Cour européenne des droits de l'homme
PREMIÈRE SECTION
AFFAIRE ASSOCIAZIONE POLITICA NAZIONALE LISTA MARCO
PANNELLA c. ITALIE
(Requête no 66984/14)
ARRÊT
Art 10 • Liberté d’expression
• Déséquilibre
de présence en défaveur
d’une association sujet politique dans des émissions d’information populaires de la télévision
publique • Obligation légale d’une représentation équilibrée des différentes opinions politiques •
Mise en pratique d’une représentation
égalitaire, dans les émissions en question, abandonnée par l’autorité de contrôle sans motivation • Exclusion de l’association du débat politique • Mesures insuffisantes des autorités internes
pour rééquilibrer la situation
STRASBOURG
31 août 2021
Cet arrêt deviendra
définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la
Convention. Il peut subir des
retouches de forme.
En l’affaire Associazione Politica
Nazionale Lista Marco Pannella c. Italie,
La Cour
européenne des droits de l’homme (première section), siégeant en une Chambre composée de :
Ksenija Turković, présidente,
Péter Paczolay
Alena Poláčková,
Erik Wennerström,
Raffaele Sabato,
Lorraine
Schembri Orland,
Ioannis Ktistakis, juges,
et de Renata Degener, greffière de section,
Vu la requête
(no 66984/14) dirigée contre la
République italienne et dont Associazione
Politica Nazionale Lista Marco Pannella (« l’association
requérante ») a saisi la Cour en vertu de l’article 34 de la
Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales
(« la Convention ») le 2 octobre
2014,
Vu la décision
de porter à la connaissance
du gouvernement italien (« le Gouvernement ») les griefs concernant les articles 6 § 1 et 10 de la
Convention,
Vu les observations des parties,
Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 29 juin 2021,
Rend l’arrêt que voici, adopté
à cette date :
INTRODUCTION
1. L’association
requérante s’estime victime d’une violation de son droit à la liberté de communiquer
ses opinions et ses idées politiques dans les médias.
2. L’association
requérante est une association
politique dont le siège se trouve à Rome. Elle a été représentée par Me A. Saccucci.
3. Le Gouvernement a été représenté par son
agent, Mme E. Spatafora, et son coagent, Mme M.G. Civinini,
de la représentation permanente de l’Italie auprès du Conseil de l’Europe.
4. Dans le système de radiotélédiffusion italien, les dispositions législatives relatives à la diffusion des opinions et messages de nature politique prévoient une distinction entre deux catégories
d’émissions.
5. Les
émissions de « communication politique »,
d’une part, ont pour objet essentiel la diffusion des opinions et propositions des forces politiques
qui participent à la vie parlementaire
du pays. Pour ces émissions, le droit interne prévoit des règles précises
de répartition du temps d’antenne afin d’assurer une stricte équité d’accès entre les forces
politiques (paragraphe 27
ci-dessous).
6. Les émissions « d’information », d’autre
part, ont pour objet de traiter de thèmes d’actualité, de société et de politique (paragraphe 30
ci-dessous). Pour ces émissions,
la direction de la chaîne,
la rédaction et l’animateur
jouissent d’une certaine
autonomie quant au choix des thématiques,
des invités et de leur temps de parole. Ce second type d’émission a connu ces dernières
années un essor considérable, en particulier sous la forme de « programmes d’approfondissement »
(programmi di approfondimento).
7. Le législateur
a confié à deux acteurs publics la mission de contrôler, dans le cadre de leurs compétences respectives, la programmation et l’activité des chaînes télévisées,
afin de garantir le respect
des principes constitutionnels et des dispositions régissant la diffusion du discours
politique dans les médias.
8. Ces
deux organes sont la Commission parlementaire bicamérale pour la direction générale et la surveillance des services de radiotélévision (Commissione
Parlamentare per l’indirizzo generale e la vigilanza dei servizi
radiotelevisivi – « la commission de vigilance »)
et l’Autorité pour les garanties dans les communications (Autorità
per le garanzie nelle comunicazioni – « l’AGCOM »).
9. La commission
de vigilance, instituée en
1975, se compose de quarante membres
élus siégeant à la Chambre des députés et au Sénat de la République. Elle exprime la volonté du Parlement en matière de service public de radiotélédiffusion.
En particulier, elle est chargée,
en vertu de la loi no 103
de 1975, de la direction générale
et de la surveillance des activités de l’entreprise publique
concessionnaire du service
public de radiotélédiffusion, Radio
Televisione Italiana (« la RAI »).
Elle formule les orientations
générales et fixe les critères généraux
présidant à l’élaboration des plans d’investissement et de dépenses des chaînes
publiques. La loi no 28
de 2000 (paragraphe 27 ci-dessous) a élargi
ses compétences en matière de « communication politique » et d’égalité d’accès
aux médias, en la chargeant de veiller, tant en période d’élections ou de référendum (« période électorale ») qu’en temps ordinaire, au respect des
principes d’impartialité et
de pluralisme de l’information.
10. Hors période
électorale, la commission
de vigilance indique à la
RAI les critères à appliquer pour l’organisation de « tribunes politiques ». La RAI doit ainsi préparer, pour chaque cycle de trois semaines, trente-six émissions (conférences de presse, face-à-face, tables
rondes). La commission de vigilance
désigne les forces politiques qui pourront participer à chacune d’entre elles. Quinze jours avant le début
de chaque cycle de programmation, la présidence de
la commission de vigilance approuve et transmet à la RAI un schéma directeur précisant les acteurs
politiques à inviter. Une
semaine avant le début du cycle,
la RAI lui communique le calendrier
des émissions programmées sur les chaînes publiques.
11. L’AGCOM, quant à elle, est une autorité administrative indépendante créée en 1997. Elle exerce des fonctions de régulation et de surveillance, notamment dans les secteurs des
télécommunications et de l’audiovisuel.
Elle doit assurer le respect du pluralisme
et garantir l’égalité d’accès de tous
les « sujets
politiques » (paragraphe 17
ci-dessous) aux émissions
d’information, de communication électorale et de communication politique, et l’impartialité de ces émissions. Elle veille aussi au respect des
orientations définies par
la commission de vigilance,
et peut fixer elle-même des règles complémentaires
afin d’assurer le respect de la législation interne
(paragraphe 25 ci-dessous).
12. À l’époque des faits, la loi
no 112/2004 disposait, en son article 20 § 9 (abrogé ensuite par la loi no 220 du 28 décembre 2015), que sept des
membres du conseil d’administration de la
RAI étaient nommés par la commission de vigilance et deux, dont le président, par l’exécutif.
13. Le 4 juin
2010, l’association requérante
saisit l’AGCOM d’une plainte
dirigée contre les trois chaînes généralistes
de la RAI, pour non‑respect, entre le 1er avril et le 3 juin 2010, des obligations découlant des principes d’impartialité et de pluralisme de
l’information.
