autorités auraient ignoré ce risque.
39. Le requérant se serait trouvé dans
l'incapacité de poursuivre son activité d'agriculteur et d'en tirer des
revenus, alors qu'il aurait investi dans son exploitation pour y créer un
vignoble. Son incertitude prolongée qui aurait plané sur sa couverture sociale
l'aurait contraint à renoncer à ses projets et à quitter la Pologne à l'âge de
cinquante-deux ans après y avoir vécu dix-huit ans.
2. Le
Gouvernement
40. Le
Gouvernement dément que le droit interne ait donné lieu à une quelconque
discrimination contraire à l'article 14. La législation relative à l'admission au régime agricole fixerait des
critères objectifs appliqués à tous sans exceptions arbitraires. La distinction
entre nationaux et non-nationaux aurait été introduite dans l'intérêt général
et respecterait le principe de proportionnalité.
41. Même
si avant 2004, le requérant ne pouvait s'affilier au régime agricole, il aurait
eu droit à certaines prestations sociales, à savoir une indemnité forfaitaire
qui aurait pu être versée en une fois soit à lui-même en cas d'accident du
travail grave (article 10.1.2 de la loi de 1990), soit à sa famille en cas
d'accident du travail mortel (article 10.1.4 de la loi de 1990). Le requérant
aurait également pu prétendre à une pension de réversion (renta rodzinna)
au décès de sa femme (article 29 de la loi de 1990). En outre, en tant que
ressortissant étranger ayant le statut de résident permanent, il aurait eu
droit à des allocations familiales (zasiłek rodzinny) et à une
allocation de soins (zasiłek pielęgnacyjny), sous réserve de
satisfaire à certaines conditions légales ; et il aurait eu accès aux
services d'assurance santé dès le 1er janvier 1999.
42. Compte
tenu de la vulnérabilité sociale des agriculteurs et de la tradition d'aide
publique aux agriculteurs polonais, il n'existerait pas de motif convaincant de
croire que la Convention faisait obligation à l'Etat d'aider les ressortissants
étrangers en les admettant au régime agricole avant le 1er mai 2004.
La limite apportée au droit d'accès du requérant à ce régime n'aurait été que
temporaire puisqu'elle aurait été levée à cette date, et pourtant, l'intéressé
n'aurait pas demandé alors à y être affilié, mais se serait contenté de
maintenir sa requête devant la Cour. De ce fait, le Gouvernement a des doutes
quant à la qualité de victime de l'intéressé.
43. La
distinction en cause aurait poursuivi le but légitime de protéger un groupe
vulnérable en permettant à ses membres d'accéder au régime de sécurité sociale
et de bénéficier de ses avantages moyennant une contribution modeste. La
création du régime agricole serait le fruit de la politique publique d'appui à
un secteur de l'économie sous-développé et peu performant. Dans ce contexte, la
condition de nationalité polonaise imposée avant 2004 aurait joué un rôle crucial
dans l'apport d'une aide d'Etat à ceux qui en avaient le plus besoin, à savoir
les agriculteurs polonais, qui se seraient toujours trouvés désavantagés
financièrement par rapport à d'autres secteurs de la société. Le régime
agricole serait financé à 95% par le budget de l'Etat, ce qui représenterait
une charge considérable pour les contribuables et pour l'économie du
pays ; et les cotisations versées à ce régime par les agriculteurs
seraient très inférieures à celles que versent les affiliés au régime général
de sécurité sociale. Ainsi, il serait injustifié de soutenir qu'un régime de
sécurité sociale aussi coûteux aurait dû être ouvert à quiconque souhaitait en
bénéficier.
44. L'Etat polonais ne pourrait voir sa
responsabilité engagée pour avoir tenté de concilier ses impératifs budgétaires
avec les difficultés sociales et financières du secteur agricole. Actuellement,
environ 16% de la population du pays serait classée dans la catégorie des
employés agricoles tandis que la contribution du secteur au PIB ne dépasserait
pas les 3% : il serait donc évident que le budget et les contribuables
polonais participent massivement au financement du régime agricole. De plus, il
y aurait de bonnes raisons de croire que l'ouverture de ce régime aux
ressortissants étrangers irait à l'encontre de l'objectif à long terme
consistant à en réduire les dépenses et favoriserait de manière injustifiée les
ressortissants étrangers.
45. Compte
tenu de ce qui précède, la distinction en cause n'aurait pas dépassé la marge
d'appréciation dont jouissent les autorités en matière de politique sociale. Il
y aurait un rapport raisonnable de proportionnalité entre les conditions
d'admission au régime agricole et l'objectif d'aide publique à un secteur de la
société socialement et économiquement vulnérable. De plus, la différence de traitement aurait été temporaire et aurait
reposé sur d'importantes considérations de politique sociale et budgétaire. Il n'y aurait donc
pas eu violation de l'article 14 combiné avec l'article 1 du Protocole no
1.
