Corte europea dei diritti dellâuomo
(Prima Sezione)
22 giugno 2017
AFFAIRE BARTESAGHI GALLO ET
AUTRES c. ITALIE
(RequĂȘte nn.
12131/13 et
43390/13)
Cet arrĂȘt deviendra dĂ©finitif dans
les conditions dĂ©finies Ă lâarticle 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des
retouches de forme.
En lâaffaire Bartesaghi
Gallo et autres c. Italie,
La Cour europĂ©enne des droits de lâhomme (premiĂšre
section), siégeant en une chambre composée de :
         Linos-Alexandre Sicilianos, président,
         Kristina Pardalos,
         Guido Raimondi,
         Ledi
Bianku,
         Aleƥ
Pejchal,
         Armen
Harutyunyan,
         Pauliine
Koskelo, juges,
et de Abel Campos, greffier de section,
AprÚs en avoir délibéré en chambre du conseil le 25
avril et le 30 mai 2017,
Rend lâarrĂȘt que voici, adoptĂ© Ă cette derniĂšre
date :
PROCĂDURE
1. Ă lâorigine
de lâaffaire se trouvent deux requĂȘtes (no 12131/13 et no 43390/13)
dirigées contre la République italienne et dont quarante-deux ressortissants de
différentes nationalités (« les requérants »), dont les noms figurent
Ă lâannexe I, ont saisi la Cour respectivement le 3 janvier 2013 et le
30 mars 2013 en vertu de lâarticle 34 de la Convention de sauvegarde des
droits de lâhomme et des libertĂ©s fondamentales (« la Convention »).
2. Les
requĂ©rants ont Ă©tĂ© reprĂ©sentĂ©s, dans la requĂȘte no 12131/13, par Me N. Paoletti,
avocat Ă Rome, et, dans la requĂȘte no 43390/13, par Mes V. Onida et B. Randazzo, avocats Ă
Milan. Le gouvernement italien (« le Gouvernement ») a été représenté
par son agente, Mme E. Spatafora. Informés
de leur droit dâintervenir dans la procĂ©dure, les gouvernements allemand,
britannique, espagnol, polonais, suĂ©dois, suisse et turc nâont pas usĂ© de leur
droit dâintervenir dans la procĂ©dure (article 36 § 1 de la Convention).
3. Le 10
novembre 2015, les griefs concernant les articles 3 et 13 de la Convention ont
Ă©tĂ© communiquĂ©s au Gouvernement et la requĂȘte no 43390/13 a Ă©tĂ©
dĂ©clarĂ©e irrecevable pour le surplus conformĂ©ment Ă lâarticle 54 § 3
du RĂšglement de la Cour.
EN
FAIT
I. LES
CIRCONSTANCES DE LâESPĂCE
4. Les faits de
la cause, tels quâils ont Ă©tĂ© exposĂ©s par les requĂ©rants et quâils ressortent
des documents pertinents dans les différentes affaires concernées par les faits
Ă lâorigine du prĂ©sent litige[1],
peuvent se résumer comme suit.
A. Le contexte
général
5. Les 19, 20 et
21 juillet 2001, la ville de GĂȘnes accueillit le vingt-septiĂšme sommet des huit
pays les plus industrialisés (G8), sous la présidence du gouvernement italien. De
nombreuses organisations non gouvernementales, rassemblées sous la banniÚre du
groupe de coordination « Genoa Social Forum â
GSF » (« le GSF »), organisÚrent un sommet
« altermondialiste » qui se dĂ©roula Ă la mĂȘme pĂ©riode. Il a Ă©tĂ©
estimĂ© que 200 000 personnes (selon le ministĂšre de lâIntĂ©rieur) Ă
300 000 personnes (selon le GSF) participĂšrent Ă lâĂ©vĂ©nement.
6. Un vaste
dispositif de sĂ©curitĂ© fut mis en place par les autoritĂ©s italiennes (arrĂȘts Giuliani et Gaggio
c. Italie [GC], no 23458/02, § 12, CEDH
2011, et Cestaro c. Italie, no 6884/11, §§ 11-12, 23-24, 7 avril 2015). Celles-ci
divisÚrent la ville en trois zones concentriques : la « zone
rouge », de surveillance maximale, oĂč le sommet devait se dĂ©rouler et oĂč
les délégations devaient loger ; la « zone jaune », une zone
tampon oĂč les manifestations Ă©taient en principe interdites, sauf autorisation
du chef du bureau de la police (questore) ; et la « zone blanche », oĂč les
principales manifestations étaient programmées.
7. Les autorités
attribuĂšrent une couleur Ă chaque groupe organisĂ©, Ă chaque association, Ă
chaque syndicat et à chaque ONG, en fonction de sa dangerosité
potentielle : le « bloc rose », non dangereux ; le « bloc
jaune » et le « bloc bleu », considérés comme comprenant des
auteurs potentiels dâactes de vandalisme, de blocage de rues et de rails, et
Ă©galement dâaffrontements avec la police ; et enfin, le « bloc
noir », dont faisaient partie plusieurs groupes, anarchistes ou plus
généralement violents, ayant pour but de commettre des saccages systématiques.
8. La journée du
19 juillet se déroula dans une ambiance relativement calme, sans épisodes
particuliÚrement significatifs. Par contre, les journées des 20 et 21 juillet
furent marquées par des accrochages de plus en plus violents entre les forces
de police et certains manifestants appartenant essentiellement au « bloc
noir ». Au cours de ces incidents, plusieurs centaines de manifestants et
de membres des forces de lâordre furent blessĂ©s ou intoxiquĂ©s par du gaz
lacrymogĂšnes. Des quartiers entiers de la ville de GĂȘnes furent dĂ©vastĂ©s (pour
une analyse plus détaillée, voir Giuliani et Gaggio, précité, §§ 12-30, et Cestaro, précité, §§ 9-17).
B. Les faits
ayant prĂ©cĂ©dĂ© lâirruption dans lâĂ©cole Diaz-Pertini
9. Le 21
juillet, le chef de la police ordonna au préfet A., chef adjoint de la police
et chargĂ© de lâordre public pendant le sommet, de confier la responsabilitĂ© de
la perquisition de lâĂ©cole Paul Klee
à F.G., chef du service central opérationnel de la police criminelle (« le
SCO » ; voir lâarrĂȘt no 4252/08 du tribunal de GĂȘnes,
rendu le 13 novembre 2008 et dĂ©posĂ© le 11 fĂ©vrier 2009, p. 190). Ă lâissue
de lâintervention, la police procĂ©da Ă lâarrestation dâune vingtaine de
personnes. Celles-ci furent aussitÎt remises en liberté sur ordre du parquet ou
du juge des investigations préliminaires.
10. Le mĂȘme jour,
le prĂ©fet L.B. arriva Ă GĂȘnes, sur ordre du chef de la police, afin de suivre
les opérations de police. Selon les déclarations du préfet A., confirmées par
le directeur central de la police criminelle A.M., les ordres du chef de la
police sâexpliquaient par la volontĂ© de changer de stratĂ©gie et de passer Ă une
approche plus « incisive », dans le but dâeffacer lâimage dâune
police inerte face aux épisodes de pillage et de dévastation. En ce sens, le
chef de la police donna lâinstruction de former des unitĂ©s spĂ©ciales (pattuglioni) â
placĂ©es sous la direction du SCO et de fonctionnaires des unitĂ©s mobiles â,
chargĂ©es dâarrĂȘter les membres du « bloc noir ».
11. Toujours le
mĂȘme jour, en dĂ©but de soirĂ©e, une de ces unitĂ©s transita par la rue Cesare Battisti, devant les Ă©coles Diaz-Pertini et Pascoli. Ces
deux écoles avaient été mises à la disposition du GSF par la municipalité
de GĂȘnes : la premiĂšre Ă©tait utilisĂ©e comme lieu dâhĂ©bergement et point
dâaccĂšs internet, la deuxiĂšme abritait la salle de presse et le bureau du
service légal du GSF. Le passage de la patrouille, composée de quatre
véhicules, provoqua une intense réaction verbale de la part des personnes qui
se trouvaient devant les deux écoles. En outre, une bouteille vide fut lancée
en direction des vĂ©hicules de police (voir le jugement du tribunal de GĂȘnes,
pp. 244-249, et lâarrĂȘt de la Cour de cassation, p.122).
12. Ă la suite de
cet épisode, une réunion se tint à la préfecture en présence des plus hauts
fonctionnaires de police prĂ©sents Ă GĂȘnes. AprĂšs avoir pris contact avec le
membre du GSF en charge de la sĂ©curitĂ© de lâĂ©cole Diaz-Pertini, ils dĂ©cidĂšrent
quâil serait procĂ©dĂ© Ă une perquisition (perquisizione ad iniziativa autonoma)
pour recueillir des Ă©lĂ©ments de preuve et, le cas Ă©chĂ©ant, arrĂȘter les membres
du « bloc noir » responsables de dévastations et de saccages. Il fut
décidé de procéder à une premiÚre phase de « sécurisation » des lieux
par une unitĂ© composĂ©e majoritairement dâagents appartenant Ă une division
spécialisée dans les opérations antiémeutes et ayant suivi une formation ad hoc (le VII Nucleo antisommossa,
constituĂ© au sein de lâunitĂ© mobile de Rome). La deuxiĂšme phase, correspondant
à la perquisition proprement dite, fut attribuée à une autre unité de la
police. Enfin, une unitĂ© de carabinieri fut chargĂ©e dâencercler le bĂątiment afin
dâempĂȘcher la fuite Ă©ventuelle des suspects. Le chef de la police fut informĂ©
de lâopĂ©ration (jugement du tribunal de GĂȘnes, pp. 226 et 249-252, et
« Rapport
final de lâenquĂȘte parlementaire dâinformation sur les faits survenus lors du
G8 de GĂȘnes », pp. 29-31). DâaprĂšs lâarrĂȘt de la
Cour de cassation, environ 500 agents furent mobilisés pour cette opération
(arrĂȘt de la Cour de cassation, p. 204).