14. Elle estimait
en particulier que les journaux télévisés
de ces trois chaînes (le TG1, le TG2 et le TG3) n’avaient
pas suffisamment fait état des initiatives et campagnes de sensibilisation qu’elle avait lancées. Elle se plaignait également de ce que ses représentants
n’avaient pas été invités aux
plus importants talk-shows diffusés sur les trois chaînes publiques
– Porta a porta, Annozero et Ballarò – alors que les représentants
des autres tendances politiques y avaient participé.
Invoquant la pratique consolidée de l’AGCOM dans les affaires de ce type, elle invitait l’autorité à ne pas considérer comme un tout l’ensemble des journaux télévisés et des émissions concernés
mais à apprécier son préjudice
au regard de chaque journal et chaque émission pris individuellement.
Elle demandait un rééquilibrage
de la situation par l’attribution spécifique
de temps d’antenne à ses représentants, tant dans les journaux
télévisés que dans les trois talk-shows.
15. Par une délibération
du 8 juillet 2010 (no 137/10/CSP),
l’AGCOM décida de classer
la plainte sans suite. Elle évalua
le temps d’antenne de l’association
requérante au regard de sa présence globale dans l’ensemble des journaux télévisés et des émissions d’information proposées par chaque chaîne publique (RaiUno, RaiDue
et RaiTre) pendant la période considérée,
et conclut que l’association avait bénéficié d’une exposition suffisante, similaire à celle des autres forces
politiques qui, comme elle,
n’avaient pas d’élus au Parlement.
Elle souligna que, contrairement aux émissions de « communication
politique », les émissions d’information n’étaient
pas soumises à une règle de stricte répartition mathématique du temps d’antenne attribué à chaque force politique, et expliqua que dans ces
émissions, l’expression
d’opinions politiques était
encadrée par la règle de
l’égalité de traitement (c’est-à-dire que les situations similaires devaient être traitées de manière similaire), le but étant d’assurer
une représentation équitable
de toutes les opinions politiques. Elle conclut que rien ne permettait
de dire que de l’association
requérante ait été sous-représentée à l’antenne pendant la période considérée.
16. Le 9 novembre
2010, l’association requérante attaqua la décision de l’AGCOM devant le tribunal administratif régional (« le TAR ») du Latium. Elle
soutenait qu’en n’examinant pas son temps de présence dans chaque journal télévisé et chaque émission pris séparément,
l’AGCOM s’était indûment écartée de sa pratique bien établie. Elle ajoutait que sa situation n’était pas la même
que celle des forces politiques non représentées au Parlement auxquelles l’AGCOM l’avait comparée car elle pouvait compter sur six députés et trois sénateurs qui, en vertu d’un accord spécifique, avaient constitué au sein
du groupe parlementaire du Parti démocratique une délégation
autonome qui défendait ses idées.
17. Par un jugement
du 9 juin 2011 (no 8064),
le TAR du Latium fit droit à la demande de l’association requérante et annula la décision de l’AGCOM.
À titre préliminaire, il précisa que seule l’association
requérante était légitimée à agir, contrairement aux autres associations
de la « mouvance
radicale », dont Radicali Italiani, elle seule
ayant des représentants élus au Parlement et pouvant dès lors
être considérée comme un « sujet politique » selon le droit interne (paragraphe 32
ci-dessous).
Sur le fond,
le TAR rappela en premier lieu
qu’en tant qu’autorité administrative indépendante l’AGCOM n’était pas seulement une autorité de vigilance mais aussi une autorité de régulation du secteur.
Il expliqua que cela impliquait que, lorsqu’elle était appelée à apprécier la conformité d’une décision avec les dispositions
applicables, elle devait tenir compte des
décisions qu’elle avait rendues auparavant
dans des affaires similaires. Il considéra que par conséquent, elle aurait dû motiver
le revirement qu’elle avait opéré dans sa décision,
où, au lieu
de procéder à une appréciation
séparée (autonoma considerazione), comme elle l’avait fait auparavant, de chacune des trois
émissions, elle avait considéré de manière globale le temps d’antenne dont avait bénéficié l’association requérante, sans tenir compte de la popularité ni des heures de diffusion
des différentes émissions auxquelles celle-ci avait pu participer.
En deuxième lieu, il considéra que l’AGCOM n’avait pas dûment motivé
la partie de sa décision où elle avait comparé
l’association requérante à des forces politiques
dépourvues de représentants
élus, sans tenir compte de ce que, en vertu d’un accord politique public passé entre l’association et un parti politique, l’intéressée bénéficiait de neuf représentants au Parlement.
Le TAR estima par ailleurs
contradictoire le fait que l’AGCOM ait considéré que l’association
requérante n’était pas représentée au Parlement mais n’ait pas tenu
compte de ce que des forces politiques
« non représentées »
avaient, elles, été invitées dans
les émissions en cause.
En conclusion,
il ordonna à l’AGCOM de réexaminer
la plainte de l’association
requérante à la lumière de ces
éléments, en veillant à remédier aux défauts
de motivation qu’il avait constatés.
18. L’AGCOM n’interjeta pas appel
du jugement devant le Conseil d’État, qui devint définit le 19 avril 2012.
19. Après avoir réexaminé sa décision en application de ce jugement, l’AGCOM confirma, par
une délibération du
18 décembre 2012 (no 472/12/CONS), le classement sans suite de la plainte
de l’association requérante.
Elle estima que cette dernière ne pouvait pas être considérée
comme un « sujet
politique » relevant des normes applicables
aux forces politiques représentées au Parlement mais que sa situation était bel et bien comparable à celles des autres forces
politiques privées de représentation
parlementaire. Par ailleurs,
elle considéra comme pleinement légitime son choix de vérifier « le respect des principes du
pluralisme, de l’impartialité,
de l’objectivité et de l’égalité de traitement entre les différentes forces politiques hors période électorale » sur la
base de « l’intégralité des
émissions d’information diffusées »
sur chaque chaîne.
20. Le 27 décembre
2012, l’association requérante
déposa un nouveau recours devant le TAR du Latium, pour violation de la chose jugée (le jugement no 8064
de 2001), en demandant l’annulation
de la décision de l’AGCOM ainsi
que l’exécution (giudizio
di ottemperanza) du jugement
du TAR de 2011.
21. Le 14 mars
2013, le TAR fit droit à ce
recours. D’abord, il
constata que la requérante était représentée aux Parlement, et considéra qu’elle était donc bien
un « sujet politique ». Ensuite, il releva à nouveau que l’AGCOM n’avait pas indiqué
les raisons qui avaient motivé son revirement quant à l’appréciation du temps d’antenne et son choix de comparer des émissions présentant
de fortes différences en termes de popularité et de créneaux horaires. Enfin, il ordonna à l’AGCOM d’exécuter le jugement du 9 juin 2011 dans un délai de trente jours, et précisa qu’à défaut d’exécution
dans ce délai, il nommerait un commissaire ad
hoc (commissario ad acta) chargé de veiller à l’exécution du jugement.