B. Appréciation
de la Cour
1. Principes
généraux
46. Le
requérant se plaint d'une différence de traitement fondée sur la nationalité,
qui est l'un des motifs de discrimination prohibés par l'article 14, qui en
dresse une liste non exhaustive.
47. Aux fins de l'article 14, une
différence de traitement entre des personnes placées dans des situations
analogues ou comparables est discriminatoire si elle ne repose pas sur une
justification objective et raisonnable, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un
but légitime ou s'il n'y a pas un rapport raisonnable de proportionnalité entre
les moyens employés et le but visé. Les Etats contractants jouissent d'une
certaine marge d'appréciation pour déterminer si et dans quelle mesure des
différences entre des situations à d'autres égards analogues justifient des
distinctions de traitement (Van Raalte c. Pays-Bas, 21 février
1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-I, § 39 ; Larkos c.
Chypre [GC], no 29515/95, § 29, CEDH 1999-I ; et Stec
et autres c. Royaume-Uni [GC], no 65731/01, § 51, CEDH
2006-(VI)).
48. L'étendue de la marge
d'appréciation varie selon les circonstances, les domaines et le contexte (Petrovic
c. Autriche, 27 mars 1998, Recueil 1998-II, § 38). En règle
générale, seules des considérations très fortes peuvent amener la Cour à
estimer compatible avec la Convention une différence de traitement
exclusivement fondée sur la nationalité (Gaygusuz c. Autriche,
16 septembre 1996, Recueil 1996-IV, p. 1142, § 42, et Koua
Poirrez c. France, no 40892/98, § 46, CEDH 2003-X).
Toutefois, la Convention laisse d'ordinaire aux Etats une large marge
d'appréciation dans le domaine des mesures générales de stratégie économique ou
sociale (voir, par exemple, James et autres c. Royaume-Uni, 21 février
1986, série A [no 98, § 46, et National & Provincial Building
Society et autres c. Royaume-Uni, 23 octobre 1997, Recueil 1997-VII,
§ 80). De par leur connaissance directe de leur société et de ses besoins, les
autorités nationales se trouvent en principe mieux placées que le juge
international pour déterminer ce qui est d'utilité publique en matière
économique et sociale, et la Cour respecte en principe les choix du législateur
sauf si son jugement se révèle « manifestement dépourvu de base
raisonnable » (ibidem).
2. Application de ces principes au cas
d'espèce
49. La Cour note que la loi de 1990
établissait une différence de traitement en matière d'accès au régime agricole,
l'accès étant subordonné à une condition de nationalité ; et elle
considère que le requérant pouvait prétendre se trouver dans une situation
analogue à celle d'autres personnes, ressortissantes polonaises, sollicitant
leur affiliation à ce régime. A cet égard, la Cour juge important le fait que
l'intéressé résidait de manière permanente en Pologne, qu'il avait été
précédemment affilié au régime général de sécurité sociale, et qu'il
participait, en tant que contribuable, au financement du régime agricole.
50. La Cour prend note de l'argument du
Gouvernement selon lequel même avant le 1er mai 2004 le
requérant avait droit à certaines prestations sociales (versement unique d'une
indemnité forfaitaire en cas d'accident du travail grave, pension de réversion,
allocations familiales et allocation de soins). Elle observe toutefois que les
juridictions internes ont jugé qu'en vertu de la législation relative au régime
de sécurité sociale agricole, il ne pouvait prétendre qu'à l'une de ces
prestations (paragraphe 16 ci-dessus). La Cour n'estime pas nécessaire de
déterminer si le requérant avait réellement droit à toutes les prestations
mentionnées par le Gouvernement puisque, de toute manière, il ne fait pas de
doute qu'il était privé des éléments essentiels de la couverture sociale, à
savoir les prestations versées en cas de maladie (zasiłek chorobowy)
ou d'invalidité (renta inwalidzka). En outre, il s'est trouvé dans
l'impossibilité de continuer à cotiser pour sa pension de retraite.
51. Le Gouvernement défendeur a tenté
de justifier la différence de traitement entre les ressortissants polonais et
les ressortissants étrangers en s'appuyant sur ses politiques à l'égard du
secteur agricole, secteur qu'il estimait sous-développé et économiquement peu
performant. Ainsi, le but de la création du régime agricole et de l'application
à ce régime de règles particulières aurait été de protéger les agriculteurs
polonais, qui seraient un groupe vulnérable ; et ce régime serait financé
pour l'essentiel par le budget de l'Etat, ce qui refléterait la politique
d'aide financière publique aux agriculteurs polonais.