C. Lâirruption
de la police dans lâĂ©cole Diaz-Pertini
13. Vers minuit,
une fois arrivés à proximité des deux écoles, les membres du VII Nucleo antisommossa, munis de casques, de boucliers et de
matraques de type tonfa,
suivis par dâautres agents Ă©quipĂ©s Ă lâidentique, commencĂšrent Ă avancer au pas
de course. Un journaliste britannique et un conseiller municipal, qui se
trouvaient Ă lâextĂ©rieur des deux Ă©coles, furent frappĂ©s par des agents de
police (jugement du tribunal de GĂȘnes, pp. 253-261).
14. Au mĂȘme
moment, certains des occupants de lâĂ©cole Diaz-Pertini qui se trouvaient Ă
lâextĂ©rieur regagnĂšrent alors le bĂątiment et en fermĂšrent la grille et les
portes dâentrĂ©e, essayant de les bloquer avec des bancs et des planches en
bois. La grille fut rapidement forcĂ©e Ă lâaide dâun engin blindĂ©, puis les
agents de police enfoncĂšrent les portes dâentrĂ©e (ibidem).
15. Les agents se
répartirent dans les étages du bùtiment, partiellement plongés dans le noir. La
plupart dâentre eux avaient le visage masquĂ© par un foulard. Ils commencĂšrent Ă
frapper les occupants Ă coups de poing, de pied et de matraque, en criant et en
menaçant les victimes. Des groupes dâagents sâacharnĂšrent mĂȘme sur certaines
personnes qui étaient assises ou allongées par terre. Certains des occupants,
rĂ©veillĂ©s par le bruit de lâassaut, furent frappĂ©s alors quâils se trouvaient
encore dans leur sac de couchage ; dâautres le furent alors quâils se
tenaient les bras levĂ©s en signe de capitulation ou quâils montraient leurs papiers
dâidentitĂ©. Certains essayĂšrent de sâenfuir et de se cacher dans les toilettes
ou dans des débarras du bùtiment, mais ils furent rattrapés, battus, parfois
tirés hors de leurs cachettes par les cheveux (jugement de premiÚre instance,
pp. 263-280, et arrĂȘt dâappel, pp. 205-212).
16. Les tribunaux
internes ont Ă©tabli avec exactitude, au-delĂ de tout doute raisonnable, les
mauvais traitements dont avaient fait lâobjet les personnes prĂ©sentes Ă
lâintĂ©rieur de lâĂ©cole Diaz-Pertini. Les tĂ©moignages des victimes ont Ă©tĂ©
confirmĂ©s par les dĂ©positions des membres des forces de lâordre et de
lâadministration publique, les reconnaissances partielles des faits par les
accusés, les enregistrements audiovisuels ainsi que par les documents à disposition
des magistrats, notamment les rapports médicaux et les expertises judiciaires.
Ă partir de cette multitude dâinformations, il est possible de dĂ©crire les
Ă©pisodes de violence dont les requĂ©rants firent lâobjet :
1. RequĂȘte no 12131/13
17. Mme S.
Bartesaghi Gallo fut battue avec une matraque, Ă la
tĂȘte, aux jambes, Ă lâĂ©paule gauche et au bras gauche. Le rapport mĂ©dical
indiquait quâelle prĂ©sentait un traumatisme crĂąnien avec lacĂ©ration et une
contusion Ă la jambe droite.
18. Mme N.A.
Doherty fut rouĂ©e de coups de matraque. Le rapport mĂ©dical faisait Ă©tat dâun
traumatisme crĂąnien, dâune fracture distale du radius droit, dâun hĂ©matome dans
la région fessiÚre, ainsi que de contusions au visage et au bras droit. Il
constatait une incapacité totale de travail de quarante jours.
19. M. J.F.
Galloway fut battu Ă coups de matraque. Le rapport mĂ©dical indiquait quâil
présentait un traumatisme crùnien, des contusions multiples, en particulier sur
la partie gauche du thorax, mais également dans la région rétroauriculaire
gauche, sur le dos et dans la région lombaire, et des excoriations au genou
gauche.
20. M. R.R. Moth reçut des coups de matraque et des coups de pied des
agents des forces de lâordre qui lui causĂšrent des blessures au cuir chevelu et
Ă la jambe droite ainsi quâun traumatisme crĂąnien.
21. M. A. Nathrath subit des contusions au bras droit et Ă la hanche
droite.
22. Mme A.K.
Zeuner fut battue avec une matraque, ce qui lui causa
des excoriations aux lĂšvres et des contusions au bras droit.
23. Mme
T. Treiber essaya sans succĂšs, lors de lâirruption de
la police, de sâenfuir par une fenĂȘtre du deuxiĂšme Ă©tage en montant sur un
Ă©chafaudage. Lorsquâelle fut rentrĂ©e dans lâĂ©cole, les policiers lâobligĂšrent Ă
sâasseoir et la rouĂšrent de coups. Ils la conduisirent ensuite dans le gymnase
de lâĂ©cole oĂč elle vit de nombreux blessĂ©s. Un policier lui ordonna de se
mettre Ă genoux, de courber la tĂȘte et de se taire. Elle allĂšgue souffrir de
séquelles psychologiques en raison de cet épisode et avoir dû entreprendre une
thérapie.
2. RequĂȘte no 43390/13
24. M. D.T.
Albrecht se trouvait au premier Ă©tage de lâĂ©cole lorsque la police y fit
irruption. Il fut battu avec une matraque de type tonfa et reçut également des
coups de poing et de pied. Le rapport mĂ©dical faisait Ă©tat dâun traumatisme crĂąnien
avec formation dâun hĂ©matome Ă©pidural, ainsi que de nombreuses blessures,
notamment dans la région pariétale et occipitale gauche, dans la région
coronarienne droite et au thorax. Conduit Ă lâhĂŽpital San Martino de GĂȘnes, il
subit une opĂ©ration dâurgence en vue de lâaspiration de lâhĂ©matome
intracrùnien. Placé en réanimation le dimanche 22 juillet, il fut surveillé par
des agents de police. Il quitta lâhĂŽpital le 1er aoĂ»t.
25. Mme R.
Allueva Fortea fut battue
avec une matraque, et du mobilier fut jeté sur elle. Ces violences lui
causĂšrent un hĂ©matome Ă la cuisse gauche, une contusion Ă lâos pyramidal, ainsi
que des blessures Ă lâĂ©paule gauche, au genou droit et au coude droit.
26. M. A.R. Balbas fut frappĂ© Ă coups de matraque, Ă coups de pied et Ă
coups de poing. Une chaise fut également jetée sur lui. Le rapport médical
mentionnait plusieurs contusions, notamment au bras, Ă lâĂ©paule, Ă la cuisse
gauche et à la cheville gauche, ainsi que dans la région dorsale.
27. M. M. Bertola fut roué de coups de matraque qui lui causÚrent un
traumatisme crĂąnien, des blessures au cuir chevelu et au front. Le rapport
mĂ©dical mentionnait Ă©galement lâexistence dâune dorsalgie.
28. Mme
V. Bruschi fut battue avec une matraque dans le
gymnase de lâĂ©cole, ce qui lui causa des contusions sur tout le corps.
29. M. M. Chmielewski fut battu avec une matraque de type tonfa et reçut
des coups de pied et des coups de poing. Selon le rapport médical, il
présentait un traumatisme crùnien, une blessure au pavillon auriculaire gauche
et des contusions sur tout le corps.
30. M. B. Coelle reçut des coups de matraque sur tout le corps qui
lui causĂšrent une double fracture de la mandibule et du condyle gauches, ainsi
quâune fracture de la pommette droite. Il fut hospitalisĂ© du 22 au 30 juillet.
Le rapport médical constatait une incapacité totale de travail de quarante
jours et un affaiblissement permanent de lâorgane de la mastication.
31. Mme
S. Digenti reçut des coups de matraque sur la tĂȘte et
sur le dos. Le rapport mĂ©dical faisait Ă©tat dâhĂ©matomes au cou, aux Ă©paules,
dans la rĂ©gion dorsale, Ă la main droite, ainsi que dâexcoriations Ă lâarcade
sourciliĂšre gauche.
32. M. M. Gieser fut frappé à coups de pied et à coups de matraque
qui lui causĂšrent un traumatisme crĂąnien et de multiples contusions sur tout le
corps, notamment dans la région occipitale.
33. Mme
Y.S. Gol fut rouée de coups de pied et de coups de
matraque Ă la tĂȘte, au dos et aux jambes. DâaprĂšs le rapport mĂ©dical, elle
présentait un traumatisme crùnien et des contusions sur le cÎté droit du corps.
34. M. L. Guadagnucci Pancioli fut battu Ă
coups de matraque. Le rapport mĂ©dical mentionnait quâil souffrait dâune
fracture du scaphoĂŻde ainsi que de nombreuses contusions et blessures.
35. M. J. Hermann
fut battu Ă coups de matraque et Ă coups de pied, ce qui lui causa un
traumatisme crùnien, des blessures et des hématomes, en particulier dans la
rĂ©gion frontale, aux Ă©paules et au thorax. Il souffrit dâune diminution
temporaire de lâouĂŻe.
36. Mme
L. Jaeger fut battue avec une matraque. Un agent de police lâobligea Ă
sâaccroupir au sol puis lui marcha sur les mains. Le rapport mĂ©dical
mentionnait la prĂ©sence de contusions au bras droit et Ă lâĂ©paule droite.
37. M. H. Kress fut battu Ă coups de matraque et Ă coups de pied. Le
rapport mĂ©dical indiquait quâil prĂ©sentait un traumatisme crĂąnien, une blessure
au nez et une à la lÚvre supérieure, un traumatisme facial et des contusions
sur tout le corps.
38. Mme
A.J. Kutschkau fut violemment battue Ă coups de
matraque et Ă coups de pied. Le rapport mĂ©dical faisait Ă©tat dâun traumatisme
crĂąnien, dâune fracture de lâos maxillaire, de la perte de deux dents, de la subluxation de deux autres, ainsi que dâun affaiblissement
permanent de lâorgane de la mastication.
39. M. F.J. Madrazo Sanz fut roué de coups de matraque, ce qui lui
causa des contusions et des blessures aux jambes.
40. M. F.P. Marquello fut violemment battu avec une matraque, ce qui
lui causa une blessure au vertex, un traumatisme avec commotion cérébrale ainsi
que la fracture de deux cĂŽtes et dâun doigt.