22. Le 25 mai 2013, l’AGCOM ordonna à la RAI de programmer la
participation de l’association
requérante, avant la fin du cycle de programmation
de l’année 2013, aux émissions Porta a porta et Ballarò. Elle constata que
l’émission Annozero n’était plus diffusée et qu’en conséquence elle ne pouvait ordonner la participation de l’association requérante ni à cette émission ni, à titre compensatoire, à une autre émission. Elle rappela aussi que
la supervision de l’exécution
de la décision était réalisée à travers le suivi de la programmation des émissions mentionnées,
sous menace de sanctions pécuniaires en cas d’inexécution.
23. L’association
requérante fut invitée à participer à un enregistrement de l’émission Porta
a porta. Quant à l’émission Ballarò,
en absence de représentants
de l’association requérante,
ce fut la nouvelle secrétaire de l’association Radicali
Italiani qui y participa, par un message enregistré et diffusé en début d’émission.
LE CADRE
JURIDIQUE ET LA PRATIQUE INTERNES PERTINENTS
- LE DROIT INTERNE PERTINENT
- La législation applicable
- Le cadre juridique de la Commission de vigilance
et de l’Autorité pour les
garanties dans les communications : la loi no 249
de 1997
24. La loi
no 103 du 14 avril
1975 (modifiée par la loi no 112/2004),
intitulée « Nouvelles normes en matière de diffusion radiophonique et télévisée » (Nuove norme in materia di diffusione
radiofonica e televisiva), a transféré de l’exécutif au législatif
le contrôle du service
public de radiotélédiffusion, en créant
une commission parlementaire
bicamérale chargée de la direction générale et de la surveillance des services de radiotélévision (la commission de
vigilance). Depuis lors, le conseil d’administration de la RAI est nommé
par le Parlement.
25. L’AGCOM a été
créée par la loi no 249
du 31 juillet 1997. Elle a
pour fonction de veiller à
ce que les services et produits fournis par le concessionnaire du service public
soient conformes aux dispositions en vigueur, notamment aux dispositions applicables en matière de communication et d’information politiques
et aux règles relatives à l’équité de traitement, à l’égalité d’accès aux publications et à la diffusion d’informations et de messages électoraux. Elle peut aussi édicter des
dispositions réglementaires.
26. L’AGCOM a le pouvoir de sanctionner les sujets qui ne se conforment pas à ses ordres et mises
en demeure, en infligeant des sanctions pécuniaires, qui peuvent aller de vingt millions à cinq cents millions de lires (ITL). En cas
de violations particulièrement
graves, elle peut ordonner la suspension de l’activité ou même
la révocation de la licence
ou de la concession.
- La loi no 28 de 2000
27. La loi no 28
du 22 février 2000 portant diverses dispositions pour l’égalité d’accès
aux moyens d’information
pendant les campagnes électorales et référendaires et
pour la communication politique,
dite « loi sur la par
condicio », régit les
émissions de « communication
politique » et prévoit
deux régimes distincts, l’un pour la période
non électorale et l’autre
pour la période électorale.
28. En particulier,
l’article 2 § 1 énonce que l’accès aux
émissions d’information et aux
émissions de communication politique, c’est-à-dire aux tribunes politiques, aux débats, aux
tables rondes, aux
interviews et à toute autre
émission relayant un message politique, doit être garanti à tous les acteurs
politiques dans des conditions d’égalité. La RAI
a l’obligation de programmer
des émissions de communication politique à la
radio et à la télévision (article 2 § 4). La commission de vigilance et l’AGCOM se coordonnent
pour établir, chacune dans le cadre de sa compétence, les règles de mise en œuvre des dispositions de la loi. En particulier, la commission de vigilance élabore législation primaire pour le service public - la RAI (article 2 § 5).
29. L’article
10 § 3 prévoit qu’en cas de violation du principe de l’égalité d’accès aux émissions, l’AGCOM ordonne aux chaînes
de radiotélévision d’organiser
des émissions de communication politique auxquelles participeront largement les « sujets politiques » ayant subi l’inégalité
constatée.
30. L’article
11 ter définit les
émissions d’information et les
émissions de communication politique comme suit :
« (...)
b) « émission
d’information » : le journal télévisé (telegiornale),
le journal radiophonique (radio giornale) et,
plus généralement, tout bulletin
d’information ou autre programme informatif à fort contenu journalistique,
caractérisé par sa corrélation
avec l’actualité et les thèmes de société
(temi dell’attualità e della cronaca) ;
c) « émission de communication politique » :
tout programme dans lequel plusieurs acteurs politiques expriment et échangent leurs opinions et arguments politiques, même s’ils ne le font pas dans la même
émission mais sur plusieurs
émissions successives. »
- Le décret législatif no 117 de 2005 (Testo
unico della radiotelevisione)
31. L’article
3 du décret législatif no 117 du 31 juillet 2005 énonce les principes fondamentaux
applicables au système de radiotélévision, en particulier « la protection
de la liberté et du pluralisme
des médias, la protection de la liberté d’expression
de chaque individu, y compris la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées (...), l’objectivité, l’exhaustivité, la loyauté et l’impartialité de
l’information, l’ouverture aux différentes
opinions et tendances politiques
et sociales, (...) le respect
des libertés et des droits [de la personne], en particulier la dignité de la personne (...), garantis par la Constitution, le droit communautaire, les normes internationales applicables (...) ».
32. L’article 7 énonce les principes
généraux applicables en matière d’information, parmi lesquels se trouve l’obligation d’assurer « l’accès de tous les sujets
politiques aux émissions d’information et de communication
électorales et politiques dans des conditions
d’égalité et d’impartialité, selon
les formes et les modalités prévues
par la loi » (article
7 § 2 c)).
33. L’article
45 § 2 d) prévoit que la société concessionnaire du service de radiotélédiffusion garantit l’accès des partis politiques,
des groupes représentés au Parlement et, plus généralement, des mouvements, entités et groupes politiques aux émissions télévisées.
34. L’AGCOM vérifie
que la société concessionnaire s’acquitte comme il se doit des missions qui lui sont confiées et, en cas d’infraction, elle inflige des sanctions conformément
aux dispositions de l’article 48. En particulier, si
elle constate des manquements
de la part de la société concessionnaire,
elle impartit à celle-ci un
délai, de trente jours au maximum, pour y remédier. En cas d’infraction grave, elle peut infliger une amende administrative dont le montant peut aller
jusqu’à 3 % du chiffre d’affaires réalisé au cours du
dernier exercice clos (article 48 § 7). En cas d’infraction répétée, elle peut ordonner la suspension de l’activité
commerciale de la société concessionnaire
pour une durée maximale de quatre-vingt-dix jours (article 48 § 8).
- Les décisions de la commission
de vigilance et de l’AGCOM
- La résolution sur l’organisation
des tribunes politiques adoptée par la commission de vigilance le
18 décembre 2002 (et modifiée
le 29 octobre 2003)
35. La commission
de vigilance a adopté le 18
décembre 2002 une résolution
encadrant les émissions de communication politique diffusées par la RAI
hors période électorale. L’article 2 de cette résolution précise les forces politiques
auxquelles est assuré l’accès aux émissions
de communication politique.
L’article 3 définit les types de « tribunes politiques »
(conférences de presse, face-à-face, tables rondes).
36. L’article 11 définit les émissions d’information comme des émissions
liées à des thèmes d’actualité. Il prévoit que chaque
directeur doit, dans le respect de la liberté de
l’information, faire en sorte que
la programmation de ces émissions assure une représentation équitable de toutes les opinions politiques représentées au Parlement national et au Parlement européen.
- L’acte d’orientation sur le pluralisme
37. L’acte d’orientation sur les garanties visant à assurer le pluralisme dans le service public de radiotélédiffusion,
adopté par la commission de
vigilance le 11 mars
2003, prévoit que le concessionnaire du service public
doit, dans tous ses actes
et dans toutes ses branches, respecter
le pluralisme, dans son sens le plus large. En particulier,
ce principe doit être respecté par toutes les structures internes de l’entreprise de radiotélédiffusion
publique (divisions, chaînes et service journalistique),
et transparaître clairement
dans chaque émission.
L’acte d’orientation prévoit également, pour ce qui est plus particulièrement
des émissions d’information
politique, que celles-ci doivent respecter rigoureusement l’exhaustivité de l’information, la pluralité
des points de vue et la nécessité de laisser exprimer des opinions contradictoires. Les directeurs de chaîne, les animateurs et tous les journalistes
travaillant pour la société
concessionnaire du service
public sont engagés à respecter le principe d’impartialité afin de fournir au public un maximum d’informations vérifiées et fondées.
- La pratique de l’AGCOM en matière
d’émissions d’information politique
38. Dans une délibération du 12 avril 2001 (no 303/01/CSP), l’AGCOM a considéré que, compte tenu de sa structure et de son articulation,
l’émission d’information attaquée
par l’auteur de la plainte
dont elle était saisie ne pouvait être qualifiée
d’émission de « communication politique ».
Toutefois, elle a conclu à
la violation des règles relatives à l’égalité de traitement, à l’objectivité, à l’exhaustivité et à l’impartialité des informations présentées, et elle a ordonné, aux fins du
rétablissement de l’exhaustivité
et de l’impartialité, la participation
de représentants du « sujet politique »
plaignant à la première émission
utile programmée.
39. Dans une résolution du 1er février 2006 (no 22/06/CSP), l’AGCOM a exposé une orientation interprétative en matière de contrôle des émissions
d’information hors période électorale.
Elle a souligné que les émissions d’information et les programmes d’approfondissement politiques devaient respecter les principes d’impartialité, d’équité, d’exhaustivité et de pluralité des points de vue. Elle a précisé que dans
ces émissions, la présence à l’antenne des différentes tendances politiques devait être équilibrée
sur le cycle de programmation
de l’émission.
40. Dans une résolution du 25 juillet 2013 (no 477/13/CONS), l’AGCOM a expliqué que, parmi
les émissions d’information
politique, celles qui étaient de nature sérielle, cyclique et qui étaient clairement reconnaissables par leurs caractéristiques structurelles et leur articulation étaient considérées séparément (principio
di autonoma considerazione) lorsqu’il s’agissait de vérifier le respect du principe du pluralisme. Elle a précisé que, contrairement
aux émissions de communication politique, les émissions d’information politique n’étaient pas tenues de répartir
le temps de parole entre les différentes tendances politiques selon un critère rigide de répartition mathématique, mais devaient seulement respecter le principe de l’égalité
de traitement. Elle a rappelé
que selon sa position consolidée, ce principe devait être compris comme
imposant de traiter de la même manière les
situations similaires, afin
de garantir une représentation équitable
de toutes les opinions politiques dans les programmes d’approfondissement politique, ainsi que le bon déroulement du débat politique, toujours dans le respect de l’autonomie éditoriale et journalistique de
l’émission et de la corrélation
de l’information avec l’actualité
et les faits de nature politique (voir aussi la délibération no 243/10/CSP
du 15 novembre 2010).
- LA JURISPRUDENCE
NATIONALE
41. Dans son arrêt no 155 de 2002 (24 avril/7 mai
2002), la Cour constitutionnelle
a souligné que « le droit à l’information, garanti par l’article
21 de la Constitution, est qualifié
et caractérisé, entre autres, par le pluralisme des sources dans lesquelles on puise les connaissances et les faits – afin
de permettre au citoyen de se faire sa propre opinion, en ayant à
l’esprit des points de vue
et des orientations culturelles et politiques différents –, par l’objectivité
et l’impartialité des données fournies et, enfin, par l’exhaustivité, l’exactitude et la continuité de l’activité d’information garantie ».
Elle a ajouté que le droit de chaque citoyen à une information complète
et objective était protégé principalement au regard des
valeurs constitutionnelles fondamentales, et que ces valeurs ne résidaient pas tant dans une égale
visibilité des différents partis que dans le bon déroulement du débat politique, fondement permanent du système démocratique.
42. Dans un arrêt du 18 février
2003 (no 3950), le Conseil d’État
s’est prononcé sur la nature de l’article
2 de la loi no 28 de 2000, et en particulier sur l’obligation pour
la RAI d’assurer la programmation
d’émissions de « communication politique »
(article 2 § 4). Constatant
que cette obligation était subordonnée à l’adoption de dispositions
par la commission de vigilance
et l’AGCOM (article 2 § 5), il a
conclu que l’article 2 n’était pas de nature contraignante puisque son application dépendait de l’adoption d’une réglementation
secondaire.
LES DOCUMENTS DU CONSEIL DE L’EUROPE
43. La Cour renvoie aux nombreux
textes adoptés par le Comité des Ministres
en matière de liberté d’expression
et de pluralisme, en particulier
la Déclaration sur la liberté d’expression
et d’information du 29 avril
1982, la Recommandation Rec
(2007)2 sur le pluralisme des
médias et la diversité du contenu des
médias et la Recommandation
Rec (2007)3 sur la mission des
médias de service public dans
la société de l’information. En ses
parties pertinentes en l’espèce,
cette dernière recommandation est ainsi libellée :
« 14. Les médias de service public devraient
jouer un rôle important dans la promotion d’un débat et d’une participation démocratiques plus larges, avec l’aide, entre
autres, de nouvelles technologies
interactives, ce qui permettrait
à la population de s’impliquer
davantage dans le processus démocratique. Les médias de service public devraient jouer un rôle vital dans
l’éducation de citoyens actifs et responsables, en proposant non seulement un contenu de qualité, mais également un forum au débat public, ouvert à la diversité des idées
et des convictions dans la société, et une plate-forme pour diffuser les valeurs démocratiques.
15. Les
médias de service public devraient
fournir des informations appropriées sur le régime et les procédures
démocratiques, et encourager
la participation non seulement
aux élections mais aussi aux processus
décisionnels et à la vie publique en général. Dès lors, l’un des rôles des
médias de service public serait
d’inciter les citoyens à s’intéresser davantage aux affaires publiques et de les encourager à y prendre part plus activement.
(...)
17. Les
médias de service public devraient
jouer un rôle moteur dans la promotion de la vigilance du public à l’égard des gouvernements
nationaux et des organisations intergouvernementales,
en contribuant à renforcer
la transparence de ces derniers, leur obligation de rendre compte aux citoyens
et leur légitimité, concourant de la sorte à la lutte
contre tout déficit démocratique
et au développement d’un espace public européen. »
44. Enfin, la Recommandation
Rec (2012)1 sur la gouvernance
des médias de service
public rappelle que les « médias
sont l’outil le plus important pour la liberté d’expression
dans la sphère publique dans la mesure où ils
donnent la possibilité aux personnes d’exercer le droit de rechercher et de recevoir
l’information ». Avec cette
Recommandation, le Comité des Ministres recommande
aux États membres de repenser et reconstruire le système de gouvernance des médias afin de réussir la transition de service
de l’État à service public et de radiodiffuseur
à média de service public.
45. L’association requérante se plaint de la violation du droit à la liberté de communiquer
des idées et opinions de
nature politique à travers les chaînes télévisées
du service public. Selon elles, ceci aurait été la conséquence de l’exécution partielle du jugement du
TAR. Elle invoque l’article
10 de la Convention, qui est ainsi libellé :
« 1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n’empêche pas les
États de soumettre les entreprises de radiodiffusion,
de cinéma ou de télévision à un régime d’autorisations.
2. L’exercice
de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis
à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues
par la loi, qui constituent
des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l’intégrité
territoriale ou à la sûreté
publique, à la défense de
l’ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits
d’autrui, pour empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou pour garantir
l’autorité et l’impartialité
du pouvoir judiciaire. »
46. Constatant
que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens
de l’article 35 de la Convention et qu’il ne se heurte par ailleurs à aucun autre motif d’irrecevabilité,
la Cour le déclare recevable.
- Sur le fond
47. La Cour
note qu’il ne fait pas controverse entre les parties que l’absence de représentants de l’association requérante dans les émissions
d’information litigieuses s’analyse
en une ingérence dans l’exercice par l’intéressée du droit garanti par l’article 10 de la Convention. Les
points sur lesquels les
parties ne s’entendent pas sont ceux de savoir
si cette ingérence était « prévue
par la loi », si elle visait
un « but légitime »
et si elle était « nécessaire dans une société démocratique ».
48. Sur la question de savoir si l’ingérence était « prévue par la loi », l’association requérante soutient que la procédure interne s’est caractérisée par une série de décisions et d’omissions qui ont, selon elle, manifestement méconnu la législation interne en matière de
pluralisme de l’information.
49. Le Gouvernement
ne s’est pas exprimé sur ce
point.
50. La Cour
estime que l’ingérence était « prévue par la loi », puisque l’accès aux émission
d’information politique est régit
par les dispositions précitées (paragraphes 30 et 38
ci-dessus) et visent notamment à garantir aux chaînes de télévision une
autonomie éditoriale quant au choix des
invités et du temps d’antenne qui leur est alloué.
51. Sur la question du but
légitime, l’association requérante soutient qu’il est aisé de voir que, dans
la présente affaire, les
actions et omissions de la RAI et de
l’AGCOM ne poursuivaient aucun
des motifs de limitation légitime prévus à l’article 10 § 2 de la
Convention.
52. Le Gouvernement
ne s’est pas exprimé sur ce
point.
53. La
Cour note que les dispositions internes visent à garantir l’impartialité et le pluralisme de
l’information et, plus spécifiquement, la liberté du débat politique,
au bénéfice des citoyens et de la démocratie. Elle est donc convaincue que l’ingérence litigieuse visait la « protection
(...) des droits d’autrui » au sens de l’article 10 § 2 de
la Convention.
54. Il
reste ainsi à apprécier
la nécessité de cette ingérence dans une société démocratique.
Sur la nécessité
de l’ingérence dans une société démocratique
a) Thèses des parties
55. L’association
requérante estime que l’ingérence litigieuse n’était pas nécessaire dans une société démocratique ni, dès lors, conforme à l’article 10. Elle considère
en effet qu’à supposer qu’elle eût poursuivi un but légitime elle y aurait été manifestement
disproportionnée, et qu’elle
ne répondait à aucun besoin social impérieux.
56. Elle soutient
qu’elle a subi un préjudice extrêmement grave : indiquant que les émissions
au sujet desquelles elle a saisi l’AGCOM constituaient à l’époque des faits les principales
émissions d’information politique
de la RAI, elle expose que
l’exclusion même d’un seul de ces programmes
avait comme conséquence directe l’impossibilité de communiquer son
point de vue à un nombre incalculable de citoyens.
57. Elle argue
que déjà dans son arrêt de 2011 (no 8064)
le TAR avait clairement indiqué qu’elle était un « sujet
politique » au sens des dispositions
internes. Elle affirme ainsi que, contrairement
à ce que soutient le gouvernement défendeur, aucune nouvelle interprétation
plus objective n’est intervenue
en 2013 (paragraphe 21 ci-dessus).
58. Elle se plaint
également de ce que l’AGCOM
a classé sa plainte sans
suite sur la base d’une appréciation globale des émissions d’information de chaque chaîne. Elle estime qu’en procédant
ainsi, l’AGCOM s’est clairement
écartée de sa pratique en
la matière (délibérations nos 22/06/CONS,
22/08/CSP, 24/08/CSP, 43/08/CSP et 160/06/CSP), qui aurait
consisté à vérifier le respect
du pluralisme pour chaque émission prise séparément.
59. En outre,
elle se plaint que ses revendications n’aient trouvé satisfaction
que trois ans après sa première plainte à l’AGCOM, à l’issue de
ce qu’elle qualifie de « long calvaire judiciaire, et que, entretemps, l’émission Annozero avait été supprimée
de la grille de programmation,
ce qui a comporté l’impossibilité
d’obtenir une participation
compensatrice dans cette émission. Quant à l’exécution de la décision du TAR, elle n’a participé qu’à une émission de Porta
a porta, le 5 novembre 2013, et qu’aucun de ses représentants n’a participé à l’émission « Ballarò. Elle estime
ainsi que la décision de l’AGCOM n’a pas été respectée. À cet égard, elle souligne que Mme R.B.
a été invitée à participer à Ballarò en tant que nouvelle secrétaire de l’association Radicali Italiani et qu’en tout état de cause cette participation a pris la forme d’un enregistrement de deux minutes, diffusé en début d’émission et donc en dehors du débat en direct
qui a eu lieu pendant les deux heures
qu’a duré le programme.
60. L’association
requérante répond à l’argument concernant l’existence de la station de radio Radio
Radicale que la quasi-totalité
de la programmation radiophonique
de cette station consiste à diffuser
les travaux des deux chambres
du Parlement et que, plus généralement, Radio
Radicale constitue un instrument
et une voie d’information pour la totalité
du monde politique et institutionnel italien. Elle ajoute qu’en toute
hypothèse, le gouvernement défendeur ne saurait comparer l’omniprésence, la couverture territoriale et le volume
d’audience de la télévision avec
l’audience potentielle de Radio Radicale.
Elle fait observer par ailleurs que l’AGCOM n’a jamais considéré cette radio comme un élément susceptible d’exonérer la RAI de son obligation
de respecter les règles du pluralisme
de la télévision.
61. Elle soutient
que la présente affaire fait suite à une série d’actes de censure commis
par la RAI, qui ont selon
elle porté préjudice au mouvement radical. À l’appui de cette thèse, elle cite de précédentes délibérations de
l’AGCOM (nos 245/99, 382/09, 221/11 et 354/12) qui démontrent à son avis que la violation
de la réglementation encadrant
le secteur de l’audiovisuel
a provoqué la marginalisation
du mouvement radical.
62. Elle reproche
enfin à l’AGCOM de ne pas avoir exercé son pouvoir de sanction lorsque la RAI a manqué à exécuter sa décision. Elle considère qu’ainsi, l’AGCOM a failli à jouer son rôle de garante du pluralisme de l’information.
63. Le Gouvernement
soutient pour sa part que dans sa décision de 2013, le TAR du Latium a tenu compte, sur la base d’une interprétation
nouvelle et plus factuelle de la notion
de « sujet politique »,
d’un certain nombre de faits (l’accord public passé entre l’association
requérante et un parti politique
et le fait qu’après les élections les
élus de l’intéressée avaient formé une délégation autonome) pour en déduire
que l’association requérante constituait un groupe politique représenté au Parlement
et que, dans ces conditions, elle était un « sujet politique ».
64. Il souligne
que, dans un délai de vingt jours,
c’est-à-dire selon lui un délai
bref, l’AGCOM a ordonné à
la RAI de prévoir la participation
de représentants de l’association
requérante aux émissions Porta a porta et Ballarò, Annozero ayant entre-temps été supprimée par la RAI.
65. Il affirme que la manière dont la décision de l’AGCOM a été exécutée n’est pas due à une pratique administrative
fautive ou à un défaut de coopération mais le résultat d’une série de difficultés concrètes, liées notamment aux circonstances spécifiques de l’évolution de l’association requérante depuis sa création en 1992, en particulier à ses changements répétés de dénomination. Il indique que, née de la transformation de l’ancien parti radical à l’initiative du chef de file
radical aujourd’hui décédé
M.P., l’association requérante
a participé aux élections sous différents sigles et parfois en présentant ses candidats sur les listes électorales
d’autres formations politiques.
66. Il allègue que la rédaction de l’émission Ballarò a proposé
à plusieurs reprises à un membre de l’association requérante, Mme E.B., de participer à l’émission, mais que ces invitations
ont toujours été déclinées. La rédaction de l’émission aurait alors contacté
l’ancien secrétaire de l’association Radicali
Italiani, puis sa nouvelle secrétaire, qui aurait finalement participé à l’émission par une intervention enregistrée.
67. En conclusion,
le Gouvernement soutient qu’il n’y a pas
eu violation de la liberté
d’expression de l’association
requérante.
b) Appréciation
de la Cour
68. La Cour
rappelle d’emblée les principes généraux découlant de sa jurisprudence en matière de nécessité d’une ingérence dans l’exercice de la liberté d’expression
et du pluralisme dans les médias
audiovisuels (Animal Defenders
International c. Royaume-Uni [GC], no 48876/08, §§ 100 et 101, CEDH 2013 (extraits))
et, en particulier, le principe selon
lequel il n’est pas de démocratie sans pluralisme (Centro
Europa 7 S.r.l. et Di Stefano c. Italie [GC], no 38433/09, § 129, CEDH 2012, et Manole
et autres c. Moldova, no13936/02, § 95, CEDH 2009 (extraits)).
69. La liberté de la presse fournit à l’opinion publique l’un des meilleurs moyens de connaître et juger les idées et attitudes
des dirigeants. Plus généralement, le libre jeu du débat politique se trouve au cœur
même de la notion de société démocratique qui domine
la Convention tout entière (Lingens
c. Autriche, 8 juillet
1986, § 42, série A no 103).
70. Les
médias audiovisuels ont un rôle particulièrement
important à jouer à cet égard. En raison
de leur pouvoir de faire passer des
messages par le son et par l’image, ils ont des
effets plus immédiats et
plus puissants que la
presse écrite (Jersild
c. Danemark, 23 septembre
1994, § 31, série A no 298, Pedersen et Baadsgaard c. Danemark [GC],
no 49017/99, § 79, CEDH 2004-XI, et Murphy c. Irlande, no 44179/98, § 74, CEDH 2003-IX).
71. Une situation dans laquelle une fraction économique ou politique de la société peut obtenir
une position de domination sur les
médias audiovisuels et exercer ainsi une pression sur les diffuseurs pour finalement restreindre leur liberté éditoriale porte atteinte au rôle fondamental
qu’est dans une société démocratique celui de la liberté d’expression consacrée par l’article 10 de la
Convention, en particulier lorsqu’il
s’agit de communiquer des informations et des idées d’intérêt
général, que le public a de
plus le droit de recevoir (VgT Verein gegen Tierfabriken c. Suisse,
no 24699/94, §§ 73 et 75, CEDH 2001-VI, voir également De Geillustreerde Pers N.V. c. Pays-Bas,
no 5178/71, rapport de la Commission du
6 juillet 1976, Décisions
et rapports (DR) 8, p. 25, § 86).
72. La Cour
considère que, dans le domaine de la diffusion audiovisuelle, ces principes imposent
à l’État, garant ultime du pluralisme (Manole, précité, §
99, Informationsverein Lentia et autres c. Autriche,
24 novembre 1993, § 38, série A no 276, VgT Verein gegen Tierfabriken, précité, §§ 44-47), l’obligation
de garantir d’une part l’accès du
public, par l’intermédiaire de la télévision
et de la radio, à des informations
impartiales et exactes ainsi qu’à une pluralité d’opinions et de commentaires
reflétant notamment la diversité des opinions politiques dans le pays, et d’autre part la protection des journalistes et des autres professionnels des médias audiovisuels
contre les entraves à la communication de ces informations et commentaires. Le choix des moyens
par lesquels ces buts doivent être
atteints doit varier en fonction des conditions locales et relève donc de la marge d’appréciation de l’État. Ainsi par exemple, si la Cour et, avant elle, la Commission ont reconnu qu’un service public de radiodiffusion peut contribuer à la qualité et à l’équilibre des programmes
(Informationsverein Lentia et autres, précité, § 33, Tele 1 Privatfernsehgesellschaft mbH c. Autriche,
no 32240/96, 21 septembre 2000,
et X. SA c. Pays-Bas, no 21472/93, décision de la
Commission du 11 janvier
1994, DR 76-B, p. 129), l’article 10 n’oblige nullement les États à mettre
en place un tel service, dès
lors que d’autres moyens sont
mis en œuvre dans le même but.
73. Cependant,
lorsque l’État décide de mettre en place un système public de radiotélédiffusion,
il découle des principes exposés ci-dessus que le droit
et la pratique internes doivent garantir que ce système assure un service
pluraliste. Lorsque, en particulier,
les stations privées sont
encore trop faibles pour proposer une véritable
alternative et que l’organisme
public ou d’État est donc le seul diffuseur
ou le diffuseur dominant dans un pays ou une région,
il est indispensable pour le bon fonctionnement
de la démocratie qu’il
diffuse des informations et
des commentaires impartiaux, indépendants et neutres et qu’il fournisse en outre un forum de discussion publique dans le cadre duquel
un éventail aussi large que possible d’opinions et de
points de vue puissent s’exprimer (Manole, précité, § 101).
74. En ce qui concerne le débat politique, la Cour a dit que
la liberté d’expression est l’une des
conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps
législatif, et elle a rappelé
que, en période préélectorale, il est particulièrement
important de permettre aux opinions et aux informations de tous ordres de circuler librement (Bowman c. Royaume-Uni,
19 février 1998, § 42, Recueil
des arrêts et décisions 1998‑I).
- Application de ces principes en l’espèce
75. Hors période
électorale, la diffusion des idées et opinions politiques passe par les émissions de « communication
politique » et les émissions d’information (paragraphe
30 ci-dessus) : les unes comme les
autres ont pour but de contribuer au débat politique
national, en permettant le pluralisme
de l’information dont le public est destinataire et bénéficiaire.
76. La conception
et les choix thématiques des émissions d’information relèvent
de l’autonomie éditoriale
de chaque chaîne et de chaque rédaction. Les dispositions légales fixent seulement les principes
généraux applicables à l’accès des « sujets politiques » à
la radio et à la télévision, en laissant
à la commission de vigilance
et à l’AGCOM le soin d’adopter,
chacune dans son champ de compétence, la réglementation secondaire mettant en œuvre ces principes. Le contrôle du respect
de ces normes incombe à l’AGCOM (paragraphe 25 ci-dessus).
77. La Cour
note qu’en l’espèce l’association requérante a saisi l’AGCOM pour se plaindre
d’un déséquilibre de présence
en sa défaveur dans certaines émissions de télévision (paragraphe 14 ci-dessus), en particulier de ce qu’elle n’avait pas été représentée
dans trois émissions d’information politique
particulièrement populaires
diffusées par la RAI.
78. Elle observe
d’emblée que l’enjeu de la plainte introduite par l’association requérante portait sur la participation de
l’intéressée à des débats touchant à l’intérêt général, et que par conséquent l’ampleur de la marge d’appréciation accordée à l’État italien doit
être relativement réduite (VgT Verein gegen Tierfabriken,
précité, § 71).
79. Il y a lieu de noter que
la plainte de l’association
requérante a fait l’objet de deux classements
sans suite, même si, infirmant
la première décision de l’AGCOM, le TAR du Latium avait invité cette dernière
à tenir compte de ce que : premièrement, l’association requérante était un « sujet politique » et ne pouvait donc pas être
comparée à des forces politiques non représentées au Parlement ; deuxièmement, même des forces
politiques non représentées
au Parlement avaient participé à ces trois émissions ;
et, troisièmement, l’AGCOM devait
motiver son choix de s’écarter de sa pratique antérieure consistant à considérer chaque émission séparément lorsqu’elle était appelée à vérifier si le principe de pluralisme avait été respecté
(paragraphe 17 ci-dessus).
80. La Cour
observe que ce n’est qu’après que l’association
requérante eut introduit un deuxième recours, cette fois pour violation de la chose jugée (paragraphe 20 ci-dessus), et que le TAR du Latium eut en conséquence enjoint à l’AGCOM d’exécuter le jugement qu’il avait rendu
précédemment, que l’AGCOM a
enfin ordonné à la RAI de corriger la situation de déséquilibre
qui avait porté préjudice à l’association requérante (paragraphe 22
ci-dessus).
81. Comme
déjà évoqué, dans son premier jugement, le TAR
avait conclu que l’association requérante était un « sujet politique »
au sens de la réglementation interne (paragraphe
17 ci-dessus). Dès lors, le refus de l’AGCOM de tenir compte de cette conclusion ne saurait se justifier par le statut quelque peu particulier de l’intéressée (paragraphe 65 ci-dessus), ce statut ayant déjà été
éclairci par le juge administratif. La Cour considère que l’AGCOM s’est montrée excessivement formaliste,
d’autant que le TAR avait pour sa part fondé son appréciation sur la réalité de la
situation de l’association requérante : il avait tenu compte
de ce que celle-ci avait signé avec un parti politique un accord qui lui avait permis de présenter ses candidats
aux élections et de créer ensuite une délégation autonome au sein du groupe
parlementaire de ce même
parti (paragraphe 17 ci-dessus).
82. La Cour
note ensuite que, en comparaison du régime applicable aux émissions de communication politique, la législation interne reconnaît une
majeure autonomie éditoriale
aux chaînes télévisées à la chaîne pour les programmes d’approfondissement politique quant aux choix
des thèmes traités, des invités
et du temps de parole alloué à chacun (paragraphe 30 ci‑dessus).
Elle relève aussi qu’il résulte des
observations des parties (paragraphe 56 ci-dessus) que ces émissions
sont devenues la forme privilégiée de présentation du débat politique et de diffusion des idées
et opinions politiques dans
les médias.
83. Par ailleurs,
s’il est vrai que, contrairement aux émissions de communication politique, les émissions d’information politique ne sont pas soumises au
strict respect d’une représentation proportionnelle des opinions de chaque force politique mais simplement à l’obligation de représenter de manière équilibrée les différentes opinions politiques (paragraphe 41 ci‑dessus), la pratique de l’AGCOM (paragraphes 38-40 ci-dessus) et du TAR du Latium citées (paragraphes 17 et 21 ci-dessus) quant à l’application des principes généraux en matière de pluralisme (paragraphes 30 et 32 ci‑dessus)
témoignent d’une protection
renforcée de l’accès des « sujets politiques » à une catégorie
spécifique d’émissions
d’information politique, à savoir
celles qui sont caractérisées par une programmation
saisonnière cyclique (programmazione
seriale) et par une structure et une articulation reconnaissables par
le public. Ces émissions, dans lesquelles l’AGCOM inclut Porta a porta, Annozero et Ballarò,
font ainsi l’objet d’une « appréciation
autonome » lorsqu’il s’agit
d’évaluer le respect du principe du pluralisme à l’égard d’un « sujet politique ». Cela signifie que des
situations similaires doivent
être traitées de manière similaire, dans le respect du principe d’égalité et dans le but de garantir le bon déroulement
du débat politique et donc le pluralisme de l’information (paragraphe
40 ci‑dessus).
84. Or la Cour
observe que, sans avancer à cet égard
la moindre motivation,
l’AGCOM a abandonné cette pratique et procédé à une appréciation globale du temps de présence de l’association requérante dans l’ensemble des émissions d’information de la chaîne,
sans tenir compte de l’horaire de diffusion des émissions ni de leur popularité.
85. La
Cour reconnait qu’un système de radiotélédiffusion comme celui italien, bien que loin d’avoir réalisé
la transition de radiodiffuseur
à media de service public (paragraphe 44 ci-dessus), a progressivement
réduit, dans le contexte du débat
politique, le rôle direct de l’État dans le contrôle du service public de radiotélédiffusion
à faveur d’une autorité administrative indépendante, et
qui a reconnu, par
rapport au passé, une majeure autonomie éditoriale à chaque chaîne ainsi
qu’aux rédactions responsables des émissions d’information, assure
en principe une meilleure protection
des principes d’impartialité et de pluralisme de
l’information.
86. Néanmoins,
dans la présente affaire,
il apparaît que l’association requérante a été absente de trois émissions à forte popularité et qu’elle s’est trouvée, sinon exclue, du moins
fortement marginalisée du débat politique
médiatique (paragraphe 14
ci-dessus).
87. La Cour
constate ensuite que, lorsque l’association requérante a enfin pu obtenir une décision de l’AGCOM ordonnant à
la RAI de prévoir des temps de parole en sa faveur, l’émission AnnoZero avait été supprimée
des programmes de la RAI.
La Cour note que, bien que la suppression
des émissions soit fréquente, l’obligation d’exécution aurait dû imposer
une présence compensatrice à faveur
de l’association requérante
(paragraphe 22 ci-dessus).
88. À cela vient s’ajouter l’inexécution partielle de la décision de l’AGCOM par la RAI, qui était
ténue à observer afin d’assurer le respect du principe du pluralisme de l’information.
En effet, il apparaît que l’association requérante a effectivement participé à l’émission Porta
a porta mais qu’aucun de ses
représentants n’a participé
à l’émission Ballarò. À cet égard, la Cour
observe que le Gouvernement n’a pas fourni la preuve des invitations envoyées aux membres
de l’association requérante,
à l’exception d’un échange avec E.B. (paragraphe 66 ci-dessus). Quant à R.B., ancienne élue sur la liste radicale, y a certes participé en qualité de nouvelle
secrétaire de l’association Radicali Italiani,
mais cette association était distincte de l’association requérante (paragraphe 17 ci-dessus). En outre, cette intervention
s’est limitée à un court passage
enregistré et diffusé en
ouverture de l’émission, sans possibilité
de dialogue ni de participation
au débat avec les autres
représentants politiques.
89. Enfin,
la Cour relève que le gouvernement défendeur argue que la RAI a rencontré « une certaine difficulté » dans l’exécution de la décision de
l’AGCOM, liée selon lui aux circonstances spécifiques de l’évolution de l’association requérante depuis sa création en 1992 (paragraphe 65 ci‑dessus).
Elle estime que cet argument est dénué de pertinence. En effet, l’association requérante avait déjà présenté des
candidats à des compétitions électorales en se présentant sur les listes électorales d’autres mouvements politiques :
sa situation était donc suffisamment connue des autorités compétentes
(paragraphe 65 ci-dessus). S’il est probable que l’accord politico-électoral qui a permis l’élection de neuf représentants de l’association requérante présentait des aspects de nouveauté, il faut observer que le TAR, déjà dans son jugement
de 2011, avait indiqué que l’intéressée devait être considérée
comme un « sujet
politique » au sens des dispositions
internes. Cela aurait dû permettre à l’AGCOM d’apprécier la situation de l’association
requérante à partir de ce constat,
et, par conséquent, à la RAI de résoudre
les difficultés invoquées par le gouvernement défendeur.
90. Les considérations qui précèdent suffisent à la Cour pour conclure qu’en l’espèce les mesures prises
par les autorités internes pour rééquilibrer la
situation qui avait eu pour
effet d’exclure l’association requérante du débat politique
ont été insuffisantes.
91. Partant, il y a eu violation de l’article 10 de la Convention.
- SUR LA VIOLATION
DE L’ARTICLE 6 DE LA CONVENTION
92. L’association
requérante soutient que l’inexécution de la décision de
l’AGCOM a emporté violation
à son égard de l’article 6 § 1
de la Convention.
93. Le
Gouvernement conteste cette thèse.
94. La Cour constate que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35
de la Convention et qu’il ne se heurte
à aucun autre motif d’irrecevabilité. Elle le déclare donc recevable. Toutefois, compte tenu des considérations
qui précèdent (paragraphes
86-88) et du constat de violation de l’article 10 de la Convention auquel
elle est parvenue (paragraphe
89) ci-dessus), elle ne juge
pas nécessaire de l’examiner
séparément.
- SUR L’APPLICATION
DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION
95. Aux termes de l’article 41 de la Convention :
« Si la Cour déclare qu’il
y a eu violation de la
Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il
y a lieu, une satisfaction équitable. »
- Dommage
96. L’association requérante sollicite une indemnité pour préjudice moral et
s’en remet à la sagesse de
la Cour pour en déterminer
le montant selon
des critères équitables.
97. Le Gouvernement
souligne que l’association requérante est l’actionnaire principal de Radio
Radicale, une radio privée qui offre un service d’intérêt
général et qui retransmet les sessions du Parlement, les séances d’autres organes constitutionnels ainsi que d’autres
manifestations d’intérêt général et qui reçoit pour cela des financements publics. Il invite ainsi la Cour à tenir dûment compte
de cet élément aux fins de la détermination du dommage moral que l’intéressée a pu subir.
98. La Cour,
compte tenu du constat de violation
auquel elle est parvenue, juge raisonnable d’allouer à l’association requérante 12 000 euros
(EUR), pour dommage moral, plus tout montant pouvant être dû sur cette
somme à titre d’impôt.
- Frais et dépens
99. L’association
requérante réclame 15 000 EUR au titre des frais et dépens
qu’elle dit avoir engagés dans
le cadre de la procédure menée devant la Cour.
100. Le Gouvernement
ne s’est pas exprimé sur ce
point.
101. Selon la jurisprudence
de la Cour, un requérant ne
peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure
où se trouvent établis leur réalité,
leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce, compte tenu des documents
dont elle dispose et des critères
susmentionnés, la Cour juge raisonnable d’allouer à l’association
requérante 5 000 EUR
pour la procédure menée devant elle, plus tout montant pouvant être dû
sur cette somme à titre d’impôt.
- Intérêts moratoires
102. La Cour
juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires
sur le taux d’intérêt de la
facilité de prêt marginal de la Banque centrale
européenne majoré de trois
points de pourcentage.
PAR CES MOTIFS, LA COUR, À
L’UNANIMITÉ,
- Déclare la requête recevable ;
- Dit qu’il y a eu violation de l’article 10 de
la Convention ;
- Dit qu’il n’y a pas lieu d’examiner le grief formulé sur le terrain de l’article 6 § 1 de la Convention ;
- Dit,
a) que
l’État défendeur doit verser à l’association
requérante, dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2
de la Convention, les sommes
suivantes :
- 12 000 EUR (douze mille euros), plus
tout montant pouvant être dû sur cette somme à titre d’impôt, pour dommage moral ;
- 5 000 EUR (cinq mille euros), plus tout
montant pouvant être dû sur cette somme par l’association
requérante à titre d’impôt, pour frais et dépens ;
b) qu’à
compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront
à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale
européenne applicable pendant cette
période, augmenté de trois points de pourcentage ;
- Rejette le
surplus de la demande de satisfaction
équitable.
Fait en français, puis communiqué par écrit le 31 août 2021, en application de l’article 77 §§ 2
et 3 du règlement.
RenataDegener Ksenija Turković
Greffière Présidente