52. La Cour rappelle que seules des
considérations très fortes peuvent justifier une différence de traitement
fondée, comme en l'espèce, exclusivement sur la nationalité. On peut considérer
que la mise en place d'un régime de sécurité sociale particulier aux agriculteurs,
essentiellement financé par les deniers publics et offrant à ceux qui y sont
admis une couverture plus avantageuse que celle du régime général de sécurité
sociale, s'inscrit dans une stratégie socio-économique relevant de la marge
d'appréciation des Etats. Néanmoins, la législation régissant l'accès à un tel
régime doit être compatible avec l'article 14 de la Convention. S'il est démontré qu'existent des motifs objectifs et
raisonnables d'en exclure un individu, alors le principe de proportionnalité
entre en jeu. Cela signifie notamment que même lorsque des considérations fortes ont été
invoquées pour justifier l'exclusion d'un tel régime, cette exclusion ne doit
pas laisser l'intéressé dans une situation où, au péril de sa subsistance, il
se trouverait privé de toute couverture sociale, qu'elle soit assurée par un
régime général ou par un régime particulier : il ne serait pas compatible
avec les tendances européennes actuelles en matière de droit de la sécurité
sociale de laisser un salarié ou un travailleur indépendant démuni de toute
couverture sociale.
53. Dans
Stec et autres c. Royaume-Uni (précité), La Cour a eu à examiner une
allégation relative à l'inégalité découlant du fait que le droit à une
prestation sociale (l'allocation pour diminution de la rémunération) était lié
à l'âge auquel l'intéressé pouvait toucher sa pension de retraite légale. Dans
cette affaire, la Cour, statuant en Grande Chambre, a conclu que la politique
adoptée par le législateur, qui avait repoussé à 2020 l'harmonisation entre les
hommes et les femmes de l'âge du départ à la retraite, relevait de la marge
d'appréciation de l'Etat et que, en conséquence, il n'y avait pas violation de
l'article 14 combiné avec l'article 1 du Protocole no 1.
54. A
la différence de Stec et autres, qui portait sur une différence de
traitement fondée sur le sexe, la présente affaire concerne une discrimination
fondée sur la nationalité. Dans le cas présent, la Cour considère que plusieurs
arguments lui permettent de parvenir à la conclusion inverse à celle qu'elle a
retenue dans Stec et autres.
55. Premièrement,
en l'espèce, le requérant s'est vu refuser l'admission au régime agricole au
seul motif de sa nationalité, alors qu'en pratique il se trouvait, de tous
points de vue, dans une situation analogue à celle des ressortissants polonais
qui, après avoir été affiliés au régime général de sécurité sociale,
sollicitaient leur affiliation au régime agricole. La Cour souligne ici que,
par les taxes qu'il payait, le requérant, lorsqu'il était salarié, contribuait
au régime agricole au même titre que tout ressortissant polonais.
56. Deuxièmement,
le ministre de l'Agriculture a reconnu le problème de discrimination
sous-jacent à la présente affaire mais n'y a pas remédié pour janvier 1999
comme il l'avait annoncé. A cet égard, la Cour observe que la loi de 1982, qui
précédait celle de 1990, ne posait pas de condition de nationalité pour l'accès
des agriculteurs à une couverture sociale.
57. Troisièmement,
pour le Gouvernement, la différence de traitement était justifiée par les
politiques sociales et économiques menées avant 2004, année où la Pologne a dû
modifier la législation pertinente à la suite de son adhésion à l'Union
européenne. Or il n'a pas expliqué pourquoi les
objectifs de politique publique à l'égard du régime agricole avaient soudain
perdu leur pertinence après 2004.
58. Quatrièmement, contrairement à ce
qu'elle a constaté dans l'affaire Stec et autres, la Cour ne juge pas
établi que le maintien de la distinction litigieuse en l'espèce ait été
justifié par le fait que sa suppression aurait eu pour l'économie du pays des
implications d'une portée et d'une gravité considérables. A cet égard, elle
observe que selon les estimations du Gouvernement lui-même, les modifications
de la loi de 1990 permettant l'admission au régime agricole, notamment, des
ressortissants des Etats membres de l'UE ne devaient pas entraîner des dépenses
budgétaires supplémentaires (paragraphe 37 ci-dessus).
59. Eu égard à ce qui précède, tout en
admettant qu'une mesure ayant pour effet que soient traitées différemment des
personnes se trouvant dans une situation analogue à celle d'autres personnes
peut être justifiée par des motifs d'intérêt public, la Cour considère qu'en
l'espèce, le Gouvernement n'a pas expliqué de manière convaincante en quoi il
relevait de l'intérêt général de refuser l'admission du requérant au régime
agricole pendant la période en question (voir, mutatis mutandis, Larkos,
précité, § 31). En conclusion, elle conclut que, même si compte est tenu de
la marge d'appréciation des Etats dans le domaine de la sécurité sociale, le
Gouvernement n'a pas présenté de justification objective et raisonnable de la
distinction en cause qui puisse satisfaire aux exigences de l'article 14
de la Convention.