41. M. N. Martensen fut battu Ă coups de matraque. Un agent de police
lui dĂ©versa le contenu dâun extincteur sur le corps. Le rapport mĂ©dical
mentionnait la prĂ©sence de contusions au visage, au menton, Ă lâĂ©paule et Ă la
jambe droite, ainsi que lâexistence dâun traumatisme crĂąnien. Il constatait une
incapacité totale de travail de quarante jours.
42. Mme
A.F. Martinez fut rouée de coups de matraque et un agent de police jeta
volontairement un siÚge sur elle. Selon le rapport médical, elle présentait une
fracture de la main gauche, de nombreuses contusions et lésions sérieuses, qui
entraßnÚrent une incapacité totale de travail de quarante jours.
43. M. G.P. MassĂł fut battu avec une matraque, ce qui lui causa un
traumatisme crĂąnien avec Ă©tat de choc et une blessure au vertex.
44. M. C. Mirra fut battu avec une matraque, ce qui lui causa un
traumatisme crĂąnien, des contusions et des blessures, notamment au cuir chevelu
et Ă lâarcade sourciliĂšre droite.
45. M. D. Moret Fernandez subit la fracture dâun doigt de la main
gauche et du condyle du coude droit, ainsi quâun traumatisme crĂąnien et
plusieurs hématomes. Le rapport médical constatait une incapacité totale de
travail de quarante jours.
46. M. F.C. Nogueras Corral fut battu et une chaise et un banc en bois
furent jetés sur lui. Il subit un traumatisme crùnien, de nombreux contusions
et hématomes et une fracture du péroné de la jambe droite. Le rapport médical
constatait une incapacité totale de travail de quarante jours.
47. Mme
K. Ottovay fut battue avec une matraque, ce qui lui
causa des contusions, une myalgie et une fracture du cubitus.
48. M. V. Perrone subit un traumatisme crĂąnien et des contusions Ă
lâĂ©paule gauche, au thorax et Ă la main droite.
49. M. R. Pollok fut battu sur tout le corps Ă coups de matraque, Ă
coups de poing et Ă coups de pied. Le rapport mĂ©dical indiquait quâil prĂ©sentait
un traumatisme crĂąnien, une fracture du cubitus droit, une contusion au thorax,
une blessure au cuir chevelu et une blessure Ă la jambe droite.
50. M. F. Primosig reçut plusieurs coups de matraque aux jambes et Ă
la tĂȘte. DâaprĂšs le rapport mĂ©dical, il prĂ©sentait un traumatisme crĂąnien, une
fracture au doigt et des blessures au cuir chevelu. Il fut hospitalisé du 22
juillet au 1er août 2001.
51. M. B.F.J. Samperiz reçut des coups de matraque qui lui causÚrent des
contusions ainsi quâune blessure au genou gauche.
52. M. S. Sibler fut battu avec une matraque. Il subit un traumatisme
crĂąnien, ainsi que des blessures Ă la tĂȘte et au tibia droit.
53. M. J.L. Sicilia fut frappé à coups de matraque et à coups de pied,
ce qui lui causa un traumatisme crùnien, un hématome sous-cutané, plusieurs
contusions et la fracture de deux cÎtes. Le rapport médical mentionnait une
incapacité totale de travail de quarante jours.
54. M. J. Szabo
sâĂ©chappa du pĂ©rimĂštre de lâĂ©cole Ă lâarrivĂ©e de la police pour se cacher dans
un terrain à proximité. Découvert par des agents qui ratissaient les environs, il
reçut des coups de matraque. Le rapport médical constatait la présence de
contusions Ă lâĂ©paule gauche et au flanc droit, ainsi que dâexcoriations dans
la région frontale.
55. Mme
D. Herrero Villamor reçut
deux coups de matraque qui lui causĂšrent la fracture du cubitus droit. Le
rapport mĂ©dical faisait Ă©galement Ă©tat dâun traumatisme crĂąnien.
56. Mme
G.G. Zapatero fut tabassĂ©e avec une matraque, ce qui lui causa une contusion Ă
lâĂ©paule droite.
57. M. S. Zehatschek fut roué de coups de matraque. Le rapport
mĂ©dical indiquait quâil souffrait dâun traumatisme crĂąnien et de contusions
multiples, notamment au thorax.
58. Mme
L. Zuhlke reçut plusieurs coups de matraque Ă la tĂȘte
et aux épaules. Tombée à terre, elle fut rouée de coups sur le dos et sur la
poitrine. TirĂ©e par les cheveux et soulevĂ©e, elle reçut encore des coups Ă
lâentrejambe. PoussĂ©e contre un mur, elle fut frappĂ©e Ă la poitrine et au
ventre, puis traĂźnĂ©e dans les escaliers oĂč elle fut de nouveau frappĂ©e. Elle
fut hospitalisée du 22 au 31 juillet 2001. Selon le rapport médical, elle
prĂ©sentait un traumatisme au thorax et Ă lâabdomen, des fractures Ă lâarc
costal avec pneumothorax et contusion pulmonaire, un traumatisme crĂąnien et de
multiples contusions. Ce rapport faisait Ă©galement Ă©tat dâun affaiblissement
permanent du mouvement du bras et du cou, et dâun affaiblissement permanent de
la fonction respiratoire dâenviron 30 %, et constatait une incapacitĂ©
totale de travail de quarante jours.
D. Lâirruption
de la police dans lâĂ©cole Pascoli
59. Quelque temps
aprĂšs lâirruption dans lâĂ©cole Diaz-Pertini, une unitĂ© dâagents pĂ©nĂ©tra dans
lâĂ©cole Pascoli, qui hĂ©bergeait la salle de presse et le bureau des avocats.
Depuis les fenĂȘtres des Ă©tages supĂ©rieurs, des journalistes filmaient les
Ă©vĂ©nements en train de se dĂ©rouler dans lâĂ©cole Diaz-Pertini et, simultanĂ©ment,
une station de radio relatait tous ces événements en direct.
60. Ă lâarrivĂ©e
des agents de police, les journalistes furent forcés de mettre fin aux prises
de vue et Ă lâĂ©mission de radio. Les tribunaux internes ont Ă©tabli que des
cassettes vidéo, contenant les reportages filmés pendant les trois jours du
sommet, avaient Ă©tĂ© saisies pendant lâopĂ©ration. Il a Ă©galement Ă©tĂ© prouvĂ© que
les disques durs des ordinateurs des avocats du GSF ont été gravement
endommagĂ©s (voir, en particulier, le jugement du tribunal de GĂȘnes,
pp. 300‑310).
E. Les
Ă©vĂ©nements qui suivirent lâirruption dans les Ă©coles Diaz-Pertini et Pascoli
61. Une fois
terminĂ©e la phase de perquisition de lâĂ©cole Diaz-Pertini, les forces de
lâordre rĂ©unirent les objets trouvĂ©s dans le gymnase, sans chercher Ă en identifier
les propriétaires ni à informer les personnes présentes de la nature de
lâopĂ©ration en cours (jugement du tribunal de GĂȘnes, pp. 285-300). La
police procĂ©da Ă lâarrestation des 93 personnes qui occupaient lâĂ©cole, pour
association de malfaiteurs visant au saccage et à la dévastation, résistance
aggravĂ©e aux forces de lâordre et port abusif dâarmes. Parmi ces personnes, 78
furent secourues par le personnel sanitaire arrivé sur place puis
hospitalisées, tandis que les autres furent transférées dans la caserne de Bolzaneto.
62. Dans la nuit
du 21 au 22 juillet, le chef du service de communication de la police
italienne, interviewé à proximité des écoles, déclara que la police venait de
trouver des vĂȘtements et des cagoules noirs similaires Ă ceux utilisĂ©s par le
« bloc noir ». Il ajouta que les nombreuses taches de sang dans le
bĂątiment sâexpliquaient par les blessures subies par la plupart des occupants
de lâĂ©cole Diaz-Pertini au cours de la journĂ©e (jugement de premiĂšre instance,
pp. 170-172).
63. Le 22
juillet, à la préfecture de police de
GĂȘnes, la police montra Ă la presse les objets saisis lors de la perquisition,
en particulier deux cocktails Molotov et une tenue dâagent de police qui
présentait une déchirure nette pouvant avoir été causée par un coup de couteau
(ibidem).
64. Les
poursuites engagĂ©es contre les occupants des chefs dâassociation de malfaiteurs
visant au saccage et à la dévastation, de résistance aggravée aux forces de
lâordre et de port abusif dâarmes ont abouti Ă lâacquittement des intĂ©ressĂ©s.
F. La procédure
pĂ©nale engagĂ©e contre des membres des forces de lâordre pour lâirruption dans
les Ă©coles Diaz-Pertini et Pascoli
65. Le parquet de
GĂȘnes ouvrit une enquĂȘte en vue dâĂ©tablir les Ă©lĂ©ments sur lesquels sâĂ©tait
fondĂ©e la dĂ©cision de faire irruption dans lâĂ©cole Diaz‑Pertini,
et dâĂ©claircir les modalitĂ©s dâexĂ©cution de lâopĂ©ration, lâagression au couteau
qui aurait Ă©tĂ© perpĂ©trĂ©e contre lâun des agents et la dĂ©couverte des deux
cocktails Molotov, ainsi que les Ă©vĂ©nements qui avaient eu lieu dans lâĂ©cole
Pascoli.
66. En décembre
2004, aprĂšs environ trois ans dâinvestigations, vingt-huit personnes parmi les
fonctionnaires, cadres et agents des forces de lâordre furent renvoyĂ©es en
jugement. Par la suite, deux autres procédures concernant trois autres agents
furent jointes Ă la premiĂšre.
67. Les
requérants se constituÚrent parties civiles (au total, les parties civiles
furent au nombre de 119). La procédure pénale relative aux événements survenus
dans les Ă©coles Diaz-Pertini et Pascoli requit lâexamen dâun abondant matĂ©riel
audiovisuel, deux expertises et lâaudition de plus de 300 personnes parmi les
accusés et les témoins (dont beaucoup de ressortissants étrangers).
1. Sur les Ă©vĂ©nements de lâĂ©cole
Diaz-Pertini
68. Les chefs
dâaccusation retenus relativement aux Ă©vĂ©nements de lâĂ©cole Diaz-Pertini furent
les suivants : faux intellectuel, calomnie simple et aggravée, abus
dâautoritĂ© publique (notamment du fait de lâarrestation illĂ©gale des
occupants), lésions corporelles simples et aggravées ainsi que port abusif
dâarmes de guerre.
a) Le jugement de premiĂšre instance
69. Le 11 février
2009, par un jugement no 4252/08, le tribunal de GĂȘnes condamna
douze des prévenus à des peines comprises entre deux et quatre ans
dâemprisonnement et, solidairement avec le ministĂšre de lâIntĂ©rieur, au
paiement des frais et dĂ©pens et au versement de dommages-intĂ©rĂȘts aux parties
civiles, auxquelles le tribunal accorda des provisions allant de 2 500 Ă
50 000 EUR. Un condamné bénéficia de la suspension conditionnelle de
sa peine et de la non-mention dans le casier judiciaire. Par ailleurs, en
application de la loi no 241 du 29 juillet 2006 Ă©tablissant les
conditions Ă remplir pour lâoctroi dâune remise gĂ©nĂ©rale des peines (indulto), dix des condamnĂ©s bĂ©nĂ©ficiĂšrent dâune
remise totale de leur peine principale et lâun dâeux, condamnĂ© Ă quatre ans
dâemprisonnement, bĂ©nĂ©ficia dâune remise de peine de trois ans (pour une
analyse plus détaillée, voir Cestaro c.
Italie, prĂ©citĂ©, §§ 49‑58).
70. Dans les
motifs du jugement, le tribunal considĂ©ra que les forces de lâordre pouvaient
croire, compte tenu des Ă©vĂ©nements qui avaient prĂ©cĂ©dĂ© lâirruption (paragraphe 11 ci-dessus), que lâĂ©cole Diaz-Pertini hĂ©bergeait aussi
des membres du « bloc noir ». Il estima cependant que les événements
litigieux constituaient une violation claire à la fois de la loi, « de la
dignité humaine et du respect de la personne » (di ogni principio
di umanitĂ e di rispetto
delle persone). En outre, selon lui, les auteurs
matériels avaient agi avec la conviction que leurs supérieurs toléraient leurs
actes car certains fonctionnaires et cadres de la police, présents sur les
lieux dĂšs le dĂ©but des opĂ©rations, nâavaient pas immĂ©diatement empĂȘchĂ© la
poursuite des violences.
b) LâarrĂȘt dâappel
71. Le 31 juillet
2010, la cour dâappel de GĂȘnes, par son arrĂȘt
no 1530/10, réforma partiellement le
jugement entrepris (voir Cestaro,
précité, §§ 59-74).
72. En
particulier, en raison de lâarrivĂ©e Ă Ă©chĂ©ance du dĂ©lai de prescription, elle
prononça un non-lieu pour les délits de calomnie aggravée (quatorze accusés),
dâabus dâautoritĂ© publique du fait de lâarrestation illĂ©gale des occupants de
lâĂ©cole Diaz-Pertini (douze accusĂ©s) et de lĂ©sions simples (neuf accusĂ©s).
73. Selon la cour
dâappel, plusieurs Ă©lĂ©ments dĂ©montraient que le but principal de toute
lâopĂ©ration Ă©tait de procĂ©der Ă de nombreuses arrestations, mĂȘme en lâabsence
de finalitĂ© dâordre judiciaire, lâessentiel Ă©tant que les forces de lâordre
parviennent Ă restaurer auprĂšs des mĂ©dias lâimage dâune police perçue comme impuissante.
Les plus hauts fonctionnaires des forces de lâordre auraient donc rassemblĂ©
autour du VII Nucleo
antisommossa une unité lourdement armée, équipée
de matraques de type tonfa
dont les coups pouvaient ĂȘtre mortels, et lui auraient donnĂ© pour unique consigne
de neutraliser les occupants de lâĂ©cole Diaz-Pertini, en stigmatisant ceux-ci
comme étant de dangereux casseurs, auteurs des saccages des jours précédents.
Ainsi, dâaprĂšs la cour dâappel, au moins tous les fonctionnaires en chef et les
cadres du VII Nucleo
antisommossa étaient coupables des lésions
infligées aux occupants. Quant aux responsables de la police de rangs plus
Ă©levĂ©s, la cour dâappel prĂ©cisa que la dĂ©cision de ne pas demander leur renvoi
en jugement empĂȘchait dâapprĂ©cier leur responsabilitĂ© au pĂ©nal.
74. Dans la
dĂ©termination des peines Ă infliger, la cour dâappel, sâappuyant notamment sur
les dĂ©clarations recueillies, souligna que les agents des forces de lâordre
sâĂ©taient transformĂ©s en « matraqueurs violents », indiffĂ©rents Ă
toute vulnĂ©rabilitĂ© physique liĂ©e au sexe et Ă lâĂąge ainsi quâĂ tout signe de
capitulation, mĂȘme de la part de personnes que le bruit de lâassaut venait de
réveiller brusquement. Elle indiqua que, à cela, les agents avaient ajouté
injures et menaces. Ce faisant, ils auraient jetĂ© sur lâItalie le discrĂ©dit de
lâopinion publique internationale. De surcroĂźt, une fois les violences
perpĂ©trĂ©es, les forces de lâordre auraient avancĂ© toute une sĂ©rie de
circonstances à la charge des occupants, inventées de toutes piÚces.
c) LâarrĂȘt de la Cour de cassation
75. Par un arrĂȘt
no 38085 du 5 juillet 2012, déposé le 2 octobre 2012, la Cour de
cassation confirma pour lâessentiel lâarrĂȘt entrepris, dĂ©clarant toutefois
prescrit le délit de lésions aggravées (pour une analyse plus détaillée, voir Cestaro, précité,
§§ 75-80).
76. Elle observa
que â comme les dĂ©cisions de premiĂšre et de deuxiĂšme instance lâauraient
constatĂ© et comme, dâailleurs, cela nâaurait jamais Ă©tĂ© contestĂ© â « les
violences perpĂ©trĂ©es par la police au cours de leur irruption dans lâĂ©cole
Diaz-Pertini [avaient] Ă©tĂ© dâune gravitĂ© inhabituelle » et
« absolue ». Pareille gravité aurait tenu à ce que ces violences
gĂ©nĂ©ralisĂ©es, commises dans tous les locaux de lâĂ©cole, sâĂ©taient dĂ©chaĂźnĂ©es
contre des personnes Ă lâĂ©vidence dĂ©sarmĂ©es, endormies ou assises les mains en
lâair.
77. DâaprĂšs la
Cour de cassation, ces violences pouvaient relever de la « torture » aux
termes de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants ou bien des « traitements
inhumains ou dĂ©gradants » et aux termes de lâarticle 3 de la Convention.
Toutefois, en
lâabsence dâune infraction pĂ©nale ad hoc dans
lâordre juridique italien, les violences en cause avaient Ă©tĂ© poursuivies au
titre des délits de lésions corporelles simples ou aggravées, lesquels, en
application de lâarticle 157 du code pĂ©nal, avaient fait lâobjet dâun non-lieu
pour cause de prescription au cours de la procédure.
2. Sur les Ă©vĂ©nements de lâĂ©cole Pascoli
78. En ce qui
concerne lâĂ©cole Pascoli, les chefs dâaccusation retenus furent essentiellement les dĂ©lits de perquisition arbitraire et de
dommages matériels.
79. Par le
jugement no 4252/08, le tribunal de GĂȘnes considĂ©ra lâirruption des
forces de lâordre dans lâĂ©cole Pascoli comme Ă©tant la consĂ©quence dâune erreur
dans lâidentification du bĂątiment Ă perquisitionner. Il Ă©tablit en outre quâil
nây avait pas de preuves certaines permettant de conclure que les accusĂ©s
avaient effectivement commis dans lâĂ©cole Pascoli les dĂ©gĂąts dĂ©noncĂ©s.
80. Dans son
arrĂȘt no
1530/10, la cour dâappel de GĂȘnes estima, au contraire,
que lâirruption des forces de lâordre avait Ă©tĂ© volontaire et quâelle visait Ă
supprimer toute preuve filmĂ©e de lâirruption en train de se dĂ©rouler dans
lâĂ©cole Diaz-Pertini. Selon la cour dâappel, la destruction des ordinateurs des
avocats avait Ă©tĂ© Ă©galement volontaire. La cour dâappel prononça toutefois un
non-lieu Ă lâĂ©gard du fonctionnaire de police accusĂ© de ladite destruction pour
cause de prescription des délits litigieux.
81. Par un arrĂȘt
no 38085/12, la Cour de cassation confirma cette décision. Elle observa que la cour
dâappel avait pleinement motivĂ© ses conclusions en considĂ©rant que la police
avait accompli, dans lâĂ©cole Pascoli, une perquisition arbitraire ayant pour
but la recherche et la destruction de tout document concernant les événements
de lâĂ©cole Diaz-Pertini.
G. LâenquĂȘte
parlementaire dâinformation
82. Le 2 août
2001, les prĂ©sidents de la Chambre des dĂ©putĂ©s et du SĂ©nat dĂ©cidĂšrent quâune enquĂȘte
dâinformation (indagine conoscitiva)
sur les faits survenus lors du G8 de GĂȘnes serait menĂ©e par les commissions des
Affaires constitutionnelles des deux chambres du Parlement. Ă cette fin, il fut
créé une commission composée de dix-huit députés et de dix-huit sénateurs. Le
20 septembre 2001, la commission déposa un rapport contenant les
conclusions de sa majoritĂ©, intitulĂ© « Rapport final de lâenquĂȘte
parlementaire dâinformation sur les faits survenus lors du G8 de GĂȘnes ».
DâaprĂšs ce rapport, la perquisition dans lâĂ©cole Diaz-Pertini « appar[aissait] comme Ă©tant
peut-ĂȘtre lâexemple le plus significatif de carences organisationnelles et de
dysfonctionnements opérationnels ».
II. LE
DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
83. Pour
ce qui est du droit et de la pratique internes pertinents dans les présentes
affaires ainsi que du droit international, la Cour renvoie Ă lâarrĂȘt Cestaro
(précité, §§ 87-121).
84. Une
proposition de loi visant Ă sanctionner la torture et les mauvais traitements a
été votée par le Sénat de la République italienne le 5 mars 2014 puis présentée
à la Chambre des députés le 6 mars 2014. Cette derniÚre a modifié le texte le 9
avril 2015 et envoyé la nouvelle proposition de loi au Sénat le 13 avril 2015.
Ladite proposition est toujours en cours dâexamen.
EN DROIT
I. SUR
LA JONCTION DES REQUĂTES
85. Compte tenu
de la similitude des prĂ©sentes requĂȘtes quant aux faits et aux questions de
fond quâelles soulĂšvent, la Cour juge appropriĂ© de les joindre, en application
de lâarticle 42 de son rĂšglement.
II. SUR
LA VIOLATION ALLĂGUĂE DE LâARTICLE 3 DE LA CONVENTION
86. Tous les
requĂ©rants se plaignent dâavoir Ă©tĂ© soumis Ă des actes de violence quâils
qualifient de torture et de traitements inhumains et dégradants. Ils invoquent
lâarticle 3 de la Convention ainsi libellĂ© :
« Nul ne peut ĂȘtre soumis Ă la torture ni Ă
des (...) traitements inhumains ou dégradants. »
87. Les
requérants se plaignent également, sur le terrain des articles 3 et 13 de la
Convention, de lâabsence dâune enquĂȘte effective. En particulier, ils dĂ©noncent le dĂ©faut dâidentification de la plupart
des agents auteurs de violences, et lâabsence, dans le systĂšme pĂ©nal italien,
dâun dĂ©lit punissant la torture et les traitements inhumains et dĂ©gradants.
88. Le
Gouvernement conteste cette thĂšse.
89. Eu Ă©gard Ă la formulation des griefs des
requĂ©rants, la Cour estime quâil convient dâexaminer la question de lâabsence
dâune enquĂȘte effective uniquement sous lâangle du volet procĂ©dural de
lâarticle 3 de la Convention (Dembele c. Suisse, no 74010/11, § 33, 24 septembre 2013, et Cestaro, prĂ©citĂ©, § 129).
90. Enfin, les requĂ©rants de la requĂȘte no 43390/13
se plaignent en outre : de ne pas avoir reçu
dâinformations sur les raisons de leur arrestation, le cas Ă©chĂ©ant en prĂ©sence
dâun interprĂšte (article 5 § 2 de la Convention) ; dâavoir subi
des humiliations contraires Ă la libertĂ© de conscience, dâexpression et de
rĂ©union (articles 9, 10 et 11 de la Convention) ; dâavoir Ă©tĂ© victimes de
discrimination, lâirruption de la police nâĂ©tant selon eux quâune rĂ©action
contre les manifestants et leurs opinions politiques (article 14 de la
Convention combiné avec les articles 3, 9, 10 et 11).
91. Eu Ă©gard Ă la
formulation de ces griefs, la Cour estime quâils sâinscrivent dans un cadre
plus gĂ©nĂ©ral de perpĂ©tration dâactes potentiellement contraires Ă lâarticle 3
de la Convention et dĂ©cide de les examiner uniquement sous lâangle de cette
disposition.
A. Sur la
demande de radiation du rĂŽle de la requĂȘte no 43390/13 en ce qui
concerne les requérants figurant sous les numéros 8-9, 13, 16, 20, 28-29, 32 et
33 dans la liste de lâannexe I
92. La Cour a
reçu des déclarations de rÚglement amiable, signées par les parties requérantes
le 27 juillet 2016 et par le Gouvernement le 9 septembre 2016. Ce dernier
sâengage Ă verser Ă chaque requĂ©rant la somme de 45 000 EUR
(quarante-cinq mille euros) à titre de préjudice matériel et moral et pour les
frais et dépens engagés tant devant la Cour que devant les juridictions
internes, plus tout montant pouvant ĂȘtre dĂ» Ă titre dâimpĂŽt par les intĂ©ressĂ©s,
lesquels ont renoncĂ© Ă toute autre prĂ©tention Ă lâencontre de lâItalie au sujet
des faits Ă lâorigine de leurs requĂȘtes.
Cette somme sera versée dans les trois mois suivant
la date de la notification de la décision de la Cour. à défaut de rÚglement
dans ledit dĂ©lai, le Gouvernement sâengage Ă verser, Ă compter de lâexpiration
de celui-ci et jusquâau rĂšglement effectif de la somme en question, un intĂ©rĂȘt
simple Ă un taux Ă©gal Ă celui de la facilitĂ© de prĂȘt marginal de la Banque
centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage. Ce versement
vaudra rĂšglement dĂ©finitif de lâaffaire.
93. La Cour prend
acte du rĂšglement amiable auquel les parties sont parvenues. Elle estime que ce
rĂšglement sâinspire du respect des droits de lâhomme tels que les reconnaissent
la Convention et ses Protocoles et ne voit par ailleurs aucun motif justifiant
de poursuivre lâexamen de la requĂȘte Ă lâĂ©gard des requĂ©rants concernĂ©s.
94. Partant, il
convient de rayer lâaffaire du rĂŽle en ce qui concerne les requĂ©rants
susmentionnĂ©s. La Cour continue lâexamen de la requĂȘte no 43390/13
Ă lâĂ©gard des autres requĂ©rants.
B. Sur la demande
de radiation du rĂŽle de la requĂȘte no 43390/13 en ce qui concerne
les requérants figurant sous les numéros 1, 6, 19 et 21 dans la liste de
lâannexe I
95. Les quatre
requérants informent la Cour de leur souhait de se
dĂ©sister de la requĂȘte no 43390/13 en raison de la rĂ©paration reçue
de la part du ministĂšre de lâIntĂ©rieur pour les dommages dont ils ont Ă©tĂ©
victimes.
96. La Cour estime quâil convient de rayer lâaffaire du rĂŽle en
ce qui concerne les requĂ©rants susmentionnĂ©s, en application de lâarticle 37 §
1 a) de la Convention.
C. Sur les
requĂȘtes no 12131/13 et no 43390/13 en ce qui
concerne les requérants figurant sous les numéros 2-5, 7, 10-12, 14-15, 17-18,
22‑27, 30-31, 34 et 35 dans la liste de lâannexe I
1. Sur la recevabilité
97. Le
Gouvernement excipe du caractĂšre abusif de la requĂȘte no 12131/13,
les requĂ©rants concernĂ©s ayant dĂ©jĂ introduits deux autres requĂȘtes,
actuellement pendantes devant la Cour (requĂȘtes nos 28923/09 et
67599/10). Il invoque Ă ce titre lâarticle 35 §§ 2 b) et 3 a) de la Convention.
98. La Cour
observe dâabord que les deux requĂȘtes mentionnĂ©es par le Gouvernement portent
sur des faits différents de ceux évoqués ici par les requérants. En
particulier, elles ont pour objet des allégations de mauvais traitements
infligĂ©s Ă lâintĂ©rieur de la caserne de Bolzaneto, Ă
GĂȘnes. De surcroĂźt, les Ă©vĂ©nements sur lesquels portent ces requĂȘtes sont
chronologiquement postérieurs aux faits litigieux des présentes affaires.
DĂšs lors, la Cour constate que la requĂȘte no 12131/13
nâest pas essentiellement la mĂȘme que les requĂȘtes nos 28923/09 et
67599/10 et quâelle ne saurait ĂȘtre rejetĂ©e, en application de lâarticle 35 § 2
b) de la Convention. Ces mĂȘmes
constats permettent de conclure au rejet de lâexception prĂ©liminaire tirĂ©e du
caractĂšre abusif de la requĂȘte prĂ©citĂ©e.
99. Constatant
que ces requĂȘtes ne sont pas manifestement mal fondĂ©es au sens de lâarticle 35
§ 3 a) de la Convention et quâelles ne se heurtent par ailleurs Ă aucun autre
motif dâirrecevabilitĂ©, la Cour les dĂ©clare recevables.
2. Sur le fond
a) ThĂšses des parties
i. Les
requérants
100. Les requérants
allĂšguent quâils ont subi des mauvais traitements lors de lâirruption des
policiers Ă lâintĂ©rieur de lâĂ©cole Diaz-Pertini, et quâils ont fait lâobjet
dâune violence disproportionnĂ©e et non justifiĂ©e quâils qualifient de torture
ou de traitements inhumains et dégradants.
101. Les
requĂ©rants se plaignent Ă©galement de lâissue de la procĂ©dure pĂ©nale, et ce pour
plusieurs raisons. En particulier, ils contestent le dĂ©faut dâidentification de
la plupart des auteurs matériels des faits de violence et critiquent les
consĂ©quences de lâabsence du dĂ©lit de torture dans le systĂšme pĂ©nal national et
surtout celles de lâapplication de la prescription aux infractions attribuĂ©es
aux inculpĂ©s, qui auraient empĂȘchĂ© les autoritĂ©s judiciaires de parvenir Ă la
reconnaissance expresse et substantielle de la violation de lâarticle 3 de
la Convention.
102. Ils
soutiennent en outre que, nonobstant lâarrĂȘt Cestaro (prĂ©citĂ©), le lĂ©gislateur italien nâa pas encore adoptĂ© le projet
de loi visant Ă introduire dans lâordre juridique national les dispositions
punissant ce type dâinfractions.
ii. Le
Gouvernement
103. Le
Gouvernement assure quâil ne sous-estime pas lâimportance des faits qui se sont
dĂ©roulĂ©s dans lâĂ©cole Diaz-Pertini, et admet que des actes trĂšs graves et
dĂ©plorables ont Ă©tĂ© commis par les agents de police au cours de lâopĂ©ration
litigieuse.
104. Le Gouvernement
dĂ©clare que lâĂtat italien reconnaĂźt pleinement la commission des violations et
il indique adhĂ©rer au jugement des autoritĂ©s judiciaires internes qui ont, Ă
ses yeux, trÚs durement stigmatisé le comportement des agents de police.
105. Sâagissant du
volet procĂ©dural de lâarticle 3 de la Convention, le Gouvernement soutient
avoir pleinement rempli son obligation positive. Il considĂšre que lâenquĂȘte
officielle menée par les autorités judiciaires a été approfondie, indépendante
et impartiale.
106. Il estime que
ladite enquĂȘte a permis dâidentifier et de condamner les responsables des actes
dĂ©noncĂ©s. Il argue que lâabsence, en tant que tel, dâun dĂ©lit de torture nâa
pas empĂȘchĂ© les juges de poursuivre et de punir efficacement les responsables
en appliquant les dispositions législatives en vigueur.
107. Il maintient
Ă©galement quâil nâest pas possible de donner une dĂ©finition univoque du terme
« torture » et que, en tout état de cause, le code pénal italien
contient plusieurs normes punissant les délits contre la personne, y compris
les actes les plus graves.
108. En outre, il
indique quâune proposition de loi visant Ă introduire le dĂ©lit de torture dans
lâordre juridique interne est actuellement en phase de discussion devant le
Sénat de la République, aprÚs avoir été modifiée par la Chambre des députés.
109. Quant aux mesures
prises Ă lâencontre des fonctionnaires, le Gouvernement informe la Cour, sans
plus de précisions, que tout le personnel impliqué a été soumis à des
procédures disciplinaires conduisant à une suspension de service pour des
périodes déterminées, combinées avec des sanctions pécuniaires proportionnées
au salaire individuel. Il ajoute que, dans certains cas, les agents de police
concernés ont été sanctionnés par la cessation de leurs fonctions ou par le
blocage de leur progression de carriÚre pour ancienneté.
110. Enfin, le
Gouvernement, sans donner plus de dĂ©tails, attire lâattention de la Cour sur
les indemnités provisionnelles reçues par les requérants, dont le montant
varierait entre 10 000 et 30 000 EUR. Il ajoute que, dans certains
cas, les tribunaux nationaux auraient reconnu aux victimes des indemnités
provisionnelles sâĂ©levant Ă 210 000 EUR, sans pour autant indiquer si les
requérants ont été concernés.
b) Appréciation de la Cour
i. Sur le
volet substantiel de lâarticle 3 de la Convention
α) Principes gĂ©nĂ©raux
111. Lâarticle 3
de la Convention consacre lâune des valeurs fondamentales des sociĂ©tĂ©s
démocratiques (voir, notamment, Selmouni
c. France [GC], no 25803/94, § 95, CEDH 1999‑V, Labita c. Italie
[GC], no 26772/95, § 119, CEDH 2000‑IV, GĂ€fgen c. Allemagne [GC], no 22978/05,
§ 87, CEDH 2010, El-Masri c. lâex-RĂ©publique yougoslave de MacĂ©doine [GC],
no 39630/09, § 195,
CEDH 2012, et Mocanu et autres c. Roumanie [GC], nos 10865/09,
45886/07 et 32431/08, § 315, CEDH (extraits)) et un droit
absolu et inaliénable étroitement lié au respect de la dignité humaine (Aleksandr Novoselov c. Russie, no 33954/05, § 54, 28 novembre 2013, Bouyid c. Belgique [GC],
no 23380/09, § 81, CEDH 2015), qui ne prévoit pas de
restrictions et, dâaprĂšs lâarticle 15 § 2, ne souffre nulle
dérogation (GÀfgen,
précité, § 87).
112. La Cour
renvoie aux principes généraux relatifs à la qualification juridique de mauvais
traitement (Irlande c. Royaume-Uni,
18 janvier 1978, § 162, série A no 25 et Jalloh c. Allemagne [GC], no 54810/00,
§ 67, CEDH 2006‑IX ; pour les facteurs Ă considĂ©rer, voir,
parmi beaucoup dâautres, Aksoy c. Turquie, 18 dĂ©cembre 1996,
§ 64, Recueil 1996‑VI, Egmez c. Chypre, no 30873/96,
§ 78, CEDH 2000‑XII, Krastanov
c. Bulgarie, no 50222/99, § 53, 30 septembre
2004, El Masri,
précité, § 196, et Al Nashiri c. Pologne, no 28761/11, § 508, 24
juillet 2014 ; pour le contexte, telle une atmosphĂšre de vive
tension et Ă forte charge Ă©motionnelle, voir, entre autres, Selmouni, prĂ©citĂ©, § 104, et Egmez, prĂ©citĂ©, § 78 ; pour lâusage de la
force physique de la part des forces de lâordre, voir, parmi beaucoup dâautres,
Ribitsch c. Autriche, 4 décembre 1995,
§ 38, série A no 336, Mete et autres c. Turquie, no 294/08,
§ 106, 4 octobre 2011, El-Masri, précité, § 207, et Bouyid, § 101, précité). Plus précisément, en ce
qui concerne la qualification juridique de torture, la Cour renvoie aux
principes dĂ©gagĂ©s dans son arrĂȘt Cestaro (prĂ©citĂ©,
§§ 171-176).
113. Quant Ă
lâapprĂ©ciation des preuves, si la Cour a toujours soulignĂ© son devoir de se
livrer Ă un examen particuliĂšrement approfondi en cas dâallĂ©gations sur le
terrain des articles 2 et 3 de la Convention (Matko
c. Slovénie, no 43393/98,
§ 100, 2 novembre 2006, et Vladimir
Romanov c. Russie, no 41461/02,
§ 59, 24 juillet 2008), elle a également affirmé que, soucieuse de
respecter la nature subsidiaire de son rĂŽle, elle nâa pas pour tĂąche de
substituer sa propre vision des choses Ă celle des cours et tribunaux
nationaux, auxquels il appartient en principe de peser les données recueillies
par eux (Klaas c. Allemagne, 22 septembre 1993,
§ 29, sĂ©rie A no 269, Jasar c. lâex‑RĂ©publique yougoslave de
Macédoine, no 69908/01, § 49, 15 février 2007, et
Eski c. Turquie, no 8354/04,
§ 28, 5 juin 2012). MĂȘme si les constatations
des tribunaux internes ne lient pas la Cour, il lui faut nĂ©anmoins dâhabitude
des Ă©lĂ©ments convaincants pour pouvoir sâĂ©carter des constatations auxquelles
ils sont parvenus (GĂ€fgen,
précité, § 93).
β) Application de ces
principes aux circonstances des présentes espÚces
114. La Cour note
dâemblĂ©e que les tribunaux internes ont Ă©tabli les faits de maniĂšre dĂ©taillĂ©e
et approfondie (paragraphes 69-77 ci-dessus), ce qui nâest dâailleurs pas contestĂ© par
le Gouvernement. En particulier, les juges nationaux ont constaté ce qui
suit :
â la dĂ©cision de procĂ©der Ă lâirruption
Ă lâintĂ©rieur des Ă©coles Diaz-Pertini et Pascoli a Ă©tĂ© prise par les hauts fonctionnaires
de police prĂ©sents Ă GĂȘnes (paragraphe 12 ci-dessus). Cette opĂ©ration de perquisition (perquisizione ad iniziativa autonoma) visant Ă la recherche dâarmes, bien que
pleinement lĂ©gitime (paragraphe 70 ci-dessus), devait en mĂȘme temps permettre des
arrestations « mĂ©diatisĂ©es » afin dâeffacer lâimage dâune police
inerte face aux trÚs graves épisodes de dévastation et de pillage survenus les
20 et 21 juillet (paragraphe 73 ci-dessus) ;
â au cours de lâirruption dans lâĂ©cole
Diaz-Pertini, les agents ont frappé la quasi-totalité des occupants à coups de
poing, à coups de pied et à coups de matraque, en proférant des insultes et des
menaces ;
â Ă lâissue de lâopĂ©ration, les 93
occupants ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s, 78 dâentre eux ont Ă©tĂ© hospitalisĂ©s en raison des
blessures subies (paragraphe 61 ci-dessus) ;
â les violences commises, multiples et
répétées, ont atteint un niveau de gravité absolue car commises dans tous les
locaux de lâĂ©cole et Ă lâĂ©gard de personnes Ă lâĂ©vidence dĂ©sarmĂ©es, endormies
ou assises les mains en lâair (paragraphe 76 ci-dessus) ;
â lesdites violences Ă©taient
injustifiées et ont été exercées dans un but punitif et de représailles, visant
Ă provoquer lâhumiliation et la souffrance physique et morale des victimes.
DâaprĂšs la Cour de cassation, ces actes pouvaient relever de la
« torture » aux termes de la Convention contre la torture des Nations
unies et aux termes de lâarticle 3 de la Convention (paragraphe 77 ci-dessus).
115. En tenant
compte de ces éléments comme toile de fond, la Cour observe que la
planification de lâopĂ©ration de police sâest bornĂ©e Ă prĂ©voir de maniĂšre
générale la séquence des phases opérationnelles (« sécurisation » et
perquisition proprement dite) sans pour autant préciser en détail les modalités
dâengagement et dâutilisation Ă©ventuelle de la force (paragraphe 12 ci-dessus). Elle rappelle Ă©galement que la tĂąche
dâintervenir en premier, afin de contrer toute hypothĂ©tique forme de rĂ©sistance
et de violence de la part des occupants de lâĂ©cole, a Ă©tĂ© attribuĂ©e au VII Nucleo antisommossa. En particulier, elle note que les agents
de cette unité sont arrivés sur les lieux au pas de course et en tenue
antiémeute, munis de casques, de boucliers et de matraques de type tonfa. La police a fait irruption dans
lâenceinte de lâĂ©cole en enfonçant la grille dâentrĂ©e Ă lâaide dâun engin
blindĂ©. Les portes dâentrĂ©e ont Ă©tĂ© rapidement forcĂ©es et, une fois Ă
lâintĂ©rieur, les agents ont fait un usage indiscriminĂ©, systĂ©matique et disproportionnĂ©
de la force (paragraphe 15 ci-dessus).
116. La Cour
estime que ces éléments montrent les défaillances de la planification de
lâopĂ©ration de police. Les forces de lâordre ne se trouvaient pas face Ă une
situation dâurgence, Ă une menace immĂ©diate empĂȘchant de prĂ©voir une
intervention adéquate, adaptée au contexte et proportionnée aux menaces
potentielles. La Cour considĂšre que les hauts responsables avaient la
possibilitĂ© de planifier lâintervention de la police, dâanalyser lâensemble des
informations disponibles et de tenir compte de la situation de tension et de
stress à laquelle les agents de police avaient été soumis depuis quarante-huit
heures (voir, mutatis mutandis, Egmez, § 78, précité). La Cour souligne
en particulier le fait que, malgrĂ© la prĂ©sence Ă GĂȘnes de fonctionnaires expĂ©rimentĂ©s
faisant partie de la haute hiérarchie policiÚre, aucune directive spécifique
sur lâutilisation de la force nâa Ă©tĂ© Ă©mise et quâaucune consigne nâa Ă©tĂ©
donnĂ©e aux agents sur cet aspect dĂ©cisif (voir, pour le mĂȘme constat, Cestaro,
§ 182, précité).
117. En ce qui
concerne les actes de violence subis par les requĂ©rants, la Cour tient Ă
souligner que les agressions infligĂ©es Ă chaque individu lâont Ă©tĂ© dans un
contexte gĂ©nĂ©ral dâemploi excessif, indiscriminĂ© et manifestement
disproportionnée de la force. En effet, les requérants ont été à la fois
victimes et tĂ©moins dâune utilisation incontrĂŽlĂ©e de la violence par la police,
les agents passant à tabac de maniÚre systématique chacun des occupants, y
compris ceux allongĂ©s par terre ou assis mains en lâair (paragraphe 15 ci-dessus). La Cour rappelle Ă cet Ă©gard que les
occupants de lâĂ©cole nâont commis aucun acte de violence ni de rĂ©sistance Ă
lâencontre des forces de lâordre.
118. Sâagissant
des récits individuels, la Cour ne peut que constater la gravité des faits
décrits par les requérants et confirmés par les tribunaux nationaux. Chaque
requérant a été frappé de maniÚre violente, la plupart a reçu des coups de
matraque, des coups de pied et des coups de poing et, dans certains cas, du
mobilier a été jeté sur eux. Les coups reçus ont provoqué des hématomes, des blessures
et, dans certains cas, des fractures sérieuses laissant des séquelles physiques
permanentes (paragraphes 17 Ă 58 ci-dessus).
119. Eu Ă©gard Ă
lâensemble des Ă©lĂ©ments exposĂ©s ci-dessus, la Cour est convaincue que les actes
de violence commis Ă lâencontre des requĂ©rants ont provoquĂ© des souffrances
physiques et psychologiques « aiguĂ«s », et quâils revĂȘtaient un
caractĂšre particuliĂšrement grave et cruel (Cestaro, prĂ©citĂ©, §§ 177‑190).
120. DĂšs lors, la
Cour conclut que les traitements subis par les requĂ©rants Ă lâintĂ©rieur de
lâĂ©cole Diaz-Pertini doivent ĂȘtre regardĂ©s comme des actes de torture. Partant,
il y a eu violation de lâarticle 3 de la Convention sous son volet matĂ©riel.
ii. Sur le
volet procĂ©dural de lâarticle 3 de la Convention
121. La Cour
observe que la mĂȘme procĂ©dure interne est Ă lâorigine du constat de violation
du volet procĂ©dural de lâarticle 3 de la Convention dans lâaffaire Cestaro (prĂ©citĂ© §§
204-236). DĂšs lors, elle ne voit pas de motif de sâĂ©carter des conclusions
auxquelles elle est parvenue dans ladite affaire, y compris pour ce qui est de
lâinsuffisance de lâordre juridique italien concernant la rĂ©pression de la
torture, et conclut Ă la violation de lâarticle 3 de la Convention sous son
volet procédural.
III. SUR
LâAPPLICATION DE LâARTICLE 41 DE LA CONVENTION
122. Aux termes de
lâarticle 41 de la Convention,
« Si la Cour dĂ©clare quâil y a eu violation de
la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie
contractante ne permet dâeffacer quâimparfaitement les consĂ©quences de cette
violation, la Cour accorde Ă la partie lĂ©sĂ©e, sâil y a lieu, une satisfaction
équitable. »
A. Dommage
123. Les
requĂ©rants de la requĂȘte no 12131/13 rĂ©clament chacun
150 000 EUR pour préjudice moral tandis que les requérants de la
requĂȘte no 43390/13 (notamment les requĂ©rants figurant sous les
numéros 2-5, 7, 10-12, 14-15, 17-18, 22-27, 30-31, 34-35 dans la liste de
lâannexe I) sâen remettent Ă lâapprĂ©ciation de la Cour.
124. Le
Gouvernement conteste ces prétentions et invite la Cour à tenir compte des
sommes provisionnelles déjà versées aux requérants en tant que parties civiles
à la procédure pénale.
125. La Cour prend
note que, au niveau national, chaque requĂ©rant a obtenu le versement dâune
somme provisionnelle indemnisant partiellement le prĂ©judice moral. Câest
pourquoi elle tiendra compte de ces provisions dans le calcul de la somme Ă
accorder aux termes de lâarticle 41 de la Convention (Cestaro, prĂ©citĂ©, § 251).
126. Au vu de la
gravité des circonstances des présentes espÚces et eu égard à sa conclusion de violation
de lâarticle 3 de la Convention, tant sous son volet matĂ©riel que sous son
volet procĂ©dural, Ă laquelle elle est parvenue, la Cour considĂšre quâil y a
lieu dâaccorder en Ă©quitĂ© Ă chaque requĂ©rant la somme de 45 000 EUR
(quarante-cinq mille euros) Ă titre de dommage moral, Ă lâexception de deux
requérantes, Mmes A.J.
Kutschkau et L. Zuhlke.
à ces derniÚres, en raison de la gravité des séquelles physiques dont elles ont
Ă©tĂ© victimes, la Cour dĂ©cide dâaccorder en Ă©quitĂ© Ă chacune la somme de
55 000 EUR (cinquante-cinq mille euros) Ă titre de dommage moral (Batı
et autres c. Turquie, nos 33097/96
et 57834/00, § 168, CEDH 2004‑IV (extraits).
B. Frais et
dépens
127. Les
requĂ©rants de la requĂȘte no 12131/13 nâont formulĂ© aucune demande
de remboursement des frais et dépens engagés pour la procédure devant la Cour.
La Cour estime dĂšs lors quâil nây a pas lieu de leur accorder une somme Ă ce
titre.
128. En ce qui
concerne la requĂȘte no 43930/13, les requĂ©rants sollicitent
95 808,69 EUR en remboursement des frais et dépens engagés devant la
Cour. Ils produisent des notes dâhonoraires des diffĂ©rents avocats les ayant
assistés. En particulier, ils distinguent les frais et dépens de Mes V. Onida et B. Randazzo, se
rapportant au travail de rĂ©daction de la requĂȘte introduite pour tous les
requĂ©rants, de ceux relatifs au travail de collecte dâinformations effectuĂ© par
les autres avocats ayant assisté un ou plusieurs requérants.
129. Le Gouvernement
ne conteste pas ces prétentions.
130. Selon la
jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses
frais et dĂ©pens que dans la mesure oĂč se trouvent Ă©tablis leur rĂ©alitĂ©, leur
nĂ©cessitĂ© et le caractĂšre raisonnable de leur taux (Nikolova c. Bulgarie [GC], no 31195/96, § 79, CEDH 1999‑II).
131. Dans les
présentes causes, compte tenu des documents dont elle dispose et de sa jurisprudence,
la Cour estime en principe raisonnable la somme demandée pour la procédure
devant elle. Elle constate cependant que certains des requérants ont accepté la
proposition de rÚglement amiable présentée par le Gouvernement défendeur
(paragraphe 94 ci-dessus). Le texte de la déclaration, formulée de
maniÚre identique pour chaque requérant concerné, est ainsi libellé en sa
partie ici pertinente :
« Le Gouvernement a proposé au requérant la
somme de 45 000 EUR (quarante-cinq mille euros) à titre de préjudice
matériel et moral ainsi que pour les frais et dépens, plus tout montant pouvant
ĂȘtre dĂ» Ă titre dâimpĂŽt par lâintĂ©ressĂ©, lequel a renoncĂ© Ă toute autre
prĂ©tention Ă lâencontre de lâItalie Ă propos des faits Ă lâorigine de sa
requĂȘte. »
132. DĂšs lors, en
acceptant la proposition de rĂšglement amiable, ces requĂ©rants ont renoncĂ© Ă
toute prétention relative aux frais et dépens. Par conséquent, la Cour décide
quâil y a lieu de dĂ©duire du montant global demandĂ© la somme correspondante aux
requérants ayant accepté ladite proposition de rÚglement amiable. Cette somme
est obtenue en multipliant le prorata dû à chaque requérant par le nombre de
requérants concernés.
133. La mĂȘme
solution sâimpose en ce qui concerne les quatre requĂ©rants qui ont informĂ© la
Cour de leur volontĂ© de se dĂ©sister de la requĂȘte no 43390/13
(paragraphe 96 ci-dessus).
134. En
conclusion, la Cour accorde aux requérants figurant sous les numéros 2-5, 7, 10-12,
14-15, 17-18, 22-27, 30-31, 34 et 35 dans la liste de lâannexe I, la somme
globale de 59 750 EUR (cinquante-neuf mille sept cent cinquante euros) en
remboursement des frais et dĂ©pens engagĂ©s devant elle (voir lâannexe II pour
les sommes accordées en détail aux requérants).
C. IntĂ©rĂȘts
moratoires
135. La Cour juge
appropriĂ© de calquer le taux des intĂ©rĂȘts moratoires sur le taux dâintĂ©rĂȘt de
la facilitĂ© de prĂȘt marginal de la Banque centrale europĂ©enne majorĂ© de trois
points de pourcentage.
PAR CES
MOTIFS, LA COUR, Ă LâUNANIMITĂ,
1. DĂ©cide de joindre les requĂȘtes ;
2. DĂ©cide de rayer la requĂȘte du rĂŽle, en
ce qui concerne les requĂ©rants dans la requĂȘte no 43390/13 qui figurent
en annexe I sous les numéros 1, 6, 8, 9, 13, 16, 19-21, 28-29, 32 et 33 ;
3. DĂ©clare les requĂȘtes recevables Ă
lâĂ©gard des autres requĂ©rants ;
4. Dit quâil y a eu violation de lâarticle
3 de la Convention sous son volet matériel ;
5. Dit quâil y a eu violation de lâarticle
3 de la Convention sous son volet procédural ;
6. Dit
a) que lâĂtat dĂ©fendeur doit verser aux
requĂ©rants, dans les trois mois Ă compter du jour oĂč lâarrĂȘt sera devenu
dĂ©finitif conformĂ©ment Ă lâarticle 44 § 2 de la Convention, les
sommes suivantes, au taux applicable Ă la date du rĂšglement :
i. 55 000 EUR (cinquante-cinq mille
euros) Ă Mmes A.J.
Kutschkau et L. Zuhlke,
plus tout montant pouvant ĂȘtre dĂ» Ă titre dâimpĂŽt, pour dommage moral,
ii. 45 000 EUR (quarante-cinq mille
euros) aux requĂ©rants de la requĂȘte no 12131/13 et aux requĂ©rants de
la requĂȘte no 43390/13 figurant sous les numĂ©ros 2-5,
7, 10-12, 14, 17-18, 22-27, 30-31 et 34 dans la liste de lâannexe I,
plus tout montant pouvant ĂȘtre dĂ» Ă titre dâimpĂŽt, pour dommage moral,
iii. 59 750 EUR (cinquante-neuf
mille sept cent cinquante euros), plus tout montant
pouvant ĂȘtre dĂ» par les requĂ©rants de la requĂȘte no 43390/13,
figurant sous les numéros 2-5, 7,
10-12, 14-15, 17-18, 22‑27, 30-31, 34 et 35 dans la liste de lâannexe I,
Ă titre dâimpĂŽt, pour frais et dĂ©pens ;
b) quâĂ compter de lâexpiration dudit
dĂ©lai et jusquâau versement, ces montants seront Ă majorer dâun intĂ©rĂȘt simple
Ă un taux Ă©gal Ă celui de la facilitĂ© de prĂȘt marginal de la Banque centrale
européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de
pourcentage ;
7. Rejette la demande de satisfaction
Ă©quitable pour le surplus.
Fait en français, puis communiqué par écrit
le 22 juin 2017, en application de lâarticle 77 §§ 2 et 3 du rĂšglement de
la Cour.
   Abel Campos                                                           Linos-Alexandre Sicilianos
       Greffier                                                                              Président
AnnExe I
No |
Numéro
de la requĂȘte Date
dâintroduction Griefs
soulevés |
Nom du requĂ©rant Date de naissance â NationalitĂ© Lieu de rĂ©sidence |
1. |
NumĂ©ro de requĂȘte : 12131/13 Introduite
le 03/01/2013 Art. 3 : torture et
traitements inhumains et dégradants ; Arts 3 et 13 :
absence dâune enquĂȘte effective. |
1. Sara BARTESAGHI
GALLO 07/05/1980 â Italienne Paris (France) 2. Nicola Anne
DOHERTY 24/07/1974
â Britannique Londres
(Royaume Uni) 3. Jan Farrel
GALLOWAY 21/03/1975
â AmĂ©ricaine Philadelphie
(Ătats Unis) 4. Richard Robert MOTH 09/11/1968
â Britannique Londres
(Royaume Uni) 5. Achim NATHRATH 31/12/1969
â Allemande Munich
(Allemagne) 6. Theresa TREIBER 09/08/1967
â Allemande Munich
(Allemagne) 7. Anna Katharina ZEUNER 04/09/1978 â Allemande Berlin
(Allemagne) |
2. |
NumĂ©ro de requĂȘte: 43390/13 Introduite le 30/03/2013 Art. 3 : torture et
traitements inhumains et dégradants ; Art. 3 : défaut
dâidentification des auteurs des vexations ; Arts 3 et 13 :
absence dâune enquĂȘte effective ; Art. 5 § 2 :
absence dâinformations sur les raisons de lâarrestation ; Arts 9, 10 et 11 :
violation de la libertĂ© dâavoir des convictions, de la libertĂ© dâexpression
et de la liberté de réunion ; Article
14 combiné avec les articles 3, 9, 10, 11 : victimes de violences en
raison de leurs opinions politiques. |
1. Daniel Thomas ALBRECHT 09/11/1979
â Allemande Berlin
(Allemagne) 2. Aitor Ruiz BALBAS 09/10/1970 â Espagnole Pamplona (Espagne) 3. Matteo BERTOLA 04/07/1977 â Italienne Lecco (Italie) 4. Valeria BRUSCHI 26/02/1975 â Italienne Berlin
(Allemagne) 5. Michal CHMIELEWSKI 25/10/1975
â Polonaise Dublin
(Irlande) 6. Benjamin COELLE 03/02/1980
â Allemande Stuttgart
(Allemagne) 7. Simona DIGENTI 09/03/1980 â Suisse Rumlang (Suisse) 8. Rosana ALLUEVA FORTEA 16/09/1980 â Espagnole Monreal Del Campo (Espagne) 9. Michael GIESER 12/11/1965
â SuĂ©doise Mondorf-Les-Bains (Luxembourg) 10. Yasar Suna GOL 16/05/1965
â Turque Hoelstein (Suisse) 11. Lorenzo
GUADAGNUCCI PANCIOLI 03/12/1963 â Italienne Florence (Italie) 12. Jens HERMANN 13/10/1972
â Allemande Berlin
(Allemagne) 13. Laura JAEGER 15/02/1981
â Allemande Barcelona
(Espagne) 14. Holger KRESS 25/07/1979
â VĂ©nĂ©zuĂ©lienne Teubingen (Allemagne) 15. Anna Julia KUTSCHKAU 23/06/1980
â Allemande Berlin
(Allemagne) 16. Francisco
Javier MADRAZO SANZ 03/12/1973 â Espagnole Saragosse (Espagne) 17. Felix Pablo
MARQUELLO 05/11/1965 â Espagnole Saragosse (Espagne) 18. Niels MARTENSEN 08/01/1977
â Allemagne Hambourg
(Allemagne) 19. Ana MARTINEZ FERRER 20/10/1975 â Espagnole Tarazona (Espagne) 20. Guillermo Paz MASSĂ 28/09/1976 â Espagnole Saragosse (Espagne) 21. Christian MIRRA 14/06/1977
â Italienne Santander
(Espagne) 22. David MORET FERNANDEZ 07/11/1971
â Espagnole Lleida (Espagne) 23. Francho Chavier NOGUERAS CORRAL 14/02/1965 â Espagnole Saragosse (Espagne) 24. Kathrin OTTOVAY 09/11/1978 â Allemande Berlin (Allemagne) 25. Vito PERRONE 20/12/1977 â Italienne Foggia (Italie) 26. Rafael POLLOK 03/01/1976
â Polonaise Bremenn (Allemagne) 27. Federico
PRIMOSIG 28/12/1978 â Italienne Rome (Italie) 28. Benito
Francisco Javier SAMPERIZ 14/05/1976 â Espagnole Saragosse (Allemagne) 29. Steffen SIBLER 31/01/1978
â Allemande Berlin
(Allemagne) 30. Jose Luis
SICILIA 17/11/1959 â Argentine Saragosse (Espagne) 31. Jonas SZABO 24/09/1980
â Allemande Berlin
(Allemagne) 32. Dolores HERRERO VILLAMOR 31/01/1937
â Espagnole Bremen (Allemagne) 33. Guillermina GARCIA ZAPATERO 09/03/1974 â Espagnole Madrid (Espagne) 34. Sebastian
ZEHATSCHEK 23/01/1981
â Allemande Neu-Ulm (Allemagne) 35. Lena ZUHLKE 14/02/1977
â Allemande Hambourg
(Allemagne) |
Annexe II
Avocats
représentants |
Requérants
représentés |
Montant
total Ă payer[2] |
Me V.
ONIDA Me B.
RANDAZZO |
Tous les requĂ©rants de la requĂȘte no
43390/13 |
12 100
EUR |
Mes A. GALASSO Me P.
PALMIERI Me L.
DâAMICO |
Lorenzo
GUADAGNUCCI PANCIOLI Vito
PERRONE |
5 830
EUR |
Me F. TADDEI |
Michal
CHMIELEWSKI Benjamin
COELLE Christian
MIRRA Rafael
POLLOK Steffen
SIBLER |
5 500 EUR |
Me C. NOVARO |
Laura
JAEGER |
0 EUR |
Me L. TARTARINI |
Daniel
Thomas ALBRECHT Jens
HERMANN Niels MARTENSEN Katrin OTTOVAY Jonas SZABO Guillermina GARCIA ZAPATERO |
10 150
EUR |
Me E. TAMBUSCIO |
Rosana ALLUEVA FORTEA Aitor Ruiz BALBAS Valeria BRUSCHI Simona DIGENTI Francisco
Javier MADRAZO SANZ Felix
Pablo MARQUELLO Guillermo
PAZ MASSĂ David
MORET FERNANDEZ Francho
Chavier NOGUERAS CORRAL Federico
PRIMOSIG Benito
Francisco Javier SAMPERIZ José
Luis SICILIA |
12 000
EUR |
Me M. PASTORE |
Michael
GIESER Yasar
Suna GOL |
2 530
EUR |
Me F. GUIGLIA |
Holger
KRESS Dolores
HERRERO VILLAMOR Sebastian
ZEHATSCHEK Lena
ZUHLKE |
7 610
EUR |
Me R. PASSEGGI |
Anna
Julia KUTSCHKAU |
1 500 EUR |
Me P.
ANTIMIANI Me A.
MARINI Me M. MAZZALI |
Matteo BERTOLA |
2 530
EUR |
1. ArrĂȘt Giuliani et Gaggio
c. Italie [GC], no 23458/02, CEDH 2011 ; arrĂȘt Cestaro c. Italie, no 6884/11,
7 avril 2015 ; voir Ă©galement
« Rapport final de lâenquĂȘte parlementaire dâinformation
sur les faits survenus lors du G8 de GĂȘnes » du 20 septembre
2001 ; jugement no 4252/08 du tribunal de GĂȘnes, rendu le
13 novembre 2008 et dĂ©posĂ© le 11 fĂ©vrier 2009 ; arrĂȘt no
1530/10 de la cour dâappel de GĂȘnes, rendu le 18 mai 2010 et dĂ©posĂ© le 31
juillet 2010, ; arrĂȘt no 38085/12 de la Cour de
cassation, rendu le 5 juillet 2012 et déposé le 2 octobre 2012.
[2] Certains requérants ont accepté la proposition de rÚglement amiable ou se
sont désistés en renonçant à toute prétention relative aux frais et dépens
engagés (paragraphe 131 ci-dessus).