60. Partant,
il y a eu violation de l'article 14 de la Convention combiné avec l'article 1
du Protocole no 1.
II. SUR
L'APPLICATION DE L'ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
61. Aux
termes de l'article 41 de la Convention,
« Si la Cour
déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le
droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer
qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la
partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable. »
A. Dommage
62. Le
requérant demande un montant total de 71 100 euros (EUR) pour l'ensemble
des dommages qu'il estime avoir subis, soit 50 000 EUR pour le préjudice
financier qui aurait découlé, de 1997 à 2002, de l'impossibilité de travailler
sur son exploitation agricole et d'en tirer des revenus, de l'absence de
couverture sociale et de la détérioration de sa santé ; 1 000 EUR
pour ses frais médicaux ; 1 000 EUR pour l'entretien de sa
maison ; et 19 100 EUR pour la perte de ses futures indemnités de
retraite, dans la mesure où il se serait trouvé pendant cinq ans dans
l'impossibilité de cotiser à cette fin.
63. Le
Gouvernement soutient qu'il n'existe pas de lien de causalité entre la
violation alléguée et le dommage matériel avancé. Pour ce qui est du dommage
moral, il souligne que le requérant n'a présenté aucun élément à l'appui de sa
demande et, de toute façon, il estime exorbitante la somme demandée. Il prie la
Cour, dans l'hypothèse où elle conclurait à une violation, de dire que le
constat de violation constitue en lui-même une satisfaction équitable
suffisante.
64. La
Cour n'aperçoit aucun lien de causalité entre la violation constatée et le
dommage matériel qu'aurait constitué le manque à gagner allégué pour la période
allant de 1997 à 2002. Elle observe toutefois que cette violation a privé le
requérant de la possibilité de cotiser en vue de sa retraite. Sans vouloir
spéculer sur le montant de la pension de retraite à laquelle il aurait eu droit
et la date à laquelle il aurait pu y prétendre, la Cour doit néanmoins tenir
compte du fait qu'il a subi un tort moral et matériel certain (Koua Poirrez,
précité, § 70). Statuant en équité, comme le veut l'article 41 de la
Convention, elle lui accorde 5 000 EUR, tous chefs de préjudice confondus.
B. Frais et dépens
65. Le requérant demande également
7 200 EUR plus la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour les frais et
dépens engagés devant les juridictions internes et devant la Cour. Il a présenté une
copie du contrat conclu avec son avocat.
66. Le
Gouvernement estime que cette somme est exorbitante et que les calculs
correspondants sont spéculatifs. Le requérant n'aurait pas produit de factures
à l'appui de sa demande, car la copie du contrat conclu entre le requérant et
son avocat et la facture émise par le traducteur seraient des documents privés.
Enfin, toute somme octroyée devrait être limitée
aux frais et dépens réellement et nécessairement exposés et d'un montant
raisonnable.
67. Selon la jurisprudence de la Cour,
un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans
la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère
raisonnable de leur taux. En l'espèce, compte tenu des informations dont elle
dispose et des critères ci-dessus énoncés, la Cour juge raisonnable d'octroyer
la somme de 5 000 EUR pour l'ensemble des frais et dépens, plus toute
somme pouvant être due au titre de la TVA.
C. Intérêts moratoires
68. La Cour juge approprié de calquer
le taux des intérêts moratoires sur le taux d'intérêt de la facilité de prêt
marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de
pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA
COUR, À L'UNANIMITÉ,
1. Dit qu'il y a eu violation de
l'article 14 de la Convention combiné avec l'article 1 du Protocole no
1 ;
2. Dit
a) que l'Etat défendeur doit verser au
requérant, dans les trois mois à compter du jour où l'arrêt sera devenu
définitif conformément à l'article 44 § 2 de la Convention, les
sommes suivantes, à convertir dans la monnaie nationale de l'Etat défendeur au
taux applicable à la date du règlement :
i) 5 000 EUR (cinq mille euros) pour
dommage matériel et moral ;
ii) 5 000 EUR (cinq mille euros) pour frais
et dépens ;
iii) tout montant pouvant être dû à titre
d'impôt sur les sommes ci-dessus ;
b) qu'à compter de l'expiration dudit délai et
jusqu'au versement, ces montants seront à majorer d'un intérêt simple à un taux
égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne
applicable pendant cette période, augmenté de trois points de
pourcentage ;
3. Rejette
la demande de satisfaction équitable pour le surplus.
Fait en anglais, puis
communiqué par écrit le 27 novembre 2007, en application de l'article 77
§§ 2 et 3 du règlement.
Lawrence Early Nicolas
Bratza Greffier Président
1 Projet de loi portant modification de la loi de 1990
et de certaines autres lois, présenté au Sejm le 26 mars 2003 (n° 1